Chapitre 19 (2/2)

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Quand j'ouvris de nouveau les yeux, mon corps me sembla peser des tonnes. Ma gorge me brûlait, ma bouche était pâteuse et ma tête me faisait souffrir le martyre. On aurait dit le lendemain d'une cuite mémorable. Il me fallut un moment avant de comprendre que je me trouvais dans une chambre, allongée sur un grand lit aux draps rêches. À en croire l'éclairage tamisé, il devait être tard. Je me redressai lentement, détaillant la pièce avec curiosité. La déco était vieillotte, les murs étaient recouverts d'un antique papier peint décoloré par le temps, et sur le sol une moquette ivoire en piteux état me rappela celle de la réception de l'hôtel. J'avais dû être amené ici après la bataille.

Je tentai de me lever, les jambes tremblantes et dus m'aider du mur pour me maintenir debout. Un petit coup d'œil par la fenêtre m'apprit que la vie avait repris son cours dans la ville. Une musique aux accents joyeux résonnait dans un bar non loin de l'hôtel, et des gens, soldats et civils buvaient et riaient en terrasse. Le soleil descendait à l'horizon donnant à la mer des allures d'or liquides. J'entendis la porte claquer dans mon dos et découvris sans grande surprise Aaron. Il avait dû sentir que j'étais réveillée et il s'empressait donc de venir me passer un savon. Il ne semblait pas être de meilleure humeur que sur la plage, bien que je ne fusse plus capable de savoir avec précision dans quel état il était exactement.

— Tu devrais te recoucher...me conseilla-t-il d'une voix tendue.

— Non, c'est bon, tout va bien.

Il soupira bruyamment, ferma les yeux et s'adossa à la porte. Ne sachant pas trop comment réagir, je me contentai de rester là, immobile à l'observer en silence. La lumière d'une petite lampe proche de la porte dessinait d'étranges ombres sur son visage, accentuant ses traits crispés.

— Aaron ? lançai-je d'une petite voix, persuadée qu'il n'allait pas tarder à exploser.

Il ouvrit les yeux et me transperça du regard.

— Dis-moi un peu ce qui a bien pu te passer par la tête exactement ? gronda-t-il. Je t'ai ordonné de revenir. Je t'ai donné un ordre !

— Techniquement tu n'as fait que crier mon nom. Je ne suis pas un chien, je ne réponds pas quand on me siffle. Et puis qu'est-ce que tu voulais que je fasse ? Que je les laisse tous mourir ?

— C'était stupide ! Suicidaire ! Tu ne savais même pas si tu étais capable de faire une chose pareille ! Tu ne t'étais jamais entraînée ! hurla-t-il, le visage rougi par la colère.

— Mais j'ai réussi !

— Là n'est pas la question Aloys ! Tu ne savais pas que tu réussirais, tu aurais pu mourir.

— C'était peut-être risqué, mais ça en valait la peine non ? Il n'y a eu aucun blessé !

Il souffla bruyamment, luttant pour garder son calme.

— Ce n'est pas à toi de prendre ce genre de décision, lâcha-t-il d'un ton cinglant.

— Peut-être pas, mais en l'occurrence tu avais tort. Tu les aurais laissés mourir alors que je pouvais les sauver !

— Evidemment ! Comment aurais-je pu deviner que tu étais capable de faire une chose pareille ? Ce n'est pas écrit dans ton dossier et tu ne m'en as jamais parlé.

— Tu m'as vu le faire contre Don, protestai-je avec force.

— Ça n'a rien à voir ! s'emporta-t-il, ce gamin n'avait pas le quart de la force de cette vague, et son poing ne mesurait pas vingt mètre, Aloys !

— Ok, ok tu as raison, j'ai eu tort, c'était probablement trop risqué, dis-je en levant les mains en signe de reddition. Mais je ne le regrette pas. Et si c'était à refaire, je le referais sans hésiter.

Aloys (Tome 1) : lightning and shadowOù les histoires vivent. Découvrez maintenant