Chapitre 1

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 Un jour d'octobre 2002 , Portland Oregon

Jake vient de partir rejoindre les autres club. Je sais que je n'ai pas beaucoup de temps devant moi. Mais je ne le fais pas pour moi, non. Je le fais pour elle, essayais-je de me rassurer en jetant en vrac quelques affaires dans un sac de sport qui serait on ne peut plus discret si les voisins me voyaient. Puis je dépose une lettre que j'ai rédigée, il y a quelques jours déjà, sur son oreiller. Je ne sais pas s'il me pardonnera mais j'espère qu'il le comprendra. Je l'aime c'est une évidence mais je dois penser avant tout à elle. J'essuie une larme qui roule sur ma joue et me dirige vers la porte où les lettres du prénom Catriona sont peintes. 

Je me ressaisis et ouvre doucement la porte de la chambre de notre fille. Je la regarde quelques instants avant de prendre un sac que j'avais pris soin de préparer quelques jours plus tôt. Mes deux sacs sur les épaules, je me penche et la prends dans mes bras alors qu'elle dort encore. Elle grogne un peu puis se niche dans mon cou alors que je l'enroule dans une couverture. Je descends les escaliers et me dirige vers le garage où est garée ma voiture.

Sans un regard en arrière, je sors de l'allée et me dirige vers le point de rendez-vous. Le stress s'évacue peu à peu à chaque kilomètre qui passe même si j'appréhende de le voir.

Une fois sur place, il est déjà là garée dans une toyota corolla flambant neuve. J'esquisse malgré moi un sourire. Lui qui est toujours sur sa moto, le voir dans ce genre véhicule a quelque chose de comique. 

A peine suis-je sortie de la voiture, qu'il me dit exactement ce que j'avais besoin d'entendre. Que je prenais la bonne décision, qu'il comprendra pourquoi je le faisais. Qu'il prendrai soin de lui et veillerai sur lui. Je m'éloigne de son mode de vie pas de lui. Car quoiqu'il arriverait dans le futur, il restera à jamais le seul homme de ma vie, le seul que j'aimerai. 

Il me serre dans ses bras et me donne une enveloppe pleine de billets. Mon premier réflexe est de la refuser mais il me montre la petite. Je m'avoue vaincue et l'accepte pour elle. Il me tend alors les clés de ma nouvelle voiture et moi celle de mon ancienne. Il semble un instant hésiter à partir. Il la regarde une dernière fois et caresse ses boucles blondes avant d'essuyer une larme au coin de ses yeux. Il me serre dans ses bras me faisant promettre de le contacter si nous avions le moindre problème. J'acquiesce contre son torse en essayant vainement de retenir mes larmes. Puis sans un mot de plus, il se dégage de mon étreinte et monte dans mon ancienne voiture avant de démarrer en trombe. 

Je prends quelques instants pour fixer l'endroit où il avait disparu à l'horizon. Je pense au fait que je quitte tout pour me lancer dans l'inconnu. A partir de maintenant, j'étais seule, nous étions seules contre tous. Ma petite puce se rappelle à moi en gigotant.

_ Oui, ma puce, maman va t'installer et on reprend la route, dis-je doucement en ouvrant la portière arrière. Je souris en voyant qu'il avait pensé à installer un siège auto d'une grande marque. Je repense alors à sa phrase fétiche qu'il me sortait à chaque fois que je trouvais qu'il dépensait trop d'argent pour elle. "Rien n'est trop beau pour ma petite princesse, laisse moi donc la gâter un peu."

Une fois attachée, je charge le coffre et démarre. Je souffle un bon coup quand je sors de Portland. Je laisse derrière moi, mon passé, l'homme que j'aime, et me dirige vers mon avenir à un peu moins de mille miles au sud, à Los Angeles . . . J'avais bêtement pensé à cette époque qu'il serait plus facile de disparaître dans la deuxième plus grande ville du pays.

2019, Los Angeles Californie

_ Cat, dépêche toi ! Je ne veux pas arriver en retard à l'hôpital ! Me crie ma mère du bas de l'escalier.

_ C'est bon, pars sans moi m'man. J'irai en vélo, il fait encore beau. De toute façon, il fait toujours beau, lui répondis-je en relevant mes cheveux en un chignon flou sur le haut de mon crâne.

_ OK, . . ., mais envoie moi un message quand tu es arrivée, d'accord, reprend-t-elle

_ Oui, m'man, comme d'habitude, répliquais-je avec un pointe infime d'agacement.

_ Merci Cat, entendis-je avant d'entendre la porte se fermer.

Je rassemble mes affaires de cours pour les mettre dans mon sac à dos. Suite à la mort de mon père quand j'avais deux ans, ma mère était devenu extrêmement protectrice vis à vis de moi. Je sais que pour elle cela n'avait pas été facile. J'essaie toujours de comprendre et de relativiser mais parfois c'est un peu dur d'être toujours sous sur une sorte de surveillance. Mais comment pourrais-je lui en vouloir. Nous étions seules quasiment depuis toujours et je me sentirai perdue s'il lui arrivait quoique se soit. Alors je fais avec. Je soupire à cette pensée, mets mon sac sur mon épaule et récupère mon vélo dans le garage. 

Alors que je pédale à un bon rythme pour me rendre à UCLA, je constate que la ville est parée de rouge, de rose et de blanc. Je remarque que les filles près du lycée à côté de chez moi sont très apprêtées. Mais ce n'est que quand je vois ce type avec une boîte en forme de cœur que mon cerveau percute. On est le 14 février, . . . La Saint-Valentin.

Je souris mais par pour ce que l'on pourrait croire. Je suis célibataire car les garçons ont toujours étaient une énigme. La plupart ne veulent qu'une chose et, moi et bien, je crois que je suis trop . . . romantique et j'ai toujours peur d'être déçue. Alors je reste la bonne copine et cela me convient parfaitement. 

Et puis j'ai tout le temps la tête dans mes bouquins. Je ne peux pas dire que les auteures que je lis allaient m'aider. Quelque part je rêve de rencontrer un monsieur Darcy avec le côté sauvage de Heathcliff. Mon dieu je ne sais pas combien de fois j'avais pu lire et relire les Hauts de Hurle-vent et Orgueil et préjugés. Et dans tout cela, ma mère n'était jamais retombé amoureuse depuis mon père. Même maintenant, dix-sept ans après sa mort dans un accident de moto, c'était toujours un sujet douloureux pour elle. Alors je l'évite autant que possible.

Sans que je ne m'en rende, je vois déjà le bâtiment de mon premier cours de la journée, littérature anglaise. J'attache mon vélo et entre dans le grand hall. Une fois dans l'amphithéâtre, je m'installe dans les premiers rangs comme d'habitude. J'allais fermer mon sac quand le prof fait son entrée et que mon portable choisit ce moment de silence précis pour se mettre à sonner. Tous les regards convergent vers moi, dont celui de Monsieur Douglas, professeur de littérature anglaise.  Je deviens rouge de honte et me jette sur mon portable pour le couper. Je suis tellement mal à l'aise que je l'éteins sans le vouloir ne regardant pas même pas le numéro appelant. Le cours reprend son cour et la journée se poursuit. Je ne pense plus à cet appel que je regretterai amèrement toute ma vie de ne pas avoir pris .  . .


TEARS, WEAPONS AND BLOODOù les histoires vivent. Découvrez maintenant