Chapitre 216 : Accostage

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 Après environ une heure d'attente, le navire sur lequel Syara et Elyazra étaient emprisonnées avait enfin accosté. Peu de temps après, l'homme à qui elles avaient parlé était revenu avec, d'après les bruits de pas, toute une escorte. Ceux-ci détachèrent les jeunes femmes des poteaux auxquels elles étaient accrochées et leur demandèrent de se lever.

Avoir les mains libres était la première chose qu'elles voulaient pour se libérer et faire payer à ces personnes ce qu'ils leur avaient fait, mais ce moment n'arriva malheureusement pas. Leurs menottes devaient être pourvues de deux chaînes L'une d'elle liait leurs mains entre elles et l'autre les reliaient au poteau, si bien qu'ils n'avaient pas besoin de les détacher totalement.

Heureusement, leur petit test était passé inaperçu auprès de leurs ravisseurs. Ils n'allaient rien leur faire pour ça, mais le problème demeurait. Elles étaient toujours impuissantes.

— Petite question, intervint la demi-dragonne. Vous allez nous porter ou nous allons devoir sauter à pieds joints jusqu'à l'endroit auquel vous voulez nous emmener ?

— Ne vous en faites pas, nous avons tout prévu, répondit l'homme.

Toujours aveugle à cause du sac qu'elle avait sur la tête, Syara sentit tout de même que quelqu'un s'accroupissait au niveau de ses pieds. Elle entendit alors un nouveau bruit de chaîne et, après une rapide vérification, se rendit compte qu'elle pouvait séparer ses jambes. Elle n'était cependant, là aussi, pas totalement libre de ses mouvements et n'avait qu'une longueur assez grande pour faire un pas après l'autre.

Vu toutes les précautions qu'ils avaient prises, ces personnes n'étaient pas des amateurs. Impossibilité de bouger les mains, les mouvements des pieds réduits au minimum, une cagoule opaque qu'elle ne pouvait pas enlever et, pour finir, un étrange collier qui, elle en était sûre, bloquait ses pouvoirs.

S'échapper n'allait peut-être pas être aussi facile qu'elle l'aurait cru. En plus d'être entravée, elle se sentait entourée par de nombreuses personnes. Se débarrasser d'eux dans cet état n'était pas faisable et elle devrait sans doute attendre une meilleure occasion pour s'enfuir.

— Allons-y, décida celui à qui elles avaient parlé.

Se dirigeant au son, Syara ne tenta pas de résister et avança dans sa direction. Cependant, elle entendit rapidement des cris derrière elle.

— Mais avance ! s'énerva l'un des hommes de main.

— Je ne peux pas, j'ai peur de tomber avec les yeux bandés, répondit Elyazra.

— En t'en fait pas ma belle, rit celui qui avait crié. Je suis juste devant toi, je vais te guider.

— Trop aimable. Merci pour cette information.

Suite à ces paroles, un étrange craquement suivi d'un cri de douleur se fit entendre. Syara sentit que tout le monde s'était retourné et elle entendait quelqu'un enchaîner les insultes.

— Qu'est-ce qui s'est passé ? tonna la voix du chef.

— Cette connasse m'a mis un coup de tête et m'a pété le nez !

— Mais vous vous attendiez à quoi sérieusement ? Vous nous avez enlevé et vous croyez qu'on va se laisser faire ?

— Toi, je vais te...

— Non ! La mission est claire, elles ne doivent pas être blessées.

— Donc, vous ne pouvez rien nous faire... Dans ce cas, je ne bouge pas. Et le premier qui s'approche aura le nez en sang.

— Pour vous enlever, nous vous avons plongées dans un profond sommeil. Si tu ne nous suis pas, nous recommencerons. À toi de voir.

C'était donc bien grâce à la magie qu'ils avaient réussi à les enlever aussi facilement, réfléchit Syara. Pour s'échapper, il leur fallait le plus d'informations possible et, elle avait du mal à l'admettre, mais le plus efficace dans ce cas là restait de leur obéir sans faire d'histoires. De plus, faire le trajet en étant inconsciente risquait de leur faire manquer une bonne occasion de s'enfuir.

— Ely, fais ce qu'ils disent.

— Quoi ? Mais tu es de quel côté ?

— Du tien évidemment. Je te promets qu'on cassera d'autres nez, mais ça n'est pas le bon moment.

— Bon d'accord, souffla la demi-dragonne.

Ce petit conflit réglé, Syara et Elyazra suivirent leur ravisseur sans opposer de résistance. Elles n'avaient toujours pas posé un pied sur la terre ferme qu'une pensée amusante s'immisça dans l'esprit de Syara. Le soldat qui avait le nez en sang se serait plaint d'une toute autre blessure si des chaînes n'avaient pas retenu le pied de son amie.

En peu de temps, la pierre remplaça le bois sous les pieds de la beast. Elle venait de quitter le navire et était de retour sur la terre ferme. Si elle n'avait pas pu recueillir beaucoup d'informations jusque-là, les nombreux bruits aux alentours allaient sans doute l'aider un peu plus.

La première chose qu'elle remarqua et qu'ils n'étaient pas seuls. Elle avait l'impression de se trouver dans le port d'une ville tellement il y avait de voix et d'autres son de personnes. Elle marcha ainsi pendant quelques minutes et sentit que l'atmosphère générale avait changé. Elle n'était plus dans un port, mais dans les rues d'une ville.

— Avant que vous ne tentiez quoi que ce soit, je dois vous informer de quelque chose, intervint le chef. Toutes les personnes que vous entendez nous connaissent. Appeler à l'aide ne vous sera donc d'aucune utilité.

Ils avaient donc un certain statut officiel ou bien faisait partie d'une bande qui contrôlait cette ville, déduisit la violoniste. Encore un point qui se transformait en désavantage. Si la population était de leur côté, cela voulait dire qu'ils n'hésiteraient peut-être pas à les dénoncer si jamais ils les voyaient s'enfuir. Même si elle n'avait pour l'instant aucun plan d'évasion, il semblait déjà très mal engagé.

Après une bonne heure de marche, on les fit entrer dans un édifice un peu éloigné de la ville. L'intérieur devait être immense vu que chacun de leurs pas résonnait. Syara comme Elyazra sentaient qu'elles allaient enfin arriver devant la personne qui avait commandité leur enlèvement.

Leurs ravisseurs les firent s'asseoir sur des chaises confortables et leurs mains furent attachées aux accoudoirs. Enfin, ils finirent par retirer les sacs qu'elles avaient sur la tête et partirent avant qu'elles n'aient le temps de se retourner.

Après un léger temps pour s'adapter à la lumière, Syara découvrit, avec horreur, l'endroit dans lequel elle se trouvait. Une grande salle à manger pourvue d'une table immense qui pouvait accueillir une trentaine de personnes. Des murs de pierre sombre et, derrière le grand siège en bout de table, un escalier.

Sur celui-ci, une femme se tenait droite, avec un large sourire aux lèvres.

— Bonjour vous deux et bienvenue, annonça-t-elle.

— Bonjour... Mère, grinça Syara.

Le violon de cristal : les partitions perdues (suite)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant