Léa
Le monde était devenu fou.
Voilà la phrase que je me répétais sans cesse devant mon miroir. Le monde était devenu fou, mais après tout, peut-être l'avait-il toujours été ? Je ne savais pas. J'avais l'impression de ne l'avoir connu qu'en constante transition vers le pire. A chaque fois, je pensais qu'on ne pouvait pas tomber plus bas et à chaque fois, l'humanité me prouvait que le fond du fond était encore bien lointain.
Je me souvenais de l'époque d'Avant. D'Avant la Dernière Guerre, d'Avant la Cybérisation. Quand il était encore possible de se promener de manière insouciante dans des parcs, de sentir le vent frais nous caresser le visage. Déjà de ce temps là, les plus anciens riaient jaunes : des parcs ! Quel concept ridicule, s'écriaient-ils ! Enfermer la Nature et raser des forêts entières ! Ils pleuraient cette génération d'enfants qui allait grandir sans apprendre à se rouler dans la boue ou à grimper au sommet d'un pommier. Probablement que leurs aînées à eux aussi les prenaient de haut, ça devait être une sorte de cercle où les générations ne pouvaient s'empêcher de mépriser les suivantes. Oui, c'était sans doute naturel.
Toujours est-il qu'un jour, le changement fut radical. On dépassa le simple « décalage » entre générations. Lorsque les bombes rasèrent des villes entières dans des pays qu'on pensait puissant, lorsque des millions moururent de faim dans le reste du monde, les immeubles devinrent de plus en plus haut autour de moi. Comme si nous autre, rescapés chanceux de ces catastrophes cherchions réconfort dans ces tours grises. Et le vert disparu de l'horizon, mais pas seulement : toutes les autres couleurs de l'arc-en-ciel l'accompagnèrent. La dictature du gris commença.
Parfois, j'éclatais de rire en contemplant mon reflet. J'étais devenu une vieille conne avant l'heure. A regretter un passé que je n'avais que trop peu connu, à critiquer un présent auquel de toute évidence je n'appartenais pas. Je n'étais pourtant pas si âgé que ça : la quasi-totalité de ma génération s'était facilement adaptée à ces changements. Certaines personnes âgées essayaient de rester jeunes dans leur tête, moi, j'étais vieille dès mon enfance. C'était pourtant pas du tout parti pour prendre cette direction...
Mon frère avait une console avec laquelle il jouait beaucoup dans le salon. Ma mère était rarement là et c'était donc lui qui se chargeait nonchalamment de mon éducation. Il essayait de me le cacher, mais je crois qu'il me détestait pour la charge de travail que je représentai. Je le forçais à devenir un adulte alors que lui voulait profiter de son adolescence. Je ne lui en veux pas pour m'avoir parfois fait des reproches dur à entendre, ce n'était pas facile pour lui. Toujours était-il qu'il n'avait pas toute la bonne volonté du monde, mais un sacré bon paquet quand même. Mais... c'était pas suffisant. Éduquer une enfant, ça ne s'improvisait pas. Rapidement, la télévision allait devenir mon unique guide et mentor... comme pour la plupart de mes camarades de classe de l'époque.
C'est alors qu'elle a débarqué dans ma vie. Ou plutôt dans celle de Jean. Une drôle de fille, qui emménagea pendant une année entière chez nous. Ambre, de son prénom. Immédiatement, elle prit une place de grande sœur. Elle me lut des histoires tous les soirs et détourna peu à peu mon attention de l'écran qui trônait dans le salon. C'était vraiment une adolescente particulière. Je l'ai surprise à diverses reprises en train de pleurer alors qu'elle croyait être toute seule. Encore aujourd'hui, j'ignore quel lourd passé elle devait porter, mais ça ne devait pas être rose.
Je voulais devenir comme elle, comme toute petite sœur avec son aînée. Son livre préféré devint mon livre préféré : Coraline, de Neil Gaiman. Cette année improbable avec elle fut probablement la plus heureuse de mon enfance. Je compris aussi autre chose grâce à elle : le mensonge des histoires. « Et ils vécurent heureux pour toujours », c'est une sacré connerie. Rien ne dure jamais. Tout est en perpétuel changement. Je l'ai appris à la dure : au bout d'une année de bonheur, mon enfance tourna au cauchemar. Ambre et Jean disparurent dans la nuit. Ça leur arrivait parfois de découcher, ils avaient besoin d'intimité et il n'y avait pas beaucoup de place chez nous. Au bout d'une semaine, c'était devenu inquiétant. Maman (parce que oui, j'avais encore mes deux « parents », si on pouvait leur accorder ce titre) s'en fichait éperdument. Mon père... et bien je ne l'avais jamais connu, il m'était difficile de me tourner vers lui. Quant à ma mère...
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[Code Lyoko] Code Alpha 3.0 - Babel's Tower [arrêt définitif]
Fanfiction/!\ CETTE FICTION EST EN ARRÊT DEFINITIF /!\ 2068. 37 années se sont écoulées depuis la fin de Code Alpha 2.0. Le monde a bien changé. L'humanité a atteint sa limite. La Ville est le dernier bastion de la technologie. Alors que les adultes gardent...
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