S01 - EP 21 ► part I

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*Mise à jour : avril 2019*

ÉPISODE 21 - (partie 1/5)

— Je suis ton père ! avança Dean, scandalisé.

— P'pa, ne me demande pas de choisir entre ton frère et toi, tu sais très bien que je te choisirai. (Rudy marqua une pause.) Putain, tu me fais dire des mièvreries !

Dean avait du mal à nourrir sa colère, tant la discussion prenait une tournure ridicule.

— Si ça te dérange autant, je verrai Oncle Danny ailleurs. On te laissera ton espace personnel.

— Hors de question !

Rudy ravala un soupir exaspéré.

— Faut savoir.

— Pourquoi ce matin ? N'es-tu pas d'avis que c'est trop tôt ?

La mauvaise foi de son père atteignait des sommets ! songea Rudy.

— Je lui ai dit que j'étais en vacances d'Halloween cette semaine... et que tu avais pris trois jours de congé.

— Que leur as-tu dit d'autre ?

Le fils leva les yeux au plafond.

— Ma parole, on vit en pleine inquisition ici !

— Je veux dire, que t'ont-ils dit d'autre ? reformula le père.

— J'en étais sûr que ça te démangeait ! s'exclama Rudy, victorieux. Tu jouais la carte de l'indifférence, mais c'était juste une façade.

— Pour ta gouverne, j'ai le mérite d'avoir tenu trois jours, contra Dean sans gêne.

— Deux, rectifia Rudy, au taquet. Ils ne m'ont rien dit. (Son assertion se heurta au scepticisme paternel.) Je te promets qu'ils ne m'ont rien dit qui nécessite une mise en garde ou tes soupçons.

— Eh bien, quoi, justement ? Tu m'excuseras d'avoir du mal à te croire.

Rudy haussa les épaules.

— Tant pis pour toi.

— Fiston...

Ledit fiston se borna à enfiler ses chaussures de sport. Ils tenaient cette discussion dans le corridor, tout en se préparant pour une partie de tennis. Dean mit le sac des raquettes dans le coffre de sa voiture, tandis que Rudy refermait derrière lui. Une fois en route, le père reprit ses jérémiades :

— Et depuis quand joue-t-on au tennis à trois ? Il nous manque un joueur. D'ailleurs, depuis quand sait-il jouer au tennis, lui ? Je l'ai toujours battu à plate couture !

Rudy remua la tête, consterné. Si Dean ne voulait vraiment pas y aller, ils n'auraient pas cette discussion. Son père lui aurait opposé un refus catégorique, aussi tranchant qu'un couperet. Il se sentait le besoin de grommeler pour la forme.

L'idée du tennis était de Rudy. Il feignait de ne rien voir mais avait compris qu'une visite d'Oncle Danny à la maison serait trop demander à son père. Il se demandait encore ce qui avait conduit à cette situation pour le moins exceptionnelle. Cependant, il serait le dernier à s'en plaindre.

Une partie de tennis lui semblait un beau compromis. Rien de mieux qu'un duel avec des règles – détail sine qua non – pour mieux se comprendre. Rudy avait aussi hâte de retrouver Bill au club de sport. Dean ignorait ce rendez-vous.

— Oncle Danny m'a dit qu'il s'y était remis. Mamie a confirmé. Dans tous les cas, ton si superbe jeu l'aidera à s'améliorer.

Dean ne releva pas le sarcasme. Il appuya sur l'accélérateur comme s'il avait les flics aux trousses et dix kilos de cocaïne dans le coffre. Rudy le houspilla :

— Je tiens à discuter ce match, entier, p'pa !

Il y avait des façons plus saines d'exprimer sa frustration.

— Plus vite on y sera, plus vite on rentrera, grogna Dean.

Tu parles d'un adulte censé montrer le bon exemple ! pensa Rudy.

— Et plus vite j'achèterai ma voiture, tiens ! Je demanderai peut-être à Oncle Danny de m'avancer des sous. Je suis sûr qu'il acceptera, ajouta-t-il, vicieux.

Dean lui lança un regard peu amène qu'il soutint. Il tiendrait tête à son borné de père tant que ce dernier ne changerait pas d'attitude. Franchement, c'était qui l'enfant dans cette voiture ?! Dean retrouva sa raison et allégea sa conduite sportive. Un macho se fourvoyait en disant « femme au volant, danger au tournant ». Plutôt « Dean au volant, risque pour l'humanité ! » L'entendant soupirer, Rudy déclara avec la condescendance d'un adulte s'adressant à un gamin :

— Tu te faciliteras la vie si tu prends les choses telles qu'elles viennent. Jouer au tennis n'a rien de désagréable, tu adores ça en plus ! La seule chose éventuellement chiante, c'est qu'on se débarrasse d'un tabou qui pèse entre nous deux, et qui est encore plus lourd entre vous deux. Ce n'est pas évident, je te l'accorde. Mais si c'est pour moi que tu t'inquiètes, c'est inutile. Je sais à quoi m'en tenir.

— Pas avec eux, crois-moi, asséna Dean avec conviction.

— Je te crois, céda Rudy. Mais fais-moi un peu confiance. C'est vexant à la longue !

Dean dévisagea son fils, surpris. Rudy était la seule personne en qui il avait le plus confiance. Qu'est-ce qui l'amenait à croire le contraire ?

— Mais tu as ma confiance, fils.

Sa voix douce n'apaisa pas son rejeton.

— Ouais, si tu le dis...

Dean se pinça les lèvres. Il ne sortirait rien de bon de cette conversation. Mieux valait changer de sujet.

— Au fait, j'ai fini la jaquette de RENOVATIO.

Ce fut comme appuyer sur un interrupteur. Rudy s'illumina.

— Ah ouais, quand ?

Dean sourit.

— Hier soir.

— Pourquoi tu me l'as pas montrée ?!

— Pour te mettre à la même enseigne que tout le monde. Les Beat'ONE eux-mêmes ne l'ont pas encore vue.

Rudy ressentit un sentiment d'injustice.

— Tu me punis parce que j'ai pris ce rendez-vous avec Oncle Danny !

— Si on pouvait éviter de tout ramener à cet abruti, cela me ferait des vacances ! s'irrita Dean. (Au temps pour le changement de sujet, tiens !) Si tu le prends ainsi, tu n'en sauras pas plus.

— Allez, s'il te plaît... Pardon ? supplia Rudy. (Le père ne desserra pas les dents.) Je ferai tout ce que tu diras cette semaine. Même que si t'annules le match de tennis maintenant, j'appelle illico Bill pour lui dire que c'est mort !

Dean éclata de rire. En voilà un retournement de veste à la vitesse de l'éclair ! Il ne savait pas son fils tourne-casaque. Dorénavant, il se servirait sans scrupule du fanatisme de Rudy pour marchander. Sa mémoire ruiner ses projets.

« Pourquoi perdre mon temps à répondre à cette question, quand notre collaboration touche bientôt à sa fin ? » Ouais, il avait dit ça. Arf ! Dean avait déjà appelé Jay pour lui demander de bloquer une heure dans l'après-midi. Son contrat avec les Beat'ONE s'achèverait après cette entrevue. Il en ressentit un fort pincement au cœur et lutta pour l'ignorer. Ses propres contradictions le lassaient.

— J'ignorais que Bill était de la partie.

— Plus on est de fous, plus on rit, p'pa.

Dean se blâma d'avoir occulté que le gamin assis à ses côtés avait du sang Leblanc. La manipulation était génétique dans cette famille. Il aurait été informé plus tôt qu'il jouerait avec son frère, et Rudy avec son ami, il ne serait pas au volant de sa voiture mais dans son sofa.

*o*o*

TBC ►EPISODE 21 - part 2

HOT CHILI - saison 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant