20 ~ Le concept de dignité

34 1 0
                                    

Leur dernier rêve

Édition Finale Souvenirs de Plume(s)

Fanfiction Escaflowne écrite par Andromeda Hibiscus Mavros

Instagram @ahmavros

Rating / Classement [+18]

Livre 2

Numb
(« Paralysé », Chanson de Linkin Park, 2003)

Chapitre 20

Le concept de dignité

Publié pour la première fois le 14 février 2012

Crédits : L'univers de The Vision Of Escaflowne est la propriété de Shoji Kawamori et du studio Sunrise, je ne fais que l'emprunter pour cette histoire.
Exception faite pour quelques personnages et lieux que j'ai créés pour l'occasion.

O~O~O~O~O~O

Quand Yiris émergea de son sommeil, la première chose qu'elle remarqua était qu'elle avait quelque chose dans la main. La jeune femme ouvrit les yeux et constata avec une certaine émotion qu'elle tenait son bâton.
Revoir ce vieux compagnon lui fit très plaisir.

Allongée sur le côté, regardant vers le mur, sentant une petite brise venue de la fenêtre sur ses épaules, elle se demandait comment son précieux bien avait atterri ici.
Force était de constater que seul Folken se serait aventuré à le déposer ainsi.

La générale s'assit dans le lit. Elle, qui était d'habitude dépourvue de pudeur, prit soin de garder sa poitrine couverte du drap.
Jetant un coup d'œil alentour, elle conclut qu'elle était seule dans l'appartement. Se levant d'un bond, elle courut d'un pas presque furtif vers la salle d'eau où pour aller se rafraichir.

O~O

L'esprit absent, Yiris resta, un long moment, étendue dans la barrique, fixant le plafond, tandis que ses cheveux flottaient autour d'elle, tels des algues claires.
Quelques brèves images la nuit précédente, accompagnées d'un sentiment de trainées brulantes sur la peau, lui traversèrent l'esprit.

Quand elle sortit de l'eau, elle se regarda dans le miroir, se trouvant un air stupide. Non, elle n'avait pas changé ! Elle allait se rendre à la caserne, comme chaque jour !

Alors, un détail embarrassant lui vint à l'esprit : une partie de ses affaires était dans son baluchon, perdu au milieu de la forêt, une autre était à Irini...
Quant à sa robe de la veille, couverte de sang séché, Mila l'avait certainement expédiée à la blanchisserie. Bref, elle n'avait rien à se mettre, hormis son déshabillé, et il était impossible de sortir avec ça sur le dos.

Soudain, son regard se porta sur un petit panier laissé à l'entrée de la salle d'eau. Elle n'y avait pas prêté attention avant, mais, là, il suscita son intérêt. Elle le ramassa et constata qu'il contenait des vêtements de femme. Dans les tons de bleu, très simples, la robe et sa veste étaient très amples, il y avait une paire de ballerines et des sous-vêtements assortis.
Tout comme le bâton, cela n'était pas arrivé tout seul. Yiris commença à réfléchir aux agissements de son mari. Cependant, persistant dans sa volonté d'occulter la nuit passée, elle chassa directement toute idée et s'habilla.

En serrant bien la ceinture, elle finit par ajuster l'ensemble pour qu'il lui atteigne le milieu des mollets. Bien trop grande pour elle, la jeune femme flottait littéralement dans la tenue. Cela dit, c'était toujours mieux que d'être nue !
Par chance, les chaussures étaient juste un peu larges, marcher ne serait donc pas trop difficile !

Somme toute satisfaite, car pas trop ridicule, la générale se regarda dans la glace en nattant les deux mèches de devant de ses cheveux encore humides avant de se décider à quitter la pièce.
Perdue dans ses pensées, elle sursauta quand elle se trouva face à Folken à l'entrée de la chambre.

L'air bête, elle se figea son bâton à la main, incapable de bouger d'un pas ou de dire le moindre mot. Seul signe de vie, ses joues devinrent complètement rouges.
Le Prince s'en amusa et, souriant, s'approcha d'elle :

— Je vois que tu es enfin réveillée et que tu as trouvé ce que je t'avais préparé !

Un hochement de tête mécanique lui répondit affirmativement. Il dut se retenir de ne pas éclater de rire face à l'attitude de sa femme :

— Ce matin, je me suis levé tôt et j'ai réalisé que tu n'avais aucun effet personnel avec toi. Alors, je suis allé voir pour te trouver quelque chose. Comme j'ai dû parer au plus pressé, je suis désolé, ce n'est pas la bonne taille...

Toujours hagarde, Yiris étendit les bras, on aurait dit une chauve-souris :

— C'est mieux trop grand que trop petit ! déclara-t-elle, avec un air philosophe.

Cette fois, Folken ne put s'empêcher de rire, et Yiris enchaina de bon cœur. Dans une situation embarrassante, l'humour pouvait être une bonne échappatoire.
La générale finit par reprendre ses esprits. Maintenant que son cerveau était à peu près en état de fonctionnement, elle n'avait qu'une envie : aller dehors !

Ne voulant pas l'embêter davantage, Folken fit un pas de côté pour libérer l'accès vers la sortie, Yiris se précipita.
Alors, qu'elle allait quitter l'appartement, un peu calmée, elle arrêta son geste sur la poignée de la porte, soupira et repartit quelques pas en arrière, vers son mari :

— Merci pour tout... En particulier pour le bâton ! dit-elle d'une petite voix timide, en s'inclinant.

En l'entendant, le Prince soupira, amusé. Il avait simplement voulu lui faire plaisir et la confusion qui en découlait était particulièrement drôle :

— J'y ai pensé en quittant Irini. Cependant, j'ai oublié de te le rendre avant. Ce matin, en te regardant, je me suis dit que tu serais contente de l'avoir à tes côtés à ton réveil !

Simplement, Yiris sourit, serrant fort son bon vieux bout de bois dans ses mains. Elle opina de la tête et quitta la pièce.

Lui resta un moment simplement à réfléchir, il ne s'attendait pas à un miracle. Elle garderait ses distances encore longtemps.
Même si cela serait sans doute frustrant, Folken saurait être patient.

Une bonne partie de la nuit, il avait juste regardé Yiris dormir, à quelques centimètres de lui. Plusieurs fois, il avait tendu la main vers son visage, voulu lui caresser la joue, mais s'en était abstenu.
Il redoutait une réaction violente, alors que ce qu'il souhaitait, c'était qu'elle vienne à lui. Si elle s'était offerte une fois avec sincérité, cela signifiait qu'il pouvait espérer.

O~O

Le monde avait-il changé en l'espace d'une nuit ? Yiris arrivait le croire. Les gens la regardaient comme une bête curieuse en lui faisant des courbettes.
Essayant de ne pas y prêter attention, elle traversa à pas rapides les couloirs vers les quartiers militaires.

Et soudain, devant elle, dressées telle une barrière, elle se trouva face à Mila, chargée d'une grosse corbeille, et entourée des aînées de ses employées, Maga, la doyenne, Sasha, la petite préférée d'Yrkas, et Hortense, la couturière du groupe. Toutes arboraient un sourire malicieux.
Dans un premier temps, la générale afficha une certaine perplexité en voyant ce comité d'accueil particulier. Ce n'était pas commun de voir des filles de joies, qui plus est dans leurs tenues légères, se balader en plein jour au palais.

Sentant le piège se refermer, la jeune mariée fit mine de les ignorer, mais elles demandèrent en chœur sur un ton facétieux :

— Alors ?

En entendant cette question particulièrement osée, Yiris devint écarlate. Cependant, elle secoua immédiatement la tête pour retrouver ses esprits et son sérieux.
Prenant une inspiration, elle avança fièrement en fendant le rang :

— Fichez-moi la paix ! Ce ne sont pas vos affaires !

Déçue par son silence, les filles persistèrent à la taquiner :

— Allez quoi, chef, on ne vous cache rien, nous ! dit Sasha, boudeuse.

Au bout de quelques pas, sentant bien qu'elle n'allait pas s'en sortir comme ça, Yiris se retourna :

— Libre à vous de raconter vos vies ! Moi, je ne vous demande rien !
— En tout cas, remarqua Maga, la grande brune, à voir votre tête, je ne me fais pas trop de soucis ! C'était bien, hein ?

La générale garda difficilement son aplomb, tandis que toute la joyeuse bande éclatait de rire :

— Allez bosser, bande de feignasses, je n'ai pas encore fait rédiger l'acte de cession à Mila, donc...
— Tu n'es pas gentille, Yiris ! ironisa la tenancière. J'ai un joli trousseau pour toi ! Tu pourras remercier Hortense ! Nous allions justement le porter à ta chambre ! Cela dit, je vois qu'une certaine personne a paré au plus urgent...

La dernière phrase de Mila avait une intonation mutine. Avec quelques gloussements et clins d'œil, les filles, gentiment houspillées par la maquerelle, s'en allèrent, laissant leur désormais future ancienne patronne tranquille.
Celle-ci lâcha un soupir de soulagement.

Poursuivant sa route, elle parvint aux quartiers de sa garnison. Au milieu des soldats qui s'entrainaient, elle se sentit directement plus à l'aise, même si elle eut encore droit à son lot de têtes baissées.
Heureusement, pour certains, les choses étaient toujours pareilles :

— Hé, bonjour chef ! Vous tombez bien, je crois que le gars des inventaires d'armes a encore merdé, il manque plein de trucs !

Yrkas avait parlé sur son ton désinvolte habituel. En passant, Yiris lui donna un léger petit coup de bâton sur le crâne, c'était une de leurs vieilles habitudes.

— Et, au fait, vous êtes très élégante ! ajouta-t-il, ironique.

Cette fois, la générale s'arrêta net et réalisa l'incongruité de sa tenue. Sentant le coup de bâton venir, Yrkas s'éloigna à petits pas en souriant.
Après avoir repris son souffle, Yiris se contenta de lui lancer un regard mauvais qui fit rire les soldats ayant observé la scène.

Faisant comme si de rien n'était, la jeune femme commença à observer le fameux inventaire litigieux :

— Haymlar n'avait pas vérifié les quantités ?
— Ben, ces deux derniers jours, il n'a pas eu le temps ! Nous sommes en train de prévenir les familles de ceux qui ont péri dans l'attaque convoi et de voir comment les aider. Mine de rien, pour notre seule armée, ça représente soixante-dix-neuf hommes... Même si les gars de Metel ont fini par retrouver d'autres survivants, sur les deux cent quarante hommes envoyés, seul un peu plus de la moitié a survécu. Déjà, aucun des quarante éclaireurs qui venaient de chez nous n'a été épargné... Ils ont même été retrouvés pendus par les pieds, comme les gars du précédent convoi qui été avait attaqué près de la frontière...
— En effet, un massacre... soupira Yiris. Cependant, je ne désespère pas de choper un jour ces bâtards qui nous ont piégé, et de les faire payer...

Le silence se fit, la jeune femme visualisait l'attaque, la troupe qui s'était lancée à sa poursuite. Leur façon de faire n'avait pas d'équivalent connu. Ils étaient bien mieux entraînés et organisés que les meilleures troupes d'élite connues.

— Enfin, reprit-elle, je vais aller donner un coup de main à Haymlar pour organiser le soutien de veuves et orphelins. On recomptera plus tard, le matériel attend toujours...
— C'est que...
— Que ?
— Le second patron n'est pas là pour le moment...
— Ah ? Et où est-il passé ?
— Ben... dit Yrkas, en se frottant l'arrière de la tête pour dissimuler son malaise. Il est au Conseil...
— Au Conseil ? Je ne savais pas qu'il y en aurait un aujourd'hui ? Et, en quel honneur il me remplace ?

Cette fois, le soldat savait qu'il allait déclencher une colère monumentale qui ferait trembler les murs de la caserne :

— Sa Majesté n'a pas voulu que vous y soyez... Car il serait question de votre mariage...

En l'entendant, un doute s'empara de Yiris. Courant du plus vite qu'elle pouvait, elle retourna vers le bâtiment principal. Au pied de celui-ci, maintenant que tout le monde la savait fausse-personne, elle n'eut aucun scrupule à se projeter directement sur un balcon du troisième étage et, passant par une fenêtre du salon, entra dans les appartements de Folken.
Son arrivée surprenante arracha un cri de peur aux servantes qui s'affairaient à faire le ménage.

— Vous avez changé les draps ? leur demanda-t-elle.

Un hochement de tête positif collectif fut sa réponse.

— Le drap du dessous, il est où ?
— Quand nous sommes arrivées, il n'y était plus... expliqua une des domestiques, intimidée.

Tout était clair ! Yiris ouvrit la porte avec rage et traversa le couloir, haineuse. Elle savait ce qui allait se passer et voulait à tout prix l'empêcher.
Pour gagner du temps, elle sauta directement au rez-de-chaussée de la cage d'escalier, stupéfiant le personnel.

C'est au sol qu'elle réalisa la stupidité de ce qu'elle s'apprêtait à accomplir. Faire un scandale se retournerait à coup sûr contre elle, mais pas que, Folken aussi en pâtirait. Son autorité en tant qu'Altesse Royale disparaitrait tout aussi vite qu'elle avait été reconnue.
Encaisser l'humiliation était la meilleure façon de ne plus voir cette histoire revenir sur le devant de la scène, et, surtout, de ne pas trahir celui qui lui avait sauvé la vie.

Lançant un regard presque effrayant à ceux qui l'observaient, elle renonça à se rendre au Conseil pour aller se calmer dans les jardins.

O~O

Cela faisait longtemps qu'il n'y avait pas eu autant de monde pour un Conseil. Le Roi avait convié son oncle et son frère, en plus de trois généraux et d'Haymlar. À cela, s'ajoutait Le Grand Prêtre Horum, représentant du Clergé, caste très rarement invitée au Conseil depuis le règne de Goau.

L'ambiance était glaciale. Le premier à prendre la parole fut le religieux :

— Votre Majesté ! Je m'élève à nouveau contre votre décision d'hier ! Cette criminelle vous a manipulé, elle ne mérite pas de vivre et encore moins de faire partie de la Famille Royale !
— Il me semblait m'être déjà prononcé sur cette question... répondit Van, agacé.
— Certes, mais cette union de paille salit l'institution du mariage ! Laisser cet individu devenir Princesse alors que chacun sait qu'elle n'a presque plus rien d'une femme, c'est honteux !
— Et pourtant, je peux vous assurer que c'est bien une femme ! intervint Folken, avec son calme légendaire.
— Que voulez-vous dire ? interrogea l'ecclésiastique, dubitatif.
— Yiris est ma femme ! Et je l'ai honorée comme telle !

Un immense malaise envahit la pièce. Si Van demeurait stoïque, Meinmet était gêné, Hylden ne cachait pas son désagrément, les autres étaient plus que stupéfaits.

Ne leur laissant pas le temps de reprendre leurs esprits, Folken se leva et ramassa un panier à ses pieds.
Sous les regards incrédules de l'assistance, il étendit le drap où on distinguait nettement de petites traces de sang séché.

— Cela répond à vos doutes sur l'authenticité de ce mariage ? Ou souhaitez-vous plus de détails ? demanda le Prince, avec un certain cynisme.

Face à cette vision et prenant conscience de qu'elle impliquait, personne n'osa répondre. Et le silence se fit de nouveau.
Cette fois, ce fut Van qui prit la parole :

— Bien, la validité de cette union étant confirmée, j'en profite pour clarifier un dernier point ! Comme le prévoit la loi préservant la seule lignée principale de la Famille Royale de Fanelia, loi créée par Feu le Roi Yarald Hades de Fanel, mon arrière-grand-père, en tant que Souverain régnant, j'autorise mon frère, Folken Lacour de Fanel a créé sa propre branche !

Cette fois, c'en était trop ! Mayek se leva, furieux :

— Allons, Votre Majesté, vous ne pouvez pas ! Que le Prince Folken soit digne d'avoir un héritier du Sang Sacré du Dragon, soit, mais Yiris ne mérite pas d'être associée à un tel privilège ! Elle n'est même pas humaine...

C'est en prononçant sa dernière phrase que le général comprit son erreur. Il baissa la tête, sentant la fureur royale s'abattre sur lui :

— Mayek, c'est la dernière fois que tu me contredis, suis-je clair ? Je suis le Souverain de ce pays, je porte le sang d'une lignée vieille de dix-milles ans, ce qui fait de moi un élu des Dieux, seul apte à présider à la destinée de sa patrie ! Moi-même, je ne suis pas tout à fait humain, je te rappelle ! Est-ce que cela te pose un problème ?

Resté debout pendant le sermon, l'homme grisonnant se prosterna immédiatement, la tête touchant le sol, conscient de la gravité de son offense :

— Je supplie Votre Majesté de bien vouloir me pardonner, mes mots ont dépassé ma pensée !

Van attendit quelques instants sans mot dire, prolongeant volontairement l'humiliation de son général, histoire qu'il retienne la leçon. Finalement, le Roi poursuivit, tout en faisant signe à Mayek qu'il avait le droit de se relever et de reprendre sa place à la table :

— Étant donné que je me fais reprocher depuis des années de ne pas avoir d'héritier, vous devriez tous bien accueillir ma décision !

Face à cette ironie, Lyuren eut un air un peu amusé, mais Mayek et Horum retenaient leur colère. Toutefois, vu l'âge de Yiris, le privilège était, avant tout, symbolique, et c'était sans parler de l'hybridation différente de chacun des conjoints. Cependant, il était évident qu'il était désormais totalement exclu de manœuvrer directement contre la nouvelle Princesse.
Écoutant ce qui se passait depuis le couloir, le Grand Chambellan Ozlek en était lui aussi conscient.

Après un nouveau flottement, le Souverain reprit :

— Bien, cette affaire étant close, nous allons pouvoir parler d'une dépêche qui date d'il y a deux jours ! Il est largement temps de nous y attarder !
— Laquelle ? questionna Luyren, qui avait à peu près remis les pieds sur terre après les récents échanges.
— Nous avons reçu un message d'Asturia. La conférence prévue sur le problème des voleurs d'energist aura finalement lieu dans cinq jours. Aussi, je souhaite me rendre au plus vite à Palas, je sais que les représentants d'Egzardia sont déjà sur place, et ceux de Daedalus ne sauraient tarder.
— Votre Majesté, ce déplacement nécessitera tout de même une préparation ! Cependant, tout pourrait fini pour après-demain ! Puis-je savoir qui vous comptez emmener pour donner un avis militaire ? demanda Mayek, d'un ton bien plus posé que d'ordinaire.
— Afin de ne pas laisser le pays en position de vulnérabilité, sachant que les voleurs étaient récemment sur nos terres, je n'emmènerai qu'un seul général, Yiris !
— Comment ? S'indigna le militaire grisonnant. Mais...
— C'est l'occasion de faire d'une pierre deux coups ! coupa Van. Yiris a vu ce groupe agir, et la présenter publiquement permettra de freiner les rumeurs, qui ne manquent déjà pas à son sujet !
— En soit, ce n'est pas une mauvaise idée ! remarqua le doyen des généraux. Néanmoins, Yiris n'est pas vraiment la bienvenue à Asturia depuis... Son petit coup d'éclat d'il y a trois ans...
— J'en suis conscient ! Sachez qu'elle aura ordre de rester vêtue en femme et de se comporter comme telle, elle se contentera d'écouter !

Le compromis semblait bon, sauf pour Mayek qui ne digérait pas ce nouvel affront. Le Grand Prêtre Horum n'était pas non plus satisfait. Néanmoins, ni l'un, ni l'autre ne pouvait rien contre la volonté du Roi.

En quittant la pièce, Van se tourna vers sa famille avec un sourire :

— Folken, Meinmet, il est évident que vous venez aussi !

Si le plus jeune des Princes garda son flegme habituel, tout en se réjouissant de voyager, Meinmet sauta de joie, se bloquant le dos au passage.

Croisant Konstantinos dans le couloir, le Roi annonça quelque chose qui déplut profondément au garde du corps :

— Pour ce voyage, je me passerai de tes services !

Après s'être poliment incliné, le jeune homme attendit le départ du Souverain pour pester intérieurement sur ce qu'il considérait comme une disgrâce... Au profit de sa sœur.

Soudain, son regard croisa celui de Folken. Le face-à-face entre les deux hommes fut glacial.
À deux doigts de sauter à la gorge de celui qui avait sauvé sa sœur, Konstantinos préféra rompre l'affrontement et quitter les lieux.

O~O

Mieux que la veille, Hitomi s'était enfin levée. Assise autour d'une table ronde avec Merle, elle essayait de comprendre comment jouer à un jeu de cartes de Fanelia.

Ayant discrètement ouvert la porte, le Roi s'amusa à regarder la scène sans rien dire. Cependant, comme si elle avait senti sa présence, Hitomi s'interrompit et se tourna vers lui, l'air joyeux :

— Van, tu te joins à nous ?
— Je ne suis pas très doué pour les jeux ! Je pense que Merle est bien meilleure camarade pour cela !
— Bon, j'ai des choses à faire, je vous laisse ! dit la jeune femme-chat en se levant, comprenant qu'il était temps pour elle de s'éclipser et de laisser les amoureux tranquilles.

En sortant, elle adressa un sourire complice Van et fit un signe de la main à Hitomi.

Quand la porte se referma, le jeune homme se rapprocha de son aimée, lui caressa la joue, puis se pencha pour l'embrasser :

— Tu te sens mieux ?
— Oui, Van ! Tu n'as plus à t'inquiéter ! Et comment se passent les choses pour toi ?
— Je pense que la réunion du Conseil d'aujourd'hui devrait apaiser la situation sur le long terme. En plus de confirmer le mariage, j'ai octroyé à Folken et Yiris un privilège symbolique, celui de créer leur propre branche de la Famille Royale.
— Et qu'est-ce que cela implique ? interrogea la jeune blonde, curieuse
— Comme tu le sais, porter le Sang Sacré du Dragon permet de contrôler Escaflowne, même si avec les nouvelles générations, les branches éloignées perdent ce pouvoir, à une époque, il y avait beaucoup trop d'élus potentiel. Le Roi Yarald, le grand-père de mon père et Meinmet, a voulu résoudre le problème du coup d'état latent. Dans un premier temps, il a fait massacrer tous ses frères et sœurs et leurs enfants, puis, pour les autres parents répertoriés, il a fait tester l'energist. S'il brillait au contact de leur sang, ils étaient exécutés, quelque soit leur âge. Des nourrissons, des femmes et des vieillards ont été mis à mort. Après cette purge, le Roi Yarald a instauré une loi selon laquelle les descendants de la Famille Royale devait avoir l'autorisation du Souverain pour avoir une descendance sous peine d'être aussi exécutés, ainsi que leurs enfants.
— Mais, c'est affreux... lâcha Hitomi, horrifiée.
— L'histoire de Fanelia s'est toujours écrite dans la violence et le sang ! Meinmet pourrait te raconter des histoires assez atroces... Son propre père, héritier du Roi Yarald, a été encore plus cruel... La postérité le nomme Sahwlun le Sanglant... Il a fait couler tellement de sang lors de sa prise de pouvoir que les murailles de la ville haute étaient teintées de rouge...
— Je ne me rendais pas compte de tout cela... Je commence à peine à lire correctement alors je ne me suis pas vraiment renseigné sur l'histoire du pays...
— Mon père a été considéré comme quelqu'un de très modéré, et Folken, qui voulait casser la tradition de la violence, était très mal vu... Y compris par Balgus... Personnellement, j'ai eu beaucoup de mal à me faire respecter en tant que Souverain pacifique, même après le traumatisme de l'incendie de la capitale et de la Grande Guerre de Gaea...

Après toutes ces révélations, Hitomi se sentait mal à l'aise. Van comprit que c'était le moment de changer de sujet :

— J'ai une bonne nouvelle à t'annoncer : après-demain, nous partons en voyage !
— Ah ? Et où ça ? interrogea la jeune femme, à nouveau souriante
— Nous allons en Asturia !

Asturia... Hitomi se souvenait de Palas, la capitale, une cité lacustre, du palais... Puis elle pensa aux habitants. Allen, Millerna, Dryden...
Qu'étaient-ils devenus ?

— Et pour quelle occasion ?
— Une conférence sur les attaques de convois d'energist doit bientôt s'y tenir. Tu m'accompagneras, et il y aura aussi Merle, mon oncle, ainsi que Folken et Yiris. Ce sont deux des rares témoins de l'attaque encore vivants, leur avis sera précieux !
— C'est une bonne idée ! En attendant, j'espère que tu ne me cacheras plus des choses importantes à l'avenir. J'avoue t'en vouloir un peu pour la dissimulation de la vraie nature de Yiris !
— Je suis désolé, mais j'avais fait une promesse ! Bien évidemment, je te fais confiance ! Néanmoins, j'avais donné ma parole, question de principe. À l'avenir, je me garderais de jurer de ne garder une information que pour moi seul. Promis !
— Soit, je te crois ! répondit la jeune blonde, apaisée. Dis-moi concernant Asturia, que sont devenus nos amis ?
— Et bien, Millerna est désormais Reine d'Asturia. Son père est décédé quelques mois après ton départ, usé par l'angoisse de la guerre. Trois ans plus tard, c'est sa sœur Eries qui a quitté ce monde, elle était en fait malade depuis son enfance, mais l'avait toujours caché. C'était la raison pour laquelle elle avait refusé la succession au profit de sa cadette. Millerna a beaucoup changé et gère son pays en Souveraine avisée !
— Et Allen ?
— Allen est en quelque sorte... Comment dire... Le conseiller principal de Millerna, mais pas que...
— Quoi ?
— Autant te le dire tout de suite... Depuis qu'il est parti, Dryden ne donne plus de nouvelles, on le sait vivant car son vaisseau commerçant est vu un peu partout, mais ne s'attarde jamais bien longtemps amarré au même port. Cependant, il a tout fait pour fuir son épouse, ne lui écrivant jamais même un petit message. Délaissée, Millerna est tombée dans les bras d'Allen. Ils ont d'ailleurs deux fils adultérins, qui ont cinq et trois ans.

Dans un premier temps, cette révélation stupéfia Hitomi. Puis, elle se rappela sa liaison avec le chevalier, et surtout de la prédiction des cartes faite à Millerna.
Non, somme toute, ce n'était pas si étonnant...

— Sache que, comme tu ne l'apprécies pas, je n'ai pas fait venir Konstantinos. Je ne pense pas de toute façon que nous risquions quoique ce soit à Palas... Enfin, nous partirons demain matin. Grâce au vaisseau volant, nous devrions arriver le lendemain. En attendant, je vais te laisser te reposer !

Avec un petit air malicieux, Hitomi s'accrocha au bras du Roi :

— Non, j'ai assez dormi ! Maintenant, je veux être avec toi !

Souriant, Van l'invita à le suivre vers ses appartements, afin qu'ils puissent profiter l'un de l'autre tranquillement...

O~O

Après que Meinmet l'eut harcelé vainement des heures durant, pour tenter de comprendre par quel miracle il était revenu d'entre les morts, Folken passa la suite de la journée à errer.
Il s'amusa à aller faire un petit tour dans la ville, se rendant au passage chez Nako pour le remercier de son aide. L'ermite érudit était encore en train de remettre ses précieux parchemins en ordre, et le Prince l'assista dans sa tâche.

Puis, il continua sa marche, cette promenade sans but dans la ville lui rappela des souvenirs de son enfance. Il avait du mal à réaliser qu'il était là, vivant, à profiter de la douceur de sa terre natale.
À cause de son apparence si caractéristique, comme autrefois, les gens le reconnaissaient facilement. Ils adoptaient une attitude discrète et respectueuse en s'inclinant, mais Folken entendait bien les chuchotements circonspects qui le suivaient. Il préféra ne pas s'y intéresser.
Dans son cas, la curiosité était plus que légitime. Peut-être, avec le temps, parviendrait-il à se fondre dans la masse...

À la tombée de la nuit, ses pas le menèrent devant ce qui avait été sa tombe. Il y resta un moment silencieux, puis se décida à regagner ses appartements. C'est alors qu'il perçut un craquement suspect dans un arbre.
Levant la tête, il distingua une silhouette à travers les branches. D'abord méfiant, il finit pourtant par identifier l'étrange oiseau perché :

— Tu ne vas quand même pas dormir là ?

Sautant à terre d'un bond, Yiris se retrouva face à lui :

— Allez savoir pourquoi, je n'ai pas trop envie de montrer mon nez au palais... dit-elle, avec un certain cynisme.
— Je suis désolé, je comprends que cela soit difficile pour toi. Mais, maintenant, soit certaine que les religieux et Mayek n'iront plus te chercher de problème !
— « Always Look on the Bright Side of Life » ! soupira la jeune femme.

Pour le coup, Folken écarquilla les yeux, il ne comprenait pas. Yiris secoua la tête, dépitée par ce qu'elle considéra comme un manque de culture pour quelqu'un qui avait vécu sur Terre :

— 1979, Monty Python, « La vie de Brian », mon père adorait ce film... C'est la chanson que chantent les crucifiés à la fin. Je suis certaine que Meinmet doit connaître ! C'est exactement le style de cinéma qu'il a dû regarder. Bref, on arrive toujours à voir le bon côté des choses...
— Si tu le penses en plus de le dire, cela fait plaisir de l'entendre !

Puis, Folken s'approcha tout près de Yiris, qui sentit ses jambes se défiler et son cœur s'accélérer.
Avant, il lui était totalement indifférent, tout juste l'énervait-il à être vraiment beaucoup plus grand qu'elle et toujours calme, mais c'était avant...

— Penche la tête, s'il te plaît ! lui demanda-t-il.

Intriguée, elle s'exécuta. Elle sentit qu'il passait quelque chose dans ses cheveux. Au bout de quelques instants, qui semblèrent interminable, il lui releva son visage en la prenant par le menton :

— Avec cela, tu as l'air d'une vraie Princesse !

Se redressant, la générale mit la main sur son crâne et sentit une chaîne. Sans réfléchir, elle courut vers la rivière toute proche pour observer l'objet dans le miroir de l'eau.
Bien qu'il fasse sombre, elle remarqua qu'une jolie tresse d'or parcourait ses mèches blondes.
Au prime abord, elle sourit spontanément, elle n'était pas habituée à recevoir des cadeaux. Cependant quand Folken arriva derrière elle, elle sursauta et faillit tomber dans l'eau, avant de répondre timidement :

— Merci...
— De rien, ce n'est pas grand-chose ! Même si les circonstances sont particulières, il est d'usage ici d'offrir un présent à son épouse au lendemain du mariage. Je me suis rendu chez un orfèvre qui a travaillé aussi vite que bien ! J'espère que cela te plaît !

Yiris resta interdite. Décidément, elle se demandait ce que son mari avait réellement dans la tête la concernant.
Personne n'avait jamais été aussi attentionné à son égard.

— Sinon, reprit-il, je ne crois pas que tu sois au courant, mais nous partons pour Asturia sous peu !

La jeune femme s'étonna et accabla Folken de questions sur les raisons du voyage tandis qu'ils regagnaient le palais. La discussion se poursuivit encore le temps du repas.
Entre deux bouchées, voire carrément en mâchant, Yiris pesta sur les dirigeants qui allaient être présents à Palas.

Après avoir fini l'assiette de son dessert, elle jeta un coup d'œil inquiet vers l'emplacement de son lit de camp, désormais vide.
Elle soupira. Réaliste, elle savait qu'elle devait se faire à l'idée de partager la couche de son époux.

La générale se leva et fit quelques pas vers la chambre. Se tournant brièvement vers Folken, qui n'avait pas encore fini de manger, elle murmura :

— Je vais me... Rafraîchir et me changer...

Une fois dans la salle d'eau, elle éclaboussa son visage d'eau fraîche, puis, prit le temps de respirer profondément, face à la glace, soutenant le regard de son reflet qui semblait comme vouloir la narguer.
Avec la fatigue, elle hallucinait probablement.

Puis, elle commença à fouiller dans la corbeille offerte par Mila, s'attendant au pire au vu des goûts vestimentaires de son amie. Heureusement, la tenancière avait fait sobre. Elle trouva des vestes dans les tons noir et blanc, avec parfois de petits détails rouges, plusieurs robes assorties de rechange, un peu trop décolletée à son goût, ainsi que des sous-vêtements, heureusement sans trop de fioritures.
Pour la nuit, Yiris avait le choix entre plusieurs ensembles, comprenant déshabillé et robe de nuit, pastels, un vert, un bleu et un mauve qu'elle choisit... Elle se prit à penser que cela tenait du miracle que la grande brune n'ait pas mis un rose dans le lot...

Vêtue comme une dame, dans ses vêtements brodés de dentelles, elle se regarda une dernière fois dans la glace avant de se rendre dans la chambre.
Sur le seuil, elle croisa Folken qui allait se changer à son tour. Il se contenta de lui sourire.

Plusieurs minutes, elle resta assise sur le bord du lit. Après tout, elle devait quand même la vie au Prince, alors ce n'était pas cher payé s'il lui demandait encore de... Se laisser faire. Elle avait même un peu honte de s'avouer à elle-même que cela ne lui déplairait pas non plus...

Enfin, le jeune homme réapparut. Elle tourna la tête vers lui, il la regarda, avant de s'approcher. Angoissée malgré elle, la générale retint son souffle tout en se disant que sa réaction était toujours aussi stupide. Elle savait qu'elle n'avait rien à redouter !

Délicatement, il lui caressa la joue et dit :

— Je ne t'oblige à rien... Alors, repose-toi, je crois que c'est ce dont tu as le plus besoin !

Yiris prit, une nouvelle fois, un air étonné, et resta muette de stupéfaction. Folken était vraiment la personne la plus étrange qui lui avait été donné de rencontrer...

O~O~O~O~O~O

Notes de l'auteur : J'ai trouvé intéressant de créer un passé violent à Fanelia pour respecter l'idée selon laquelle, dans la série, le Roi encore et toujours se battre.
Maintenant, il est temps de mener l'intrigue sur d'autres terres et de revoir d'autres protagonistes, en l'occurrence, retourner au centre de l'action de la série, Asturia. Et qui dit lieu différent, dit visages différents ! II a donc fallu travailler sur tout le devenir d'un groupe de personnages-clefs de l'histoire originale... Tout sera détaillée dans le prochain chapitre !


O~O~O~O~O~O

Merci d'avoir lu ce chapitre ! Si vous l'avez apprécié, n'hésitez pas à commenter et partager !

Instagram @ahmavros

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou télécharger une autre image.
Escaflowne, Leur dernier rêveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant