Cinquante-deux

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Ça faisait une semaine qu'Harry était parti, mon père avait déposé son congé auprès de son patron et avait préparé sa valise. Il voulait partir en Thaïlande. Juste pour changer d'air un moment, après il allait revenir, mais pour habiter ailleurs. Je lui avais demandé pourquoi il ne voulait pas revenir habiter à Bournemouth avec moi, et il avait répondu que j'avais besoin de changer d'air moi aussi, d'être plus libre et plus indépendante. Je ne pense pas qu'il puisse avoir un quelconque droit sur le moment où je déciderai de me séparer de lui, mais il l'a fait et le pire c'est qu'il croit être juste.

Aujourd'hui, ma mère et Trey viennent m'aider pour le déménagement - enfin surtout Trey - mon père a autre chose à faire et m'a envoyé des hommes pour le faire à sa place, mais sincèrement, je veux le faire seule. Je vais habiter seule alors, je vais le faire seule. Je préférerais ne plus jamais avoir besoin des services de mon père, mais je suis étudiante et j'ai toujours besoin d'un soutien financier. Ce qui m'exaspère au plus haut point. J'aurais voulu lui prouver que - même si il m'abandonnait - j'étais quelqu'un d'autonome et fort, mais je ne le peux pas tant que je n'ai pas de travail. J'ai encore deux ans à attendre, puis - master d'informatique en poche - j'irai me faire engager quelque part et vivrai enfin de mes propres sous, comme il avait l'air de le vouloir si fort.

- T'en es où au fait? demandai-je.

- Au sixième mois. répondit fièrement ma mère, assise sur le fauteuil noir qui restait encore dans la pièce.

- Waouh! Déjà! m'exclamai-je.

J'étais entrain d'emballer de papier-à-bulles tous les meubles que mon père et Lily avaient décidé de revendre et qui me plaisaient assez pour les transférer dans mon nouveau chez-moi.

Les nouveaux acheteurs étaient un couple de riches qui voulaient une maison secondaire, et devaient passer aujourd'hui pour visiter une seconde fois. Le mari avait d'abord visité seul, et voulait faire une surprise à sa femme - bien plus jeune - en passant la deuxième fois avec elle, pour la lui offrir. Je crois que dans leur monde ça s'apparentait à un cadeau de fiançailles.

Ils venaient aujourd'hui, à à peu près quatorze heures. Bien sûr, je devais avoir fini de tout déménager et fait dégager ma mère et Trey, parce que c'était mon père qui s'occupait du couple, et qu'il ne tolérerait pas d'avoir trois emmerdeurs dans ses pattes.

- Tu emballes quoi là, princesse? s'écria Trey, du fond de la pièce, dont l'occupation était de remplir l'arrière du camion des cartons déjà emballés.

- Un fauteuil que j'aime bien.

- Il est lourd?

- Ouais. Plutôt. Je viendrai t'aider à le charger.

- Ça marche.

Il retourna à ses affaires, et je retournai aux miennes. Le fauteuil vert bouteille prêt, je me lançais vers un autre secteur; j'avais encore besoin de toute l'argenterie que je trouverai à mon goût.

- M'man! Tu viens m'aider, maintenant?

Ma mère s'approcha à petits pas primitifs de la vaisselle et des armoires qui l'entouraient.

- Qu'est-ce que je dois faire exactement? demanda-t'elle, craintivement.

Ma mère n'était pas un femme du genre à faire la potiche, elle aimait se sentir utile et c'était même un trait qui la caractérisait, mais, j'avais découvert que pendant sa grossesse, elle devenait bien plus paresseuse et ne nous était strictement d'aucune utilité dans un déménagement. Elle ne faisait que se masser le ventre en chantonnant à la gloire de Daniel.

- Te servir dans les placards. Le reste, ils le vendront de toute façon.

- Je m'occupe des verres. dit-elle, en ouvrant l'armoire la plus proche d'elle.

Entre voisinsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant