I. Prologue

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Je cours sans me retourner. J'ai le souffle court et mon cœur martèle ma poitrine, pourtant je cours. Je ne me retourne pas non, plus maintenant. Pas avant d'avoir atteint le bout du tunnel. Ma poitrine est serrée et je peux sentir cette peur me terrifier de l'intérieur : l'appréhension de la mort... Il y a de quoi avoir la trouille, vous ne pensez pas ? Car elle est bel et bien présente en ce moment même.


Elle est partout et sa puanteur imprègne mon être depuis que je suis entrée dans cette putain de banque... Depuis que j'ai accepté ce casse qui m'a détruite à petit feu. C'était pire que la prison, je peux vous l'assurer. C'était un rendez-vous avec mon passé et un allé simple pour l'Enfer.

Dans ce cas, si tout ceci s'annonçait tragique dès le départ, pourquoi avoir accepté les yeux fermés les consignes du Professeur me direz-vous ? La réponse est simple : pour l'argent. Le fric fait tourner le monde, ça tout le monde le sait et moi mieux que quiconque. Si je survie à ce jeu suicidaire, je vous raconterais comment j'en suis arrivée là.


Les souvenirs reviennent à la charge. Ils obsèdent mon esprit alors que je fuis. Je cours encore et toujours. Ce n'est pas le moment pour faire dans le mélodrame, c'est ma vie que je joue là...

Rome, concentre toi !

Rome, c'est le nom de code que j'ai pris afin de faire partie du groupe. Nous avons tous un nom de ville et celui-ci me tenait particulièrement à cœur. Pour des raisons personnelles bien entendu. Tout est flou, mais pas ça. Jamais. Je n'oublierai pas. Ce nom reste ancré dans ma tête et j'ai dorénavant l'impression qu'il fait parti de moi. Même si je m'en sors vivante, je ne pourrais pas m'en détacher si facilement.


Je suis les autres qui se ruent comme moi, vers la Liberté. Mais connaître la liberté... à quel prix ? Rivaliser de si près avec la Mort en personne vaut-il le coup pour tant de billets ? Le milliard, il fait rêver... Mais j'ai appris une chose essentielle, c'est que lorsque l'on rêve trop, on se perd. On tombe.


Alors est-ce que tout cela en valait la peine ? Oui. Oui et non. Au final, non. Les larmes montent soudainement et je m'efforce d'oublier. Toute cette tension explose et je hurle durant ma cavale effrénée. Les balles fusent et elles écorchent mes oreilles. Elles sont loin et si proches à la fois. J'ai du mal à supporter ces derniers instants, ces dernières minutes. J'ai du mal à interpréter ce qui m'entoure néanmoins, je suis une cible visée par les balles qui ricochent sur les murs derrière. Hors de question qu'ils me chopent. Hors de question de retourner par la case prison. Nairobi scande des ordres en pleurs afin de nous soutenir, tandis que Rio s'est surpassé en aidant Tokyo à accélérer. Ils sont arrivés avant nous, ils sont saufs. J'ai à peine eu le temps de les voir monter à l'échelle, mais je le sais. Je le sens, la fin est à quelques mètres. Cette fuite est presque trop facile, on court et on fait exploser le tunnel. C'était le plan du Professeur et il avait eu bon sur toute la ligne. Mais il y a eu un imprévu. Et moi aussi j'ai été obligée d'y faire face en direct.


Regardez-moi, je suis à la traîne, la petite dernière comme souvent qui reste silencieuse mais ne pense pas moins. Je l'ouvre un grand coup lorsqu'il le faut et beaucoup se souviennent de ces moments. Je préfère rester en retrait et analyser ce qui m'entoure. Ça, je le tiens de lui, Monsieur Élégance et ses conseils avisés. Il m'a appris à vivre. Il m'a appris à réfléchir avant d'agir. Je n'étais pas de la sorte avant de le rencontrer, je peux vous l'assurer. Et pourtant c'est paradoxale car il n'y a qu'avec lui que j'ai du mal à garder mon sang froid. Je m'emporte dès que ses yeux dérivent sur moi. Il me fixe et me sonde. Il l'a toujours fait et en jouait, le con ! Après tant d'années, il savait ce qu'il faisait. Il a fini par me forger. Il m'a rendu plus forte et prête à affronter la vie. Armée non pas d'amertume et de colère, mais de recul et de paroles. Parler et l'une des meilleures armes que l'on puisse manier dans ce monde.


Il n'a pas voulu venir. Il n'a pas souhaité nous suivre pour se sacrifier pour une juste cause. Sa cause, sa rédemption, lui qui s'est toujours comporté en salaud. Je me suis débattue pour rester. Tout comme Nairobi, j'ai cherché à le convaincre mais il est aussi buté qu'il n'est taré. Personne ne pouvait le raisonner. On aurait fait face ensemble. Si je devais choisir entre les barreaux et la Faucheuse ? Elle-même sans hésiter, et je lui aurais ouvert les bras avec joie. Mais pour l'heure, je sauve ma peau parce que c'est dans le contrat. Je ne me suis pas vraiment faite à l'idée de mourir ici. Même si je l'ai parfois dit, je ne le pensais pas. 


Je n'avais pas prévu ce coup là de sa part. Andrés de Fonollosa. Je ne sais pas si je pourrais lui pardonner à l'avenir, mais je ne le déteste pas. Pas pour l'instant. Je le détesterai quand j'aurai encaissé le choc. 


Je sens une poigne agripper ma manche et me tirer vers l'avant. C'est Helsinki, ce bon vieux Helsinki qui a remarqué mes difficultés. J'ai l'œil vide et le teint pâle. Mon ventre est noué, je sens que je vais vomir d'ici peu. Il s'arrête et scrute mon regard. Nous n'avons pas le temps pour ça, et il le sait. Si je dois être malade, autant attendre la fin de la course. Je n'en doute même pas, à coups sûrs je serai mal. Malade à en crever, à m'enfermer entre quatre murs et m'isoler.


Helsinki prononce quelques mots mais je ne les comprends pas bien. Je suis dans ma bulle. Seule avec mes souvenirs. Je suis dévastée. Dévastée et perdue. Ces derniers jours ont été intenses. Jamais je n'aurais pensé vivre une telle expérience. Jamais je n'aurais pensé le retrouver... Merci Professeur ! Tout se bouscule mais je reprends soudainement mes esprits. Mon souffle est saccadé et je cherche ma respiration. Le grand gaillard m'encourage à sa manière, d'une tape sur l'épaule.


Ils ne m'auront pas, pas aujourd'hui. Nous avons beaucoup trop perdu pour tenter de nouveau le diable. Courage, on a fait le plus gros du travail ! Je ravale mes sanglots, ceux qui sont logés au plus profond de nous et qui nous tétanisent. Puis, je me lance de nouveau, Helsinki me soutient de sa force. Il referme la marche et me talonne. Il veille à ce que personne ne soit tué. Personne de plus. Vous savez, apprendre à vivre est difficile mais frôler la mort est une chose si simple.


Je la sens si près, elle est là. Elle nous guettait depuis le début et désormais, elle est à nos trousses : la mort. Cette foutue mort. Elle est infecte.

Les flics sont là et la Mort les accompagne. Elle nous sourit et nous juge. Elle me terrifie, alors que mon passé me bouleverse. Toutefois, je ne m'attarde pas dessus, car sinon je fermerai les yeux à tout jamais. Si je fais la moindre erreur, si je ralentis pour sécher mes larmes et crier ma peine, je meurs. Je meurs comme lui.


Oh Berlin, mais que t'ont-ils fait... Tout avait pourtant si bien commencé.  

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Ma première fiction sur La Casa de Papel ! L'histoire et les personnages ne m'appartiennent pas. Seule Rome est mon OC. Enjoy !  

I. Berlin ciao [TOME 1 - La Casa de Papel | Money Heist]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant