Chapitre 17 : l'amertume des secrets.

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CHARLES ME regardait touiller mollement mon café noir et sans sucres. Il fixait lui-même son verre de coca pétiller, le regard sans lueur.

Nous ignorions bon train Othilie et Anthony qui faisaient de même. J'avais intercepté le regard bleu paniqué de l'aîné Angelin qui faisait comme s'il ne me connaissait pas. Ce qui n'était pas plus mal.

« Tu bois sérieusement ça sans sucre ? Beurk.

— Tu bois bien du coca en plein hiver et je te dis rien.

— Oui mais ça, fit-il en mettant son verre sous mon nez et agitant les glaçons, ça c'est bourré de sucre. Et le sucre, c'est super bon.

— Parle pour toi. »

Je bus une gorgée de mon café avant de sentir ma gorge se serrer sous l'amertume de la boisson. Ma mimique du probablement être expressive car Charles esquissa un sourire amusé.

« Tu n'aimes pas le sucre, hein ? souligna-t-il, ironique.

— Je ne dois pas en manger. J'ai l'impression d'être diabétique ou un truc comme ça. »

Son sourire s'évanouit aussitôt. Il fixa son verre comme s'il avait un quelque intérêt. À l'intérieur, je ne voyais qu'un liquide marron pétillant à l'excès mais lui semblait y trouver une potion magique ou quelque chose comme ça.

   « J'aime bien les bulles. Regarde. »

   Il remonta le doigt le long de son verre, suivant les petites billes qui éclataient en surface.

« Là, c'est des rêves. T'as pleins de petits rêves en bulles. Puis ils explosent de l'intérieur. Ils te détruisent si tu les secoue trop et c'est toi qu'ils font exploser. »

   Il laissa planer le silence avant de boire son verre d'une traite. Je tournais les doigts autour de ma tasse de café sans trop savoir quoi faire.

   Je tendis l'oreille, essayant de savoir ce sur la table voisine pouvait dire.

   « Mais qu'est ce que Mat peut bien faire ? On lui avait dit pile. Il est bientôt dix !

   — T'es bien placé pour savoir que ta sœur est une quiche en orientation, répondit légèrement Othilie avec un rire.

   — Elle doit encore être en rencard avec une fille, soupira dédaigneusement Anthony.

— Vous avez les mêmes gènes, commenta amèrement la blonde. »

Il prit sa main avec un sourire pendant que j'ignorais tant bien que mal la déchirure au fond de mon cœur.

   « J'ai un truc à te demander. Y a des rumeurs comme quoi ma sœur serait en fait amoureuse de quelqu'un. T'en sais plus ?

   — Non, pas vraiment. Je parle pas trop amour avec elle, je sais qu'elle vit pas bien le fait qu'on sorte ensembles.

   — J'ai entendu dire que c'était Déotile. Ca m'étonnerait pas d'elle, elle a toujours aimé les filles qui ont l'air super innocentes mais qui sont complètement...pas dépressives, mais genre, âme torturée, tu vois ?

   — Totalement. Oui ça doit bien être le genre de Mat. »

   J'avais l'impression de pleurer de l'intérieur. Et c'était sûrement ça, que tout le monde décrivait comme le pire sentiment. Avoir l'impression qu'on arrachait la peau de mon cœur et laissait la chair à vif et devoir lutter contre cette envie de pleurer grandissante.

Dernière valse.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant