Chapitre 30 : Au creux d'un rêve

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Ni'Pteh considéra sa compagne de route d'un regard en coin.

Peut-être Raluka en avait-elle trop dit ? Elle lui avait accordé sa confiance, et c'était possiblement trop tôt. Elle venait de lui révéler qu'elle était sans défense face à elle, déjà qu'elle savait que la Rêveuse ne pouvait pas entrer pleinement dans sa tête... Et si l'In'Helor n'avait pas de si bonnes intentions que ça à son égard ? Tout cela pourrait vite se retourner contre elle.

La lapine s'ébroua, comme pour chasser ces pensées incertaines. Elle n'étaient le résultat que de la peur, une peur injustifiée. Ni'Pteh n'avait aucune raison de s'en prendre à elle. Elle avait déjà montré, à l'approche du village, qu'elle était prête à défendre sa peau. Alors...

"La magie du Rêve n'est pas la plus adaptée pour se battre, à ce qu'on m'a dit." déclara Ni'Pteh.

Son assertion resta suspendue, jusqu'à ce que Raluka comprenne qu'elle voulait un commentaire de sa part.

"Hé bien... Les illusionnistes peuvent se débrouiller relativement bien. Les évocateurs aussi, mais ceux-là sont rares... Non, ça a plus à voir avec la façon dont moi, je m'en sers."

"Et comment t'en sers-tu ?"

Ni'Pteh soutenait son regard. Il s'agissait d'une vraie curiosité, pas d'une envie malsaine.

"Je voyage dans les rêves, et je fais surtout ce que les humains appellent de la télépathie. J'arrive à sentir les émotions des gens, et parfois à entendre ce qu'ils pensent."

La prêtresse se détendit et recula dans son siège, pensive.

"Je croyais que l'intérêt pour les Immortels de nous choisir était de sélectionner les meilleurs combattants de leur peuple afin qu'ils puissent se défendre d'eux-mêmes si les choses venaient à mal tourner..."

Raluka bégaya en cherchant ses mots.

"Je... Tu sais, je ne suis pas..."

"Oh, bien sûr, ce n'est pas contre toi." assura Ni'Pteh qui comprit vite que ce qu'elle venait de dire pouvait être perçu comme un reproche. "Je me demande juste pourquoi ton dirigeant a opté pour quelqu'un de non-combattant."

"Ça..." fit Raluka, hésitante. "Ça c'est une longue histoire."


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"Maman ! Maman !"

Les cris nasillards de la fillette résonnaient dans la chambre plongée dans la pénombre.

"Maman ! T'es où ?"

"J'arrive ma chérie ! Je suis là !"

La paysanne accourut aussi vite qu'elle put. Ses modestes habits de toile étaient déchirés par endroits, et une longue trace rougeoyante couvrait son bras.

La panique pouvait se lire dans ses yeux, mais il y avait quelque chose de plus. Une détresse toute particulière se lisait dans l'humidité qui envahissait ses joues.

"Maman ! Maman, il est où, papa ?"

La mère hoqueta, et ne répondit rien. Elle fondit sur sa fille, qu'elle entoura de ses bras, avant de fondre en larmes.

"Tout ira bien ma chérie. Tout ira bien... Je te le promets."

Des bruits terribles se faisaient entendre, au-dehors. Des craquements insupportables, peut-être des incendies, des maisons qui s'effondrent, des sorts qui s'abattent.

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