~2~ Farid

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Alors que les premiers rayons du soleil ne sont pas encore parvenus sous sa tente, Farid ouvre les yeux. Il se lève et range ses maigres possessions dans son sac. Il soulève le pan de sa tente et s'extrait de sa petite habitation mobile. 

L'aube joue avec les grains de sable qui recouvrent le paysage. Le soleil est caché par une haute dune, mais sa lumière se répand doucement sur le monde endormi. Il attrape un bagage plus petit ; celui dans lequel il mettra le fruit de sa chasse.

Il s'éloigne du camp. Il n'est pas mécontent de s'occuper de la chasse. C'est son travail préféré, qu'il considère comme une récompense après les longues heures de marche dans le désert, de la ville où ils vendent leurs marchandises à leur habitation. Depuis que son père est souffrant d'une mystérieuse maladie incurable qui touche certains membres de sa famille, de nombreuses tâches reposent sur ses frêles épaules.

Ses pieds s'enfoncent dans le sable agréablement refroidi par la nuit. Le vent se lève et le pousse. Il prend le temps d'observer le désert. Il tend l'oreille aux presque inaudibles bruits de la nature que son père lui a appris à reconnaître.

La température est encore clémente lorsque Farid repère le passage d'un animal ; d'infimes traces qui passeraient inaperçues à un regard peu aguerri sont inscrites dans le sable. Elles sont fraîches, sinon le vent les aurait déjà recouvertes. Un sourire éclaire son visage alors qu'il remonte la piste. Il s'accroupit et scrute des yeux le sable, attendant une action. Soudain, un mouvement attire son attention.

Un dard ébène, luisant sous les assauts du soleil, s'extrait du sable. Très prudemment, il approche sa main du scorpion, évitant une attaque. D'un geste habile que confère l'habitude, il attrape prestement l'animal et l'assomme d'un violent coup à terre. L'arachnide inerte dans la main, il observe le désert. Son regard se porte un peu plus loin, sur une motte de sable. Il fronce les sourcils et intrigué, se met à creuser. En général, ce genre de monticules cache des lézards.

Ses mains plongent dans le sable réchauffé par le soleil avec empressement ; il ne faut pas laisser l'animal s'enfuir trop profondément. Son ongle heurte un objet plus rigide que l'est le corps d'un lézard. Farid fronce les sourcils et s'active.

Bientôt, un curieux objet gris perce le sol. L'empoignant à deux mains, Farid tente de le retirer au sable, mais l'objet ne bouge pas d'un millimètre.

Qu'est-ce que c'est ?

Sa curiosité le pousse à creuser autour de l'objet, cherchant à le récupérer, mais toutes ses tentatives sont vaines ; il est bien trop ancré dans le sol. Peu à peu, il découvre l'objet. Sa couleur ardoise un peu translucide lui fait penser à un ongle. L'objet est très long et forme comme un tube, dont les deux côtés sont coupants. 

Il continue de creuser, le sang battu par l'excitation. Dans le prolongement de cet objet grisé, un long tube orangé apparaît, dont la texture molle et rugueuse rappelle étonnamment une patte. Le trou creusé par Farid prend de l'importance à mesure que le soleil monte dans le ciel.

Ses rayons commencent à chauffer et Farid, immobile, sent la chaleur cuisante du soleil sur son dos. Il se déshydrate, mais l'aspect mystérieux de sa trouvaille l'empêche de s'arrêter pour boire. Il s'essuie le front d'un revers de ma main et souffle. L'air expiré se mélange au vent et balaye quelques grains de sable qui découvrent un semblant de patte de poule.

Serait-ce un cadavre ?

Les sourcils froncés, Farid prend quelques instants pour réfléchir à la nature de sa découverte. Si c'est bien une patte, l'animal doit être titanesque. Ses mains sèches et ses doigts abîmés par les grains rugueux du sable se replongent dans la poussière dorée. Il continue sa besogne en silence.

Mythomorphia ~ L'Esprit De La ForêtOù les histoires vivent. Découvrez maintenant