Chapitre 8

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                                   Lorsqu'elle rentra chez elle, il était près de vingt-et-une heures trente. La soirée avait été longue et éprouvante. Elle lança ses affaires près de la penderie, alluma la lumière de la cuisine et sortit les restes de pizza du frigo. Lucie regarda son bras, et commença à retirer le précieux bandage. Elle avait déjà commencé à cicatriser, même presque finit en fait, et cela avait toujours été comme ça depuis toute petite. Dès qu'elle se blessait, les blessures cicatrisaient très rapidement. Même les énormes bleus qu'elle pouvait se faire disparaissaient au bout de quelques minutes.
Etrange, certes, mais Lucie avait maintenant trop l'habitude pour y faire réellement attention.
Elle passa son bras sous l'eau et y mit un autre bandage, propre et soigné, au cas où il y ait un nouveau problème -même si la jeune fille n'y croyait pas vraiment.
Elle monta à l'étage et parti dans sa chambre, prit son appareil et y enleva la carte mémoire. Elle passa par le couloir et s'arrêta au niveau du bureau de ses parents.
La fenêtre menant au balcon était ouverte. Lucie était pourtant sûr de l'avoir fermée en partant...
Elle la ferma, regardant longuement dehors et recula lorsqu'elle se cogna contre quelque chose et tomba. Un lourd atterrissage au sol suivit d'un grognement.
Un grognement ?
Elle n'avait pas grogné. Elle avait marché sur quelqu'un.
- Non mais ça va...
Lucie réagit tout de suite et se retourna vers celui qu'elle venait d'écraser et qui venait de prendre la parole. Elle donna un énorme coup dans la mâchoire de l'individu qui bascula en arrière.
La jeune fille l'attrapa et le bloqua. Il ne bougeait plus et se laissait un peu trop faire à son goût. Elle avait un peu de sang sur ses bagues. Soudain le visage de Denis traversa son esprit.
Mon dieu ! Elle avait réellement tué quelqu'un avec ses bagues !
Elle tendit ensuite le bras vers l'interrupteur pour enfin y voir un peu plus clair... ainsi que vérifier qu'elle n'avait tué personne.
Et se retrouva nez à nez avec Ian.
- C'est bon, dit-il, t'as finit ?
Elle le dévisagea complètement ébahie. Il n'avait aucune marque de blessures et pourtant elle avait senti le choc sous sa main. Elle prit son visage entre ses mains et le tourna dans tous les sens pour vérifier qu'il avait au moins une égratignure quelque part... sans résultat.
- Mais qu'est-ce que tu fais chez moi ?! hurla-t-elle enfin.
- J'ai vu de la lumière alors je suis rentré, chantonna-t-il ironiquement.
- Tu ne vas pas me dire que tu t'es fait poursuivre par des fans hystériques, que tu as courus dans la forêt, t'es retrouvée dans un des coins les plus paumés de la ville la plus oubliée de l'Angleterre et que tu t'es retrouvée chez moi par hasard ?
Ian la regarda avec un sourire d'ange.
- Et bien... si en fait. Je ne pouvais pas deviner que c'était ta maison.
- Mon nom est écrit en gros sur la boîte aux lettres, rétorqua-t-elle.
- Je n'ai pas pour habitude de regarder la boîte aux lettres des maisons lorsque je me fais pourchasser par des fanatiques de la pop rock !

Bon, il marquait un point, mais elle ne voulait plus avoir de problèmes à cause de lui. Elle s'assit à côté de lui, en tailleur, et allait lui demander ce qu'il comptait faire maintenant (du genre déguerpir de chez elle) lorsque quelqu'un sonna à la porte d'entrée.
Elle se précipita au ré de chaussé en prenant Ian par la main et l'entraînant avec elle.
- Tu vas tout de même pas...
Mais avant qu'il ait pu finir sa question, elle le balança dans un placard à balais. Non elle n'allait pas le jeter dans les bras des fans, elle n'était pas complètement dingue. Surtout qu'ils se poseraient sans doute des questions par la suite.
Elle se dirigea vers la porte, en broyant du noir, et l'ouvrit si brusquement qu'elle se surprit elle-même.
- BONJOUR, hurla-t-elle.
- Euh... bonjour ?
Dès qu'elle vit qui se tenait devant sa porte, elle se sentit pâlir et se calma immédiatement. La licorne verte fluo et les deux lions étaient là, et la regardaient d'un air songeur.
- Nous nous connaissons ? demanda l'un des lions.
- Nooooooooon, pas du tout, je m'en souviendrais ! mentit-elle.
- Nous recherchons Ian des Free Fire, on voulait prendre une photo avec lui mais il a pris la fuite. Vous ne l'auriez pas vu par hasard ? demanda alors la licorne verte.
- Ian des Free Fire, ici ? Oh mon dieu, mais c'est génial je les pensais à Londres, fit-elle avec une fausse joie.
- Vous n'avez pas lu le journal local d'aujourd'hui, si vous l'aviez lu vous sauriez que lui et ses frères se sont installés dans cette ville !
Il y eut un moment de silence. Lucie avait l'impression de vivre en plein cauchemars.
- Mais c'est géniaal ! s'exclama-t-elle.
- Ouais ! Surtout qu'on habite ici aussi, on pourra enfin être plus proche d'eux ! Bon je vois que vous ne l'avez pas vu donc nous allons vous laisser.
- Merci ! Et peut-être est-il passé par la rivière, vous devriez jeter un coup d'œil.
Ils la remercièrent et Lucie referma la porte.
Pour s'étaler par terre, complètement hors d'état de faire quoi que ce soit.

Les Free Fire s'installaient à Penvanya, la ville la plus oublié d'Angleterre, sa ville et la licorne et les deux lions étaient des habitants de cette même ville.
La joie.
Ian sortit du placard et prit un morceau de pizza posé sur le buffet de la cuisine. Il regardait d'un air amusé le visage de la jeune fille qui se décomposait de plus en plus.Après tout, elle serait dans la mouise pendant des mois, voire des années maintenant.
Elle se dirigea vers le sofa et s'assit, complètement zombifiée. Ian lui tendit le reste de pizzas, elle se servit machinalement et resta silencieuse pendant un moment. Il alla fermer toutes les fenêtres –par sécurité– et toutes possibles ouvertures d'où l'on pourrait l'apercevoir puis la rejoignit sur le sofa.
- Penvanya alors, dit Lucie.
- Exactement, confirma-t-il, tu devrais montrer encore plus ton enthousiasme.
Elle le regarda, et rit doucement. Il avait vu juste.
- Je suis désolée mais j'ai l'impression que vous êtes des aimants à problèmes.
Ils reprirent tous les deux une part de pizza.
Ian contemplait la maison d'un œil de lynx, examinant chaque détail, chaque recoin. Eux se trouvaient dans un immense salon qui devait faire deux centaines de mètres carrés et étaient composés de plusieurs petits étages où l'on trouvait différents aspects du salon. Il y avait d'énormes baies vitrées qui conduisaient à une terrasse extérieure avec vu sur la rivière, et un peu plus loin, près de la cuisine se trouvait deux escaliers. L'un menait au premier et troisième étage et le deuxième au second étage et au grenier. Chaque étage étant composé de plusieurs dizaines de chambres et parfois des suites. Au troisième étage il avait pu constater par lui-même qu'il y avait un studio de musique et une piscine intérieure.
- Ta maison est immense, constata-t-il tout haut.
- Mes parents mettent la majorité de l'argent qu'ils gagnent dans la maison. Ils gardent un minimum pour eux et le reste c'est pour mon argent de poche.
- Quelle enfant gâtée !
Il avait un magnifique sourire mais celui disparut vite lorsque Ian aperçut le visage sombre de la jeune fille. Apparemment l'argent ne lui suffisait pas.
- Avant que tu poses la question, dit Lucie, mes parents ne sont là qu'une fois par an.
- Je voulais plutôt te demander en quoi gagner de l'argent avec l'aide d'un petit boulot te sert-il ?
La jeune fille le regarda silencieusement. Elle avait de magnifiques yeux violets, et ils brillaient de nouveau. Il en était sûr, ses yeux n'étaient pas communs.
- Je m'ennuie.
Cette phrase résonna dans la tête du jeune homme.
- Tu t'ennuies ? répéta-t-il.
- Oui je m'ennuie, se contenta-t-elle de dire signifiant que le sujet n'était pas abordable.
Elle avait les yeux remplis de tristesse, une tristesse si immense que Ian ressentait presque de la compassion. Ce qui devenait grave, il n'en ressentait jamais normalement, ou alors s'en fichait complètement. Mais la voir elle, une fille qui avait sauté d'un immeuble, escalader un toit et avait résisté à un mec balaise prêt à tuer pour une bouteille d'alcool avec un sang-froid unique, se sentir faible juste en pensant à ses parents qui n'étaient jamais là... il avait de la peine.
Ses yeux s'étaient éteints et n'illuminaient plus la pénombre.
Elle se releva soudain et se dirigea vers un bar à bière (qui ne lui servait pas à grand-chose vu qu'elle ne buvait pas) où elle avait posé la carte SD de son appareil et s'assit sur un des tabourets, ignorant totalement la présence de le jeune homme.
Elle alluma son ordinateur et y inséra la carte. Elle parcourut les clichés rapidement et les mit sur un disque dur extérieur.
Ian se leva à son tour et la rejoignit. Il admira les photos et émit un petit sifflement de respect. Des paysages, des portraits, il y avait de tout mais on avait l'impression que les clichés avaient été pris par un artiste professionnel.
Lucie semblait lasse et dépitée.
- Arrange toi pour ne plus être dans cette maison au même moment que moi la prochaine fois, fit-elle dans un presque murmure.
Ian rit doucement, il n'avait pas l'habitude de se faire rejeter de cette manière.

Pendant les heures qui suivirent, Lucie travailla sur la table du salon et s'occupa de ses clichés. Ian put remarquer la collection remarquable d'appareils photos déposés un peu partout dans la maison.
Il était fatigué et avait très soif, il avait vraiment besoin de « partir en chasse ».
Lucie l'avait laissé prendre une douche et lui avait donné de vieux vêtements de son père qu'il ne portait jamais (enfin lorsqu'il était présent). Il descendit au salon et regardait, admiratif, la jeune fille qui travaillait avec ardeur.
Elle avait des cheveux d'un blond platine remarquable et naturel, une véritable crinière. Elle les avait attachés en un chignon fait à la va vite et quelques mèches rebelles et bouclées perlaient sur son visage. Elle n'était pas très grande et était assise dans une position des plus anormales qui la rendait plutôt mignonne.
Le regard de Ian s'arrêta brusquement sur le cou de la jeune fille. Il eut un haut le cœur.
Il fallait vraiment qu'il aille « chasser ».
- Tu as l'air fatiguée, lui dit Ian.
Elle sursauta, ne l'ayant pas su aussi près d'elle.
- Non pas du tout, je suis en pleine forme, dit-elle avec un adorable sourire.
Il mit sa main devant son front et une étrange lumière bleuté sembla en jaillir. Il se rapprocha de son visage, et continua :
- Je t'assure que tu es fatiguée, et que tu dois dormir.
Lucie voulut protester, mais doucement elle sentit ses forces s'échapper de son corps. Elle essaya de résister mais elle ne pouvait plus... rester éveiller, il fallait... qu'elle reste...
Puis tout devint noir, et son corps commença à tomber presque sans vie.

Ian la rattrapa. Elle était vraiment légère.
Il la déposa délicatement sur le canapé et prit une couverture dans un des placards.
Il la regarda un dernier moment. Elle semblait le détester et pourtant, elle l'avait aider.
Ian soupira. Il devait maintenant « partir chasser ».



AméthysteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant