Prologue

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Décembre 1476

Les flèches sifflaient dans la nuit, s'enfonçant dans les corps avec un bruit mat. L'une d'entre elle se ficha dans son bras. Il retint un juron et talonna sa monture, qui accéléra. Le pied sûr, la brave bête louvoyait entre les arbres, évitant les rochers et les racines. Le bruit de ses sabots était étouffé par la mousse épaisse recouvrant les sous-bois. Autour d'eux, des cris fusaient, les bruits de lames qui s'entrechoquaient raisonnaient entre les arbres. La nuit était noire comme jamais, pas de lune, pas même d'étoiles. Était-ce un présage ? Il jura, non impossible, personne n'aurait pu prévoir ce désastre, c'était un coup du sort, mais il s'en remettrait, comme il le faisait toujours. Les lumières des torches ennemies vacillaient à travers les arbres. Il bifurqua vers le nord. Là-bas, se trouvait un monastère orthodoxe. Il lui fallait le rejoindre au plus vite. Ses hommes étaient perdus, mais il ne s'avouerait pas vaincu. Et il retrouverait le traître qui l'avait vendu. Il tenta de réajuster son uniforme, qui à moitié déchiré par un coup d'épée, entravait ses mouvements. Il maudit les turcs qui avaient inventé un pareil équipement, et regretta le confort du sien. Il aurait tiré du courage à pouvoir caresser la croix sur son médaillon qui ne le quittait habituellement jamais. Hélas, son plan excluait qu'il porte tout signe qui puisse trahir son origine valachienne. Soudain, des silhouettes surgirent de derrière les arbres, et se jetèrent devant lui. La lueur de leurs poignards brilla fugacement, tandis qu'ils tranchaient les tendons de sa monture. Celle-ci s'écroula, l'envoyant valser dans les branchages. La flèche encore plantée dans son bras se brisa, et s'enfonça plus profondément encore. Il se releva promptement en grognant. Et avant toute chose, acheva son cheval, qui agonisait devant lui. Puis il fit face à son ennemi. Il reconnut alors ses hommes, et se détendit. Ils savaient qu'il avait pris l'uniforme turc afin de tromper l'ennemi. Il enleva son casque cabossé et le jeta par terre, et s'approcha d'eux, sans aucune méfiance. Il croisa le regard de son fidèle second. Qui le fixa droit dans les yeux, avant de lever son épée, et de lui trancher la gorge. Étrangement, il eut tout à fait conscience de ce qui se passait. Il sentit la lame effilée entamer sa gorge, et sa tête se détacher du reste de son corps. La dernière pensée qu'il eut fut qu'il avait retrouvé le traître plus vite que prévu. Puis tout ne fut que ténèbres.

Une faible lueur vacillait et dansait dans l'obscurité, tandis qu'un bourdonnement persistant se faisait entendre. Il se redressa soudain, ouvrant brusquement les yeux. Aveuglé par la lumière brûlante, il bondit sur ses pieds cherchant en vain ses armes. Une main se posa sur son épaule. Sans réfléchir, il frappa, et son poing s'écrasa avec un bruit sourd sur la mâchoire de son agresseur.

- Mon fils, il suffit.

Il se figea. Et se retourna vers la voix. Non c'était impossible, il était mort, il se souvenait encore de la morsure de la lame sur sa gorge. Il dévisagea sans comprendre les trois hommes qui lui faisaient face. Son père. Et ses deux frères. Il recula. Ils étaient tous morts. Depuis des années.

- Bon retour parmi nous Vlad.

L'Ordre du dragonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant