Chapitre 42 : Les gens collants

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Enfin, c'étaient les derniers jours de cette année scolaire où je mettrais les pieds en tant que première. Mais avant que l'heure des vacances sonne, nous avions tous à subir quelques examens. La plupart ne déterminaient pas notre passage à l'année suivante. En revanche, ils pouvaient indiquer aux professeurs si nous avions des lacunes et pouvaient aussi permettre de mieux nous orienter.

Mais je n'y croyais pas vraiment. J'étais persuadée que c'était surtout pour les apparences, pour prétendre que les élèves ne foutaient pas rien dans ce lycée.

Dès mon arrivée, je croisai le regard de Lucine. Nous nous reverrions lors de la pause puisque nous étions rangés par ordre alphabétique. Je pus ainsi retrouver Saphira dans la même salle que moi... et aussi Carter, mais j'allais faire comme si celui-ci n'existait pas.

Saphira révisait encore à la dernière minute, relisant ses nombreuses fiches.

— Je ne pense pas que tu retiendras quoi que ce soit, lui fis-je remarquer.

— Mais si jamais ils posent une question et que j'aurais pu le savoir à ce moment-là ? s'inquiéta-t-elle.

— Tu vas juste culpabiliser de ne pas pouvoir relire toutes tes fiches, rétorquai-je naturellement.

— Désolée, mais moi je ne peux pas y aller au talent comme toi.

— Fais comme tu le sens...

Elle continua ses révisions le temps qu'on nous ouvre la salle. Heureusement, nous avions peu attendu et nous pouvions ainsi nous asseoir aux places qui nous étaient attribuées. Alors que j'étais en train de déballer mes affaires, Carter s'approcha de ma table.

— Tu ferais mieux de sortir tes affaires, lui lâchai-je sans même le regarder.

— On se demandait si tu viendrais à la fête de fin d'année...

— Cool. Je n'ai pas de comptes à te rendre sur mes sorties, donc tu vas devoir faire sans ma réponse, rétorquai-je en lui lançant un sourire narquois.

Il était évident qu'il avait envie de poursuivre cette conversation pour me perturber, mais un prof l'interrompit, lui sommant de rejoindre sa place. Je ne pouvais m'empêcher un sourire victorieux pendant qu'il bouillait de rage. Bientôt je ne verrais plus cette tête de con dans le paysage...

*

À la pause, nous nous étions toutes retrouvées à la cafétéria. Saphira semblait assez fière d'elle, ayant plutôt bien réussi les maths. Tandis que le reste de la table n'était pas vraiment du même avis. J'avais malheureusement bien trop souvent répondu au pif pour avoir ne serait-ce qu'au-dessus de la moyenne.

Au cours de la discussion, Sam proposa de se faire un cinéma vendredi après-midi, à la fin des examens. Immédiatement, chacune d'entre nous approuva sans même savoir ce que nous pourrions aller voir. En tout cas, il était fort probable qu'il y ait un blockbuster que nous devions voir à cette période de l'année.

Alors que nous étions tranquillement en train de parler de tout et de rien, Damon s'approcha de notre table et je craignais déjà le pire.

— Salut vous tous, ça a été les exams ce matin ? demanda-t-il comme si nous étions tous amis.

— Je crois que tu t'es trompé de table, rétorquai-je naturellement.

— Je ne peux plus m'incruster à la table des lesbiennes ?

Un silence s'installa. Évidemment, il allait entrer dans la provocation assez rapidement et sans même regarder Lucine, je savais qu'elle angoissait déjà à l'idée que notre relation soit révélée à tous. Heureusement que c'était bientôt les vacances.

— Damon, sache que la fétichisation des lesbiennes, c'est complètement con parce qu'aux dernières nouvelles, tu es hétéro. Alors, à ta place, au lieu de continuer à dire ce genre de conneries, tu ferais mieux d'aller ailleurs... Personne n'a envie de te voir à cette table.

— Tu ne sais pas si je suis hétéro, tenta-t-il de se défendre lamentablement, ignorant totalement le reste de mon propos.

— Alors, certes. Mais permets-moi douter de ton argument.

La plupart des personnes présentes à cette table semblaient assez gênées et visiblement, j'étais la seule capable de contenir cette enflure. Ce n'était pas non plus si évident que je le laissais paraître. Au fond de moi, j'avais envie de fuir et mes mains que j'avais cachées sous la table ne cessaient de trembler.

— Et les autres ne savent pas parler ? lança-t-il par provocation.

— Estime-toi heureux qu'une personne te réponde pour te faire comprendre qu'on ne veut pas de toi.

— Tu me déçois vraiment Diana, lança-t-il d'un air désolé.

— Tant mieux alors, répliquai-je, indifférente.

Mon manque de réaction ne lui plaisait pas, c'était certain. Damon avait pris l'habitude d'être le centre du monde et il perdait petit à petit son pouvoir. Bientôt, je serais celle qu'il considérerait comme une manipulatrice voulant détruire sa vie, cette manipulatrice qui ne supportait pas une rupture. Les rôles seraient inversés contre mon gré, mais tant pis. Tout le monde ne le croirait pas.

Déçu de ne pas pouvoir foutre la merde, il me fusilla du regard et partit rejoindre la table de Carter et de ses autres acolytes.

Puis tous les regards se tournèrent vers moi. Personne ne savait quoi dire, mais il était évident que quelqu'un avait envie de faire une remarque. Rapidement, je détournai le sujet de conversation en parlant de nouveau de la sortie ciné et de l'organisation. Au moins, ça détendit facilement l'atmosphère...

Le Spleen du CygneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant