Chapitre 4 - Partie 2

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— Je n'ai jamais utilisé mon Don, je ne sais même pas comment il fonctionne...

— Vous vous entrainerez sur mes servantes, peut-être pourrez vous en profiter pour apprendre laquelle vole dans mes cuisines ! railla-t-il.

— Les gens ne sont pas des animaux monsieur ! Hors de question de les traiter comme du bétail ! Savez-vous au moins que l'utilisation du Don Iclite est douloureux pour les deux personnes ?

Il se rembrunit et serra ses poings si fort que la ferveur de Lia s'abaissa quelques instants.

— Ecoutez-moi Lia, vous vous entrainerez, ce n'est pas une offre mais un ordre !

Il fouilla dans la poche intérieure de sa veste et en sortit une lettre déjà fermée par un sceau. Il brandit la lettre devant les yeux de la jeune fille.

— Voyez cette lettre ma chère, je n'ai plus qu'à la donner à mon courtier et dans quelques jours les Maréchaux arriveront ici. Vous n'avez pas le choix si vous tenez à votre vie. Car croyez-moi, ces gens-là n'ont pas pour habitude d'offrir une seconde chance à leur prisonnier, s'ils vous cherchent avec tant d'ardeur c'est pour vous éliminer.

Lia le toisa à nouveau, dégoutée de savoir qu'il avait raison. Elle détourna la tête pour examiner le mur.

— A deux conditions.

— Lesquelles ?

— Que vous me promettiez que ces murs ne laisseront pas passer les ondes de mon Don, et que des guérisseurs soient présents pour soulager vos servantes après que j'ai sondé leur mémoire.

— Je vous promets et j'accepte, répondit-il sans réflexion.

Le lendemain Raenar lui amena la première servante. Elle était un peu plus jeune qu'elle, et semblait apeurée. Lia tenta de la rassurer en lui disant qu'elle ferait de son mieux pour ne pas la blesser et que des guérisseurs étaient là pour lui donner un remède contre la douleur, si celle-ci devenait insupportable.

Lia n'avait jamais vu aucun Iclite faire usage de son Don, elle n'avait donc pour méthode que les quelques livres et récits qu'elle avait trouvé dans la bibliothèque à la Rochebarré. Elle savait seulement qu'il fallait placer ses mains sur la tête de la personne et les paumes au niveau des tempes. Après, par contre, elle n'avait aucune idée de si cela venait de suite ou s'il fallait forcer son imagination, appuyer fort ou pas...

Elle s'avança vers la servante, et après qu'elle lui ait donné l'autorisation, par un hochement de tête, de commencer, elle plaça ses mains. Lia ferma les yeux, prit une grande inspiration et se concentra sur sa volonté de lire son esprit. Rien ne se passa. Elle se concentra plus fort, les traits de son visage se crispèrent, elle augmenta la pression de ses mains, mais cela ne servit à rien. Elle n'arrivait pas à pénétrer sa mémoire.

Elle relâcha son emprise sur elle, énervée. Puis elle se tourna vers Raenar, pensif.

— Je n'y arrive pas ! beugla-t-elle.

— Essayez encore !

Lia soupira et s'attela à nouveau à la tâche.

Cela ne fonctionnait toujours pas. Raenar fit venir plusieurs servantes, mais elle n'arriva à pénétrer dans la tête d'aucune. A la fin de la journée, épuisée, elle tomba à terre. Elle ne comprenait pas pourquoi cela ne marchait pas, mais se rendit à l'évidence qu'apprivoiser son Don était une étape importante dans la vie d'un individu, il était donc normal que ce ne soit pas chose aisée. Il y avait certainement plusieurs étapes à faire. Malheureusement elle n'avait pas sous la main le "Manuel pour jeune Iclite débutant".  Il fallait qu'elle trouve un moyen pour en apprendre plus, elle devait contacter Victor.

La jeune fille expliqua à Raenar la situation et il acquiesça sans broncher. Il revint en lui apportant du papier, une plume et de l'encre. Elle entreprit de décrire le caractère urgent de la situation, en cachant bien évidemment qu'elle était à demi prisonnière de son hôte. 

Elle tendit la lettre à son hôte, qui la lu pour vérifier sa bonne foi avant d'y apposer son sceau. Raenar la ramena à sa chambre pour qu'elle puisse se reposer. Ses vêtements étaient souillés de la terre de la pièce. Elle avait les traits fatigués et tirés à cause de la nuit qu'elle avait passée et de sa journée épuisante. Elle était escortée par des gardes, moins pour la protéger que pour être sûr qu'elle ne s'enfuit pas.

Lia entra dans sa chambre et alla se débarbouiller avant de se mettre au lit. Elle réfléchit au fonctionnement de son Don. Elle n'avait entendu que très peu de fois son père en parler. Elle avait surpris quelques conversations avec ses conseillers. Ils n'en parlaient jamais, elle et ses frères, certainement pour qu'ils n'aient jamais l'idée de s'en servir. Elle se concentra pour essayer de se rappeler ce qu'elle avait entendu lors de ces discussions.

« mâture .... Fleur ... mère ...douleur » étaient les seuls mots dont elle se rappelait. Elle était encore toute petite lorsqu'elle les avait entendu, plus elle avait grandi plus son père s'était enfermé dans son bureau, duquel il lui était formellement interdit d'approcher.

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