Chapter 13 (Dean)

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Vous savez ce qui est rageant ? Mais genre vraiment rageant ? C'est quand on a l'impression que toute la merde du monde vous tombe sur la gueule alors même qu'on est affaibli par la faim et la fatigue. Vous comprenez pas ? C'est normal, laissez moi vous raconter.
J'étais dans l'assemblée des premières années, perdu dans mes pensées jusqu'à ce que d'un coup, un espèce de poème plutôt bien improvisé, me fit réintégrer la réalité. Un chapeau assit (si on peut dire ça pour un chapeau) sur un tabouret ouvrait une sorte de bouche et chantonnait.
Tout ce passait bien et sans problèmes mais tout le monde (enfin sauf les premières années) eurent un mouvement de stupeur quand le Choixpeau (Oui, oui, c'est le nom du chapeau) déclama :
Enfin, si vous aimez la solidarité,
Si persévérance, esprit d'équipe et combativité sont vos mots-clés
Alors vous ferez parti des fiers Hurleloup
Amis qui toujours s'entraident en tout.
Laisse-moi sur ta tête un moment,
Et en ton esprit fouillant,
Je choisirai pour toi ta maison
Car le Choixpeau a toujours raison.

Hurleloup ? Attendez, je dois être encore fatigué là. Je délire. Pourtant le séisme qui avait secoué tout le château m'avait bien réveillé. Oui, un séisme avait ébranlé toute la baraque en même temps que le chapeau parlait. Je voyais aux visages des autres que je n'étais pas le seul que la stupéfaction avait touché.
Le silence régna pendant trente secondes (ça parait court comme ça, mais je vous défie de rester au moins vingt secondes dans le silence le plus total). Tout le monde se posait la question : c'est quoi ce bordel ? Mais là où c'est vraiment parti en n'importe quoi, c'est quand ils ont commencé à se poser la question les uns aux autres. Au milieu de ce chaos total, je voyais une élève qui était, tout comme moi, silencieuse. Peut-être qu'elle n'avait personne avec qui partager cette émotion inédite ou tout simplement pas envie de parler... pareil que moi en fait. Sauf qu'elle avait un gros trait noir autour de ses yeux verts qui la faisait ressembler à une gothique.
Et d'un coup, une énorme voix venant d'un petit vieux hurla :
-SILEEEENCE !
Putain ! Il savait mettre des coups de pression le vieux, la preuve puisque que la seule chose qu'on a plus entendu ensuite, ce fut l'appel des élèves. Même les
applaudissements se faisaient faibles. Du moins au début.
Je n'écoutais pas vraiment jusqu'à ce que l'inévitable arrive : la première Hurleloup se fit appeler. Si on était dans un film, on aurait vu l'arrière plan se briser comme un miroir et la laisser dans le vide. Mais, on était pas dans un film, c'était la réalité et tout ce qu'on voyait c'était son visage ahuri qui buggait. Elle était très pâle et ses cheveux noirs accentuaient ce contraste. Ses yeux étaient écarquillés. La pauvre. Elle tremblait tellement que je ne voyais pas comment elle arrivait encore à marcher. Elle se leva et elle avança jusqu'au fond de la salle comme un robot toujours avec ses yeux bleus grand ouverts. Puis la deuxième arriva (encore une fille, le Choixpeau voulait en faire une secte uniquement féminine ou quoi ?) et il se trouvait que c'était la Miss Silencieuse Et Gothique Sans
Amis de tout à l'heure. Quand elle entendit le nom de sa maison, son visage n'exprima absolument rien et elle se redressa et rejoignit mademoiselle-la-tremblotte dans un silence de mort.
Après quelques noms random, j'entendis enfin le mien. Je me m'avançai vers le tabouret et, en m'asseyant, posai le Choixpeau sur ma tête.
-Prends tes aises, mon garçon je t'en prie, murmura une voix aiguë à mon oreille, pour trouver ta maison, dans ta tête je vais devoir fouiller car tout à un prix.
Ma parole, il se prenait pour maître Yoda !
-Laisser un vieux chapeau aller dans ma tête sans rien dire ? Serai-je tombé si bas ?
-Hmm... de nature assez solitaire... devient tout de même protecteur envers sa mère...
-Oh ! C'est privé ça ! T'en a pas besoin ! lançai-je, furieux, à voix basse pour que personne ne pense que je parle au chapeau.
-Je t'assure que si, hmm... plus généralement protecteur envers tous ceux qu'il apprécie...
-Bon, j'imagine que de toute façon, je peux rien faire, grommelai-je en grinçant des dents.
-Malgré ce que tu veux prouver, tu n'as pas dans le cœur cet énorme vide que rien n'a su combler et que ton sembles aimer à croire qu'il te rend dur comme pierre. Cependant il te faudra apprendre à montrer les crocs aux bonnes personnes et tu connaîtras la liberté que tant tu affectionnes. Et cela tu l'apprendras où ?
Un mauvais pressentiment m'envahit.
-Cela tu l'apprendras chez, me chuchota-t-il avant de manquer de me détruire les tympans en braillant : HURLELOUP !

La Maison Perdue Où les histoires vivent. Découvrez maintenant