Infini

Chapitre 11 : la chute

L'observatoire était désormais fonctionnel, et une partie des rumeurs quant au rapport entre le holee et les météorites s'étaient tues. Mais Stéphane savait que la situation n'était pas réglée pour autant. Même s'il pouvait toujours contrôler certains médias et comités de recherche, il savait que de multiples spécialistes s'intéressaient de près aux chutes de météorites.

Ce n'était bien entendu qu'une question de temps avant qu'on finisse par découvrir leur origine. Il restait donc une question de taille, la question qui terrifiait Stéphane plus que tout : le holee était-il réellement en train de recracher tout ce qu'il ingérait à travers l'espace ?

Au fond de lui, le faux créateur de cette trouvaille du hasard savait que c'était évident. Aucun poulet n'avait été projeté par l'espace durant des millions d'années. Puis, quelques années à peine après que ses Industries ne déjettent des tonnes de poulet à travers un trou noir inexpliqué, le poulet se met à devenir la composante principale des météorites. On pouvait difficilement considérer cela comme le fruit du hasard.

Néanmoins, comme un mari trompé qui a accumulé mille preuves de l'adultère sans l'avoir confirmé à 100%, Stéphane n'était pas sûr de vouloir réellement trouver la réponse à la question. Pas même après avoir dépensé des milliards d'euros pour la trouver.

Mais ses angoisses n'étaient rien par rapport à celles de Maria Pergusso. La timide technicienne en chef devenue merveilleuse femme d'affaires était aujourd'hui au plus bas. Cloîtrée chez elle, elle avait été contactée par différentes agences gouvernementales, en plus de se savoir surveillée par Stéphane en personne.

Avec les fortes suspicions contre le holee, le secret de sa fabrication était passé de stratégie commerciale à affaire d'Etat. Si on était certain que le mystérieux produit n'était pas dangereux pour la santé, on ignorait toujours où il déversait les tonnes de déchets qu'il recevait. Etait-il aussi infini que Maria Pergusso voulait le faire croire ?

Désormais, le Gouvernement français voulait savoir comment était produit le holee sur son sol. Cependant, cette demande restait pour le moment officieuse, car il y avait bien trop d'enjeux pour lancer ouvertement une chasse aux sorcières.

Sans compter les nombreux soutiens politiques nationaux et internationaux de Bigart, ainsi que les lobbys qu'il contrôlait partout à travers le monde, remettre en cause le holee revenait à admettre que sa production n'avait jamais été contrôlée. Il était certain que la tête de Stéphane ne serait pas la seule à tomber. Et, pour le moment, les seuls à même de donner un coup de pied dans la fourmilière avaient trop à perdre pour cela.

Mais les espions français n'avaient eu aucun mal à repérer la principale faiblesse du Holee : sa soi-disant créatrice, Maria Pergusso, qui n'avait plus donné de conférence publique depuis plusieurs semaines.

Mélanie avait tomber le dossier sur le bureau de son patron comme un couperet. A l'intérieur, on voyait les photos de deux hommes en costume, postés à l'entrée du domicile de la conceptrice du holee. Sur le pas de la porte, ils étaient en train de parler avec elle. Les tirages avaient été faits par l'un des détectives privés employés par Stéphane, qui formaient désormais toute une équipe.

— Elles ont été prises il y a une demi-heure, annonça la secrétaire d'un ton grave. Ils ont discuté durant dix minutes, mais elle ne les a pas laissé entrer.

— Gouvernement ?

— Pas qu'un peu ! D'après les privés, il s'agit du directeur de la Sécurité Civile, Eric Tellier, ainsi que l'un de ses assistants.