Volontaire

41 15 16
                                    

Elle jeta un regard apeuré à côté d'elle et vit que son voisin ne semblait pas avoir peur. Ni même être stressé ou sembler légèrement inquiet.

Il se tourna vers elle et osa même sourire !

Se rendait-il compte de ce qui les attendait ? Elle secoua la tête, incapable de le comprendre et posa son regard sur un point fixe, loin devant elle.
Elle serra les dents pour s'empêcher de pleurer et tenta de redresser les épaules... qui finirent par s'agiter, secouées de soubresauts, dus à ses sanglots silencieux.

Elle sentir la barre se poser contre sa poitrine et ses jambes. Elle ne pouvait définitivement plus partir.

Ses gestes étaient entravés. C'était fini. Elle avait réussi à tenir. Sa résolution de se sacrifier ne pourrait plus faiblir. La machine était lancée. Ils seraient sauvés. Grâce ,en partie, à elle.

Elle eût un dernier regret en apercevant un des hommes en blanc attacher une autre volontaire alors qu'elle se débattait pour finalement partir.

Comment osait-il ? Elle était une volontaire ! Cet homme en avait réclamé pendant longtemps et s'était battu pour en avoir et ensuite les maltraitait !

Je me suis faite avoir, songea le jeune femme dans une prise de conscience soudaine.

Elle remarqua que rien ne se passait comme annoncé.

Le bruit étrange que faisait la machine dans laquelle elle se trouvait, était sensé avoir été éradiqué avant de retester l'engin.

Elle secoua la tête, désespérée par cette situation impossible dans laquelle elle s'était mise.

Tout ça pour quoi ? Pour un empereur capricieux qui n'avait pas su gérer l'économie du pays. À présent, surendetté, il avait besoin de nouvelles attractions à touristes, pour refaire tourner l'économie et rembourser ce qu'il devait.

Ce projet était lancé depuis cinq longues années. Froides, car les gens n'avaient eux non plus plus d'argent et plus de lieu où dormir. Impossible de quitter ce pays sans se faire attaquer par les militaires qui patrouillaient dans les rues.

Tristes, car il fallait des volontaires pour tester cette fameuse invention qui devait restaurer l'équilibre économique. Ces derniers étaient morts les uns après les autres, la machine défectueuse avait été leur dernière vision.

Depuis trois ans, les «volontaires» n'en étaient plus réellement puisqu'ils étaient traînés de force jusqu'ici. Cette année, l'empereur, qui jugeait dépenser trop d'argent en payant les militaires chargés de faire venir les «volontaires», avait annoncé que ce seraient que des enfants qui testeraient la machine. À moins que cette fois-ci des gens se désignent d'eux même.

La jeune femme avait cinq enfants âgés de six à quinze ans. Incapable de supporter l'idée de les voir emmenés dans cet endroit sombre, plein de scientifiques qui ne se souciaient pas de leur vie et leur confort mais juste de la rapidité de l'essai de l'année, elle s'était portée volontaire.

Elle ferma les yeux et revit le visage de chacun d'eux. Leurs visages d'anges, lui hurlant de ne pas partir. Son aîné avait même voulu y aller à sa place. Elle avait été obligée de partir la nuit alors qu'elle leur avait promis le soir de ne finalement pas partir.

Le vacarme assourdissant que faisaient la machine lui donna un mauvais pressentiment. Elle se raidit. On leur avait promis que cette année serait la bonne, qu'elle était en bon état de fonctionnement qu'elle ne faisait plus de bruit.

La jeune femme avait osé espéré que c'était vrai, qu'elle reverrait une fois encore ses enfants. Qu'elle puisse à nouveau vivre des années avec eux dans la joie.

Elle eût une pensée aussi pour son mari, décédé il y a trois ans et à qui elle avait promis de connaître le bonheur avec leurs enfants.

Elle avait connu quelques sourires. Des traces d'amour. Mais pas énormément. Quand même son cadet de six ans devait voler pour survivre comment profiter de la vie ?

Impossible. À cause de cet empereur incapable de gérer son pays.

Elle serra les poings. Elle sentaitque la machine s'était mise en mouvement. Elle repassa en boucle dans sa tête les rares bons moments. Son mari. Son fils aîné, Achille, le second, Grégory, le petit dernier Ulysse, ses deux filles Anthéa et Alinor.

Un par un. Elle sentit que la vitesse augmentait. Son cœur tambourinait​ violemment contre a poitrine qui se soulevait à un rythme affolant.

Elle était incapable de regarder devant elle. Elle regarda la foule. Les mines sombres des proches des volontaires. Ils prirent encore plus de vitesse et tout à coup, s'arrêtèrent brusquement. Ils avaient avancé sur le rail et les premiers avaient la tête en bas, la femme était à la limite de l'être aussi.

Des cris de panique de la foule, les volontaires qui retenaient leur respiration, le tout pour créer une atmosphère plus pressante encore.

Enfin un clang retentit et la machine refit le parcours à l'envers, prenant de plus en plus de vitesse. Les barres se détachèrent les unes après les autres.

La femme s'aggripa à lasienne de toute ses forces, tant et si bien que ses jointures blanchirent. Sa mâchoire était contractée et tout son corps raidi. De la vitesse. Encore plus. Clang clang clang.

Le vent qui faisait voler ses cheveux. La vitesse. Clang. Vent. Vitesse. Peur.

Boum.

La machine quitta les rails. La femme eût juste le temps de plonger son regard vers la foule et d'en croiser un bleu azur. Qu'elle connaissait si bien.

Elle s'étrangla de stupeur et ouvrit la bouche avant de s'écraser à terre. La douleur. La fin.
***

Le petit garçon fixa la machine avec terreur. Pourquoi sa maman avait l'air d'avoir peur ? Pourquoi tous le monde criait comme ça ?

Maman ! voulut-il crier quand il la vit tomber. Il vit de taches de sang apparaître sur la belle chevelure de sa maman.

Il serra contre lui le bout de tissu que sa maman avait nommé doudou pour lui.

Il hurla. Sa maman pourquoi elle saignait comme ça ?
-Maman !!!
Le cri du petit se perdit dans le vacarme environnent.
------

Quand ma plume s'égareOù les histoires vivent. Découvrez maintenant