Réparer le préjudice

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Joséphine Venazzi était furieuse et elle n'attendit pas que son mari lui permette de prendre la parole tandis que tout le clan était réuni dans la vaste demeure familiale.

- Comment cette petite peste peut-elle lancer d'aussi odieuses accusations ? Antoine,...tu ne vas quand même pas laisser cela impuni ? Il est hors de question que ces paysans répandent cette ignoble rumeur dans tout le pays ! Mon fils a été parfaitement éduqué. Et tu oublies que la vieille harpie a clairement menacé Leandru.

- Je le sais ma chérie, je le sais. Mais nous avons d'autres préoccupations.

- Je ne me laisserai pas insulter de la sorte, Cette gamine ne va pas s'en sortir comme ça !

Antoine et Joséphine Venazzi regardèrent alors leur plus jeune fils avec une certaine inquiétude. Leandru était d'un tempérament plus calme, plus réfléchi que ses frères et sœurs mais la lueur de rage qui brillait dans ses yeux inquiéta ses parents. Jusqu'à présent le clan avait toujours fonctionné avec la plus grande prudence et aucun acte n'avait jamais été commis dans la précipitation.

Cependant, à force d'entendre les médisances de sa famille au sujet des Casaleccia, Leandru avait fini par, lui-aussi, perdre son sang-froid face aux informations qu'il ne cessait de recevoir de la part de ses aînés.

- Leandru, je comprends ta colère. Mais, nous allons devoir envisager les choses différemment. Nous savons qui est leur prochaine cible à présent au vu des paroles d'Alba.

- Et ?

- Enfin, tu n'as pas compris ? C'est toi.

- Et bien, qu'ils viennent ! Je n'ai pas peur.

- Corti est trop vaste et trop étendue pour que nous puissions assurer ta protection.

- Je ne suis plus un enfant papa ! Je n'ai pas besoin d'une nourrice à mes côtés !

- Ton orgueil te perdra Leandru.

- Mon orgueil ? Cette gamine va colporter partout dans le village d'horribles ragots à mon égard et vous pensez que je vais rester là sans réagir ?

- Oui, c'est exactement ce que tu vas faire. Comme je l'ai dit, nous avons d'autres préoccupations. L'année dernière, Charles, Pasquale, Paul et Filippu ont été rappelés à Bastia pendant une grande partie de l'année suite à l'alerte qui a suivi l'annexion de l'Autriche à l'Allemagne. Si une nouvelle alerte se produit, nous nous retrouverons à nouveau avec quatre hommes de moins pour faire fonctionner nos entreprises, sans compter tous ceux qui ont déjà servi et qui pourraient être rappelés sous les drapeaux. J'ai discuté avec quelques amis hier durant ma visite à Corti. Une note serait parvenue à tous les maires de l'île pour qu'ils effectuent un recensement des hommes disponibles pour rejoindre au plus vite l'armée française.

Leandru fronça les sourcils en regardant son père : si ses dires se confirmaient, il serait effectivement très compliqué de faire fonctionner les affaires familiales. Un instant il oublia l'insolente gamine qui occupait toutes ses pensées afin de se concentrer sur les problèmes qui risquaient de surgir à tout moment pour son clan. Après de nombreuses discussions parfois houleuses, les Venazzi décidèrent à l'unanimité de laisser un instant leurs différents avec les Casaleccia pour se concentrer sur le devenir de leurs activités professionnelles.

Du côté des Casaleccia précisément, l'ambiance était tout autre. La vieille Alba n'en revenait toujours pas que le plus jeune des fils d'Antoine Venazzi ait osé la menacer aussi ouvertement. Elisabetta, quant à elle, ne digérait pas du tout la manière dont Leandru l'avait rabrouée comme si elle était encore une petite fille de cinq ans.

Cum' un cantu di libertaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant