Chapitre 1

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A la fin de la sanglante, la technologie fut détruite car elle nous avait détruis dans le passé. Elle avait causé des ravages sur notre existence mais également sur la lune, autrefois apportant le mystère et la confiance apporte aujourd'hui la crainte et la méfiance. Dans ce bas monde, les gens sont obligés de vivre par petit groupe, on les appelle les meutes. Mais il y a toujours des petits sauvageons, ou plutôt des jeunes gens qui ont pris l'initiative de partir, comme moi par exemple. Pourquoi suis je partie ? Dans chaque meute qui recouvre la terre, des jeunes gens naissent et grandisse. Ils suivent un enseignement propre a leurs caractère et a la spécialité de leur meute pendant de longues années jusqu'à leurs douze ans. Cet âge où l'enfant commence a faire preuve d'une maturité subtile n'est plus inoffensif et dénudé de sens. A cet âge, l'enfant doit faire un choix. Rester dans sa meute ou partir. Je m'étais toujours résolu à rester dans ma meute pour ma famille, pour mes amis. Mais, la veille de mes douze ans, le sommeil ne m'était pas venu. Je restais là sur un lit fait de quelques branches de bois et recouvert de mousse. Je m'étais levée, sortant de cette atmosphère de confort, entourée de mes proches pour sortir de la petite cabane de fortune. J'avais escaladé une longue parois rocheuse qui recouvrait le campement. Une fois en haut, mon souffle était court et mes mains était rouge et me brûlaient mais la douleur disparu quand je glissa mon regard ambré sur le ciel noir de jais de la nuit. Seul une brume noire recouvrait le sol, devenant de plus en plus épaisse tandis que la lune épousait ses couleurs rouges sang que j'aimais tant. J'étais née un jour de pleine lune et comme guidée par celle ci, je fis un choix ce soir là. Un choix qui changerait l'entièreté de mon destin. En contre bas de la falaise que j'avais gravis un regard noir se posa sur moi. Ce regard, je ne l'oublierais jamais. L'herbe où j'étais assise épousa des couleurs pourpres avant de se soulever délicatement au grès de la légère brise qui planait. Je savais, je savais ce que je devais choisir et faire. Je devais partir. Aujourd'hui, ça fait si longtemps que je n'ai pas côtoyé d'humain. Quand je remarqua que je me remémorais encore ces douloureux souvenir, je plongea a nouveau mon regard dans la lune resplendissant de ses couleurs rouges.
"Joyeux dix neuf ans, Eïla."
Je me levais comme il y a sept ans, contempla la lumière de la lune avant de détourner mon regard pour le poser sur la grotte où je vivais. L'épaisse mousse verte épousait les parois basses de la petite grotte tandis que les branches des arbres les plus bas frôlaient son sommet. La roche grisâtre était devenue Noir avec le manque de lumière. J'avançais sur le sol de gravier où je m'assis. J'attendais le bon moment. Un petit bol, où du moins ce qui pouvait s'y apparenter, trônait à côté de moi. Deux morceaux de silex s'agitaient dans mes mains. Je les faisais tourner, les envoyais en l'air pour les rattraper. J'observais le bol rempli de miel et de cire pour pouvoir m'en servir de lanterne quand la lune déclinerait trop. J'avais encore et toujours la tête dans les Nuages quand je pensais à cette meute, cette meute où j'eus pour seul enseignement l'arc. Ils m'avaient jugés a ma naissance, me qualifiant d'une fille discrète, agile, rapide et vive. Seulement la seule raison pour m'avoir enseigné la fabrication, l'utilisation, et comment chasser avec un arc était ma capacité a agir selon mon besoin au lieu de celui d'autrui. Trois compétences que je n'avais jamais oublié depuis mon départ. Mon arc trônait dans mon dos, attacher avec une lanière de cuir que j'avais récupérer à mon départ. Le sol se couvrit petit a petit d'une brume sombre et noire. Je levais lentement les yeux au ciel, dévisageant une nouvelle fois cette lune si mystérieuse. Les luniers ne voyaient pas la lumière mais l'odeur du feu les rebutaient, je le savais par expérience. Alors, je frottais rapidement les silex l'un contre l'autre, regardant ma planque de chaque lune. Un grand rocher m'abritait des regards indiscrets et des flèches parfois jetées par les luniers qui espèrent entendre un gémissement. Un énorme étincelle finit par se former dans le bol, enflammant le mélange. Un sifflement se fit entendre avant qu'une flèche au bout aiguisé fendit l'air a quelques centimètres de moi. Apprends a viser, maintenant tu vas le regretter. S'en suivi un bruit froid, elle s'était écrasée contre la roche. J'eus pour seul réflexe de rouler derrière ma planque le plus vite possible. Je repris mon souffle, coupé par la surprise avant d'analyser au bruit la position du traqueur. Je me focalisais sur un lieu, une branche d'arbre à plus d'un mètre du sol. Je réfléchis encore un peu, je n'avais que quelque seconde pour décocher une flèche. Elle zébra le ciel avant de laisser pour seul bruit un cri de douleur. Un bruit sourd rompit les gémissements. Je souriais, cet imbécile était bien dans un arbre. Mon ouïe ne me trompait jamais. J'encochais une nouvelle flèche, mais je n'entendis aucune autre présence. Je restais sur mes gardes quand je m'approchais de l'inconnu, ma fidèle cape sur les épaules et ma capuche toujours sur la tête. Ma corde était détendue, mais il ne me faudrait qu'une seconde pour l'achever. Je pointais le bout de mon arc vers son visage lui demanda simplement.
"Que fais tu ici ? Qui es tu ?"' Il lâcha pour seule réponse une espèce de grognement marqué par la douleur. La brume noire ensevelissait le bras  gauche du jeune homme, me souvenant alors de la lune de sang. Sans perdre de temps je déchirais un bout de son vêtement. Je brisais la flèche enfoncée dans sa paume et je me mis à serrer durement le bandeau pour stopper le saignement. Pendant que je stoppais ce qui pouvait causer ma mort je m'attardais sur lui. Un jeune brun aux sourcils épais et secondés de ses yeux noisettes. Autant par la forme que par la couleur. Il était vêtue de noir de haut en bas. Il avait une épaisse cape sur les épaules, une tunique aux broderies blanches et des manchettes identiques aux miennes. Elle ne recouvraient pas la paume de sa main, juste le dos jusqu'aux premières phalanges. Un large pantalon englobait ses jambes musclées avant de finir dans des bottes qui lui arrivaient à la moitié de la jambe. Finissant mon analyse je passais un bras du garçon sur mon épaule avant de le traîner jusqu'au fond de ma grotte, là où quelques pierres étaient superposées. Je le lâchais brutalement, le laissant s'écraser contre le gravier. Je courus alors, attrapant le bol de miel que je n'avais pas encore utilisé. J'effectuais un arc de cercle autour de l'entrée, étalant la substance. J'en étalais sur une de mes flèches, la passa au-dessus du bol enflammé pour l'embrasé avant d'incendier l'arc de miel. Lors de son envol la flèche avait mélangé sifflement et crépitements, s'écrasant en plein dans la cire qui n'avait pas tardé pour élever de larges sillons de feu au-dessus d'elle. J'espérais juste  ne pas étouffer ici. Le jeune homme remuât alors sur le sol. Il cracha un juron inaudible avant de parvenir à s'asseoir. Je le regardais, non sans le dévisager avec haine de mon regard voilé par ma capuche. D'un ton froid je lui reposais les deux mêmes questions auxquelles il n'avait toujours pas répondu. Il me regarda, tenta de plonger son regard dans le mien. Mon corps fin et ma petite taille ne devait pas l'impressionner. Ma cape voletait au-grès des légères brises qui parvenait encore au fond de la grotte. Mes poings étaient serrés et englobes dans mes manchettes. Ma tunique  marron aux coutures blanches surplombaient mon bas blanc serré. Mes bottes montaient à mes genoux et tout comme ma tunique, marron. Mon précieux carquois séjournait sur mon dos et ma main droite tenait fermement mon arc. Dans le bas de mon dos, attaché à la lanière de cuire qui abritait également les attaches pour mon arc et mon carquois, se trouvait ma dague. Elle pourrait m'être utile en combat rapproché. L'homme finit par répondre.
"Je réponds au nom de Martin. J'étais un éclaireur pour la Nocturne."
Ce nom, la Nocturne. La meute où j'avais vécu. Et Martin, n'était ce pas-là le jeune homme âgé de deux ans de plus que moi qui m'avait toujours pris de haut, refusant d'admettre qu'une fille pouvait s'avérer son égale ? Mes poings se serrèrent un peu plus quand il me retourna la question. D'un regard noir et d'une voix encore plus froide je lui crachais.
"Eïla, Solitaire."
Je ne voulais pas tout lui révéler. Qui était il réellement, ce dénommé Martin ou un autre ? Le doute me hantais. Il pointa du doigt la capuche et d'une voix calme me demanda de la retirer. Je lui avais brusquement répondu.
"Pourquoi le ferais ? "
"Une simple question de politesse." Avait il rétorqué.
"Me tirer dessus n'est pas très poli non ? " Avais je lancé toujours aussi froide avant qu'il ne réplique.
"Me transpercer la main non plus."
J'hallucinais, il avait ouvert le feu et c'était à moi de m'excuser. Je pointais du doigt son autre main en lui demandant s'il voulait vraiment que j'en fasse de même avec l'autre. Il me répondit d'un mouvement négatif de la tête. Je quittais alors son regard, me concentrant sur l'extérieur de la grotte. Je mis un genou à terre, exténuée avant d'encocher une flèche, mais en gardant l'arc bas. Un raclement de roche me fit comprendre qu'il avait attrapé quelque chose. Aussi rapidement que je pus, je pivotais sur moi-même lui faisant face. La corde était tendue, je le regardais, il en faisait de même son arc en main. Mais aucune flèche n'était encochée. Encore une fois, j'eus pour réflexe de tirer sur son autre main qui tenait l'arc. Il lâcha un effroyable cri de douleur qui ne me fit ni chaud ni froid. Il poussa l'arc d'un coup de pied. J'en déduisais qu'il avait compris. Il me demanda alors entre deux gémissements de douleur.
"Quand pourrais je rejoindre ma meute ?
"Tu pourras une fois la lune de sang passée. Du moins si tu es encore un vie."
Lui répondais je d'un ton plus calme mais ne dissimulant pas mon sourire. Je n'avais aucune envie qu'il reste ici. La nuit passait lentement, a deux ou trois heures d'être achevée, Martin dormait. Je guettais la moindre trace de lunier. Je connaissais une sortie d'urgence que je savais utile dissimulée derrière des rochers. Je m'en étais servie a deux reprises. J'espérais juste que cette nuit, elle ne me servirait à rien. Et bien pas de chance, l'odeur du sang des mains blessés de Martin avait dépassé leurs peurs du feu. Tout commença par les craquements de leurs pas sur le sol de gravier. Je réveillais le jeune homme lui demandant de ne pas faire de bruit. Contre toute attente, tout s'arrêta, mais il fallait que ça arrive, l'un d'entre eux traversa la barrière de flamme. Décochant une flèche sur lui en plein dans l'orbite gauche, le lunier s'écrasa au sol. J'hurlais à Martin de débloquer le chemin de secours. Après un bref moment d'hésitation, il s'exécuta. Délogeant les roches du passages il se mit à courir. Je continuais flèche par flèche a tirer sur les luniers avant de reculer. J'attrapais dans ma fuite un bâton que j'avais déposé dans la grotte. Je le plongeais dans le mélange avant de lui faire rencontrer les flammes. Je me mis à courir à mon tour dans le tunnel, torche et arc en main, dague dans le dos et carquois a l'épaule. Martin trottinait devant moi, je le rattrapais facilement avant de lui saisir la main. Main libérée par mon arc rangé dans mon dos. Prise par l'élan je l'entraînais plus rapidement malgré ses cris de douleurs, il se débattit et me fit rompre ma saisie mais il se maintenu a ma hauteur. Mais, alors que nous courions, ma capuche glissa en arrière dévoilant mon visage. Mon visage fin aux pommetés légèrement rebondis, des yeux noisettes à la couleur noire et aux reflets ambrés, plus que visible, et aux éclats bleus dansant au centre de ma pupille. Mes sourcils étaient fins rattrapés par mes cheveux noirs de jais qui arrivaient au-dessus de mes épaules et noués d'un ruban bleu en une espèce de chignon. Je n'y prêtais pas attention malgré le regard pesant de Martin sur moi. Derrière nous j'entendais des fracas de roche. Glissant un long regard à Martin je stoppa ma course, encocha une flèche rayonnante de poudre noire. Je jetais au loin ma torche qui stoppa les luniers puis je tendis la corde de mon arc. Je soufflais longuement avant de retirer mes doigts de la corde. J'hurlais à Martin.
" A terre !"
Il s'exécute tandis que je faisais de même, une flèche encochée au cas où. Une explosion retentit dans toute la grotte. Je rabattais ma capuche sur mon crâne avant de me relever, les flammes de l'explosion passée. Je regardais devant moi, dos à Martin. Les roches étaient tombées à l'endroit voulu, ensevelissant les luniers. Je rejoignais Martin en trottinant. Je lui tendis la main qu'il saisit pour l'aider à se relever. Nous nous élancions alors hors du tunnel découvrant à la sortie le ciel bleu nuit naissant, le rouge avait disparu. Mais je n'eus pas le temps de faire un pas en avant que quelque chose vienne s'écraser sur ma tempe. Je tombais en arrière, presque inconsciente. Les yeux a moitiés ouverts, je vis Martin jeter quelque chose à terre et me hisser sur ses bras. Je ne parvenais pas à bouger, j'étais Comme paralysée. Je finis par sombrer dans l'inconscience au bout d'une poignée de seconde.

Eïla et les LuniersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant