Chapitre 1 Premier contact

Depuis le début
                                    

Je me suis bien gardée de la sortir chez mon père hier soir. Priscilla, mon adorable demi-sœur, un croisement entre Paris Hilton et la méchante reine de Once upon a time, aurait été capable de faire son shopping dans mes affaires.

Enfin. Suite à cet incident face à la direction auprès de laquelle il aime à faire bonne impression, papa a décidé, en douce de l'autre sorcière, de m'allouer une petite rente mensuelle. Il dépose l'enveloppe au secrétariat, sans prendre le temps de s'arrêter, bien sûr. Mais ces espèces me permettent de me gâter un peu. En y repensant, je le plains presque. Dès que je suis dans les parages, il est pris entre deux feux. C'est pour ça que je ne rebelle pas davantage. Car je sais que la situation est difficile pour lui. Quand je pense à ça, je vois instantanément le regard furibond de Leslie. Elle me trouve trop conciliante. Selon elle, mon père est un adulte et refaire sa vie ne le dispense pas de veiller sur moi. C'est l'un des seuls sujets où on s'oppose systématiquement.

Je le défends toujours, peut-être parce que je n'ai plus qu'un parent et que je dois composer avec lui, avec ses forces comme ses failles. Parce que je n'ai pas le choix !

La route m'a paru interminable, tant le silence était épais entre mon père et moi, dès lors qu'il m'a assenée quelques remarques de savoir-vivre. Selon lui, ma grand-mère est pleine de principes et ne tolèrera aucune insolence. A moi d'être assez facile à vivre pour ne pas me faire chasser, car ça priverait mes frère et sœur de leurs vacances et surtout, comme il l'a rappelé avec un regard lourd, ça ne m'ouvrirait pas la route de Biarritz bien au contraire. Une excitation inquiète n'a cessé de croître face à l'inconnu de ces vacances. A quoi ma grand-mère ressemble-t-elle ? Je l'imaginais vieille, ridée, avec une coiffe, peut-être ? Toutes ses dents ?

Au cours des dernières semaines, avec Leslie, on a passé des heures à l'imaginer en passant d'un extrême à l'autre, de la grand-mère hippie à la version plus rock'n'roll en passant par la bourgeoise ou la traditionnaliste. Mais à quelques minutes de la rencontrer, je n'en mène pas très large. Mon inséparable le sent certainement. Malgré l'heure de mon départ, six heures pour ne pas perdre trop de temps, elle est au rendez-vous. Pendant que la route défilait, on a échangé des tonnes de messages. Je lui raconte que personne ne s'est levé pour me dire au revoir, qu'elle me manque déjà, que je suis un peu stressée de ce qui m'attend.

[Une famille de rêve avec des cousins tellement beaux que tu vas m'en présenter un qui sera l'amour de ma vie, des crêpes et un très très beau breton pour toi ! ] Répond-elle comme elle me le dit depuis des jours entiers pour me remonter le moral.

Je ne peux retenir un petit rire avant de lui répondre que, vu nos lieux de vacances respectifs, elle a plus de chances que moi, statistiquement, de rencontrer un beau garçon. Sans compter qu'elle les attire comme des mouches. C'est logique ! Elle est ravissante, avec sa peau mate, ses cheveux sombres et son regard d'un bleu intense et surtout, elle est tellement à son aise que tous les regards se tournent instantanément vers elle.

[Statistiquement ??? Sterenn, si tu continues à me sortir des insultes, je monte sur le champ te botter le train ! On est en vacances ! On en a fini des maths et tu as deux mois pour te concentrer sur ce qui te plaît vraiment ! Alors tu bannis tout de suite les mots matheux de ton vocabulaire ! Non mais, sérieusement Ste, il faut tout te dire !]

Sa fausse colère m'a fait rire. A côté de moi, papa a froncé les sourcils.

-Leslie ?

J'ai haussé les épaules. Qui d'autre ? Pas comme si les amies se bousculaient au portillon. Bizarrement, être personna non grata chez soi a l'air de se répercuter dans ses relations avec les autres. Et puis, Leslie et ses parents m'apportent tout ce dont j'ai besoin. Pourquoi chercher plus loin ?

Un été pour une vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant