Chapitre 3 : Étrange rapprochement

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Contrairement à d'habitude, je commençai le travail beaucoup plus tard et quittai mon appartement aux alentours de vingt heures. Jamais je n'étais partie de chez moi après la tombée de la nuit, ce qui était loin de me rassurer.

Lorsque je montai dans ma voiture, j'eus comme l'impression d'être épiée et qu'un psychopathe allait me sauter à la gorge. Mais il n'y avait personne, ce qui ne calma pas pour autant mes angoisses. À ce moment précis, je voulais partir le plus rapidement possible et me retrouver dans un lieu un peu plus sécurisé. Le restaurant n'était pas le meilleur lieu, pourtant, ça pouvait faire l'affaire l'espace d'un instant.

Cependant, mon besoin de fuir fut rapidement interrompu quand ma voiture refusa de démarrer. Évidemment, il fallait qu'elle tombe en panne exactement à ce moment et j'allais encore devoir appeler quelqu'un à des heures aussi tardives. Je fis alors tomber ma tête sur le volant, désespérée, mais me redressai aussitôt en entendant le bruit du klaxon et mon regard croisa celui de Merle par la vitre. Étrangement, il m'adressa un bref sourire.

Je sortis de ma voiture et constatai qu'il était juste à deux pas de ma voiture.

— Un problème sur ta voiture ? m'interrogea-t-il.

— En effet, répondis-je timidement. Comment tu l'as deviné ?

— Tu n'aurais pas écrasé ta tête sur le klaxon, lança-t-il d'un air amusé.

Je me sentais idiote, vraiment, même pire. Il m'avait vu agir ainsi alors que j'étais persuadée qu'il n'y avait aux alentours. Je ne pus m'empêcher de lâcher un rire nerveux accompagné d'un "ha ha" alors que je ne trouvais absolument pas ça drôle, mais juste gênant.

— Tu veux que je te dépose quelque part ? me proposa-t-il, ignorant mon court moment d'embarras.

— Je n'aimerais pas te déranger...

— Je suis en avance, ce n'est pas un rapide détour qui va m'embêter.

Pour la première fois depuis que je le connaissais, il me paraissait bien plus amical. Mais quelle bête avait bien pu le piquer ainsi ? J'avais comme l'impression que Jian avait eu une conversation avec lui. C'était aussi la seule explication qui m'avait traversé l'esprit dans l'immédiat.

Nous nous installâmes rapidement dans sa petite voiture et je lui indiquai le chemin vers mon lieu de travail. Visiblement, il semblait connaître le coin.

— Jian m'a un peu parlé de toi, lança-t-il pour combler le vide.

Ha ha ! Je le savais ! En même temps, Jian était une vraie pipelette incapable de se contenir. En tout cas, je savais à qui je ne devais pas confier mes secrets.

— Alors comme ça tu penses que je te déteste ? continua-t-il avec un léger rire.

Et voilà que j'avais vraiment envie de me cacher. J'aurais préféré que Jian omette cette partie, mais elle avait vraiment tout dit et c'était assez déstabilisant.

— Ce n'est pas grave... Elle m'a rapidement fait comprendre que j'étais trop "fuyant". C'est le mot.

Il laissa échapper un petit rire. Ça avait l'air de l'amuser, tant mieux, parce que ce n'était absolument pas mon cas. Cette fois-ci, c'est moi qui voulais fuir, et aussi parce que son côté social me surprenait beaucoup trop, quitte à ce que ça m'inquiète.

— Elle t'a parlé d'Anna, je suppose ? poursuivit-il en laissant échapper un bref soupir.

— Oui. Vite fait.

— Évidemment...

Son visage s'était aussitôt assombri lorsqu'il avait prononcé son nom. Visiblement, il était encore en deuil. D'ailleurs, j'ignorais même depuis combien de temps elle était morte et je n'osai pas demander. Je ne voulais pas paraître indiscrète, surtout lorsqu'il s'agissait d'un sujet sensible.

Le Corbeau et la Colombe - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant