5.

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Je me suis finalement calmée. Appuyée contre le mur à ma gauche, j'attends que le temps passe. Je ramène mes genoux contre moi et les entoure de mes bras avant de poser mon menton dessus. Je n'ai prononcé aucun mot, ni fais aucun geste qui pourrait attirer l'attention. Je préfère de loin me faire oublier plutôt que de vivre à nouveau cet épisode terrifiant. J'aurais pu y passer. J'aurais pu mourir d'une balle dans la tête. Je tremble encore légèrement et je fais tout pour ne croiser le regard de personne.

A la place, je regarde l'extérieur à travers le décalage entre le rideau et la fenêtre. Quatre voitures sont garées en vrac devant le bâtiment. Une quinzaine de policiers sont présents. D'autres hommes sont vêtus de gilets pare-balles et sont visiblement prêts à intervenir n'importe quand. Un policier fait de grands gestes en montrant la banque puis il montre un écran d'ordinateur. D'ici, je ne vois rien si ce n'est une page remplie de caractères noirs.

J'en viens à me demander si ces hommes ne seraient pas des habitués des braquages de banques. Si tel est le cas, soit ils ont vraiment très mal prévu leur coup, soit ils ne sont vraiment pas faits pour ce genre de choses.

La force de l'ordre semble réfléchir intensément à comment agir et j'espère qu'ils vont rapidement trouver une solution.

Je détourne légèrement le regard pour le poser sur un arbre. C'est idiot mais là, maintenant, il est mon seul échappatoire. Ses feuilles virevoltent doucement sous l'effet du vent. Nous sommes au mois d'avril et l'air se réchauffe à Bordeaux. Quelques fleurs roses pales ont leurs places sur les branches. Son tronc est imposant et ses feuilles vertes. Un autre jour, je serais passée à côté sans le voir. Mais, aujourd'hui, la force et l'équilibre qu'il dégage me redonne espoir de sortir ici saine et sauve.

- Ethan, arrête, gronde un homme derrière.

Il s'agit de l'enfant qui pleurait tout à l'heure et de son père. Ils devraient faire sortir les enfants. Ils n'ont pas à vivre ça. Ils n'ont pas le droit de leur retirer leur innocence ainsi. Ces enfants n'ont rien demandé. Je suis quasiment certaine qu'ils n'avaient même pas envie de venir à la banque avec leurs parents. 

Je me souviens, lorsque j'étais petite, il n'y avait qu'une seule raison qui faisait que je voulais aller à la banque avec mes parents. Pour entrer dans le bâtiment, il fallait appuyer sur un bouton jaune, entrer dans le sas et attendre que la première porte se soit fermée pour appuyer sur l'autre bouton et enfin entrer dans la banque. Ce que faisait ma mère par la suite, je n'en avais pas grand chose à faire, je voulais simplement appuyer sur ce fameux bouton.

Il arrivait qu'un enfant le fasse avant moi. Ce moment était toujours décevant pour moi puisque du coup, cela ne servait à rien que je sois venue. C'est totalement puéril mais, je le fais encore aujourd'hui, toujours avec un petit sourire nostalgique. Même à 25 ans, ce genre de chose me fait toujours sourire.

Je tourne la tête vers l'intérieur de la banque et perds immédiatement mon sourire. L'extérieur semble tentant mais l'intérieur désenchante très rapidement. Les trois hommes ont récupéré les chaises normalement utilisées pour le coin d'attente, à côté du distributeur de boissons. Je vois qu'ils se mettent à l'aise. Quant à nous, nous sommes assis à même le sol depuis deux heures je dirais, selon l'horloge face à moi. Mes jambes commencent à être engourdies mais je ne peux rien faire au risque de m'attirer à nouveau leurs foudres. Ils discutent entre eux mais je n'entends rien.

Un enfant commence à pleurer : Ethan comme l'a appelé son père tout à l'heure. Et, c'est en cascade que les autres commencent à faire de même. Je ne sais pas ce qui a déclenché ces pleurs mais, ils ne s'arrêtent plus quoi que leurs parents fassent. Dan, Stephen et Cédric ont beau tenter de les calmer, rien n'y fait. 

Retrouvailles impromptuesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant