Ils

1.1K 53 0
                                    

    Il fait jour, et je n'ai plus peur. Je n'ai plus peur parce que quand il fait jour, il y a de la lumière, et dans la lumière, Ils n'existent pas. Le jour, je suis serein, mais je n'ose pas dormir, de peur que l'endroit où je dors soit plongé dans le noir.

    Je m'appelle Maxime, j'ai eu 18 ans en Janvier, et j'habite dans un trou paumé en Gironde. Je ne sais plus trop où en parler, ni à qui en parler, alors je vais poster ce message un peu partout où je peux. Je crois avoir tout essayé, c'est un peu mon dernier espoir. J'en ai parlé à mes parents au début, mon petit frère s'est moqué de moi, et eux m'ont remonté les bretelles en me disant que j'étais trop vieux pour avoir peur du noir, que j'étais ridicule, et que j'allais effrayer ma petite sœur.

    J'ai tenté d'en parler à mon médecin, qui m'a réorienté vers un psychologue qui m'a décelé un manque de sommeil entrainant une paranoïa, et m'a prescrit des somnifères. Bien sûr, je ne les ai pas pris. Si je dors, je sais très bien qu'Ils vont m'avoir.

    Je vais tenter de tout reprendre depuis le début, même si ma mémoire est lourdement altérée par mon manque de sommeil. Tout a commencé un soir de Mars, vers 3 heures du matin, je me suis réveillé. C'est là que je les ai vus... Ils étaient tous là, penchés sur moi, à me regarder. J'ai tenté de hurler, de bouger, mais j'en étais incapable. J'ai passé quelques longues minutes immobile, paniqué, et lorsque dans un sursaut j'ai réussi à me réveiller, et à allumer la lumière, Ils avaient disparu.

    C'était trop réaliste pour être un rêve, mais je ne croyais pas ce que j'avais vécu. Après une recherche sur Google, j'ai trouvé ce que je pensais – à tort – être mon mal. La « paralysie du sommeil ». J'étais bloqué physiologiquement, et mon cerveau, à demi dans le rêve, hallucinait. Pas inquiété, et même curieux, j'espérais que le phénomène se reproduise prochainement, pour que je puisse voir en détails ce qu'il cause.

    Et le phénomène s'est reproduit deux semaines plus tard. Puis encore une semaine. Puis trois jours. Et puis tous les jours de la semaine. J'étais mortellement inquiet, j'avais peur d'avoir un problème mental, et d'être en train de devenir fou (Mais je ne suis pas fou, même si c'est ce qu'ils disent tous). Un soir de fin Avril, alors que je rentrais chez moi, décidé à prendre ces somnifères pour enfin pouvoir dormir, le bus scolaire a eu un accident, et je n'ai pu arriver à la maison qu'à 22 heures.

    Sur la porte, un post-it : « Nous sommes chez tes grands-parents, nous rentrons dans la nuit ». Je suis rentré, ai éparpillé mes affaires, et ai fait cuire des pâtes (Ou un œuf, je ne sais plus... Mais ce n'est pas important). D'un coup, dans un grésillement, un fusible a sauté. C'est là que je les ai sentis. Ils étaient là, autour, Ils arrivaient, et Ils n'étaient plus immobiles... Ils me cherchaient. Je pouvais les entendre... Les sentir venir vers moi. Aussitôt, j'ai sorti mon téléphone, et ai allumé la puissante lumière. Ils n'étaient plus devant moi, mais je les voyais, à la lisière entre la lumière et l'ombre, déambuler, cherchant un moyen de m'atteindre.

    Je suis descendu au sous-sol, et ai rallumé le courant en changeant le fusible. Ce soir-là, je n'ai pas dormi. Je suis resté allongé sur mon lit, la lumière allumée, la peur au ventre. Je tremblais, suant dans mes draps, serrant mon téléphone comme mon dernier espoir. J'ai bien tenté de les photographier, mais bien sûr, on ne les voit pas puisqu'ils sont dans l'ombre. Mais moi je sais qu'Ils sont là, je les ai vus.

    Le mois de Mai a été horrible. Je dormais uniquement en cours, ou à l'infirmerie. Chaque soir était une traque, j'étais devenu une proie. Plusieurs fois, j'ai manqué de m'endormir, et je me suis réveillé aussitôt, paniqué. J'avais toujours sur moi mon téléphone, son chargeur, une dynamo, un briquet, et une maglight. Le jour, j'étais amorphe. Après m'être fait renvoyer de cours plusieurs fois, mes parents ont pris contact avec un centre spécialisé pour m'interner.

    Si je vais là-bas, je serais confiné dans une cellule molletonnée, plongée dans le noir, et s'en sera fini de moi. Ils m'auront. J'ai peur, trop peur, Ils sont dans chaque ombre, dans chaque recoin obscur, partout. Ils vont m'avoir. J'ai vraim

    J'ai perdu le fil, la lumière a grésillé, j'ai sursauté. Je tremble, je n'arrive plus à me concentrer sur rien, Ils sont là, juste derrière la porte du placard. J'ose à peine cligner des yeux, de peur que la lumière s'éteigne à ce moment précis.

    Je prie pour trouver une solution, je ne veux pas aller à l'asile, je ne veux pas mourir.

Don't Read at Night | Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant