Chapitre 40

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Giulia,
août 2022

Aujourd'hui encore, le soleil tape fort et Pierrot nous a proposé une sortie en quad pour rejoindre la plage d'Arone.

Lorsqu'on arrive, on défait nos casques et marchons jusqu'à la plage déserte. La route a été poussiéreuse, et j'ai failli vomir plusieurs fois à cause de la conduite désastreuse de Mehdi, mais la vue en vaut la peine.

- Le dernier à l'eau c'est une pute, hurle Adrien en se jetant à l'eau.

Les garçons foncent à l'eau en riant, éclaboussant tout sur leur passage. Sophia et moi, plus raisonnables, prenons le temps d'installer les serviettes. On sort à manger, et une fois l'excitation de la baignade retombée, les garçons nous rejoignent pour pique-niquer. On dirait que c'est nos enfants.

L'après-midi s'étire sous le soleil brûlant. On bronze, on se baigne, les garçons improvisent une partie de volley sur le sable chaud, se disputent sur les règles du jeu.

Avec Mathieu, on se taquine, on se regarde, on se sourit. On retrouve doucement notre complicité, sans même parler. 

En fin d'après-midi, quand on rentre à l'hôtel, tout le monde se dit « à toute à l'heure », puisqu'ils ont prévu de dîner ensemble au restaurant ce soir. Moi, j'ai prévu de voir Elise et Sophia, alors je lance : 

- À demain !

Mathieu se retourne et fronce les sourcils.

- Tu viens pas avec nous ce soir ?

- Non.. je mange avec mes copines.

Il hoche la tête tandis que Mehdi hausse les sourcils.

- T'es nulle... il ajoute.

- Profite bien, Giugiu, me lance Pierrot en me faisant un clin d'œil. 

Je sens le regard de Mathieu sur moi quand je tourne les talons. Il est déçu, je crois, et au fond ça me fait plaisir.

Je file me doucher et je me fais toute belle pour rejoindre mes copines au restaurant.

Lorsque j'arrive, le soleil est en train de se coucher. C'est trop beau, et ça me fait du bien d'être entre filles après une journée entourée de tous ces garçons.

On discute un peu d'Elise, de son mec, puis rapidement le sujet dévie sur Manon. Elle a essayé d'envoyer un message aux filles pour se faire passer pour la victime. C'est mal les connaître.

- Et avec Mathieu.. alors ? ose demander Elise.

Je lève les yeux de mon verre de vin blanc.

- J'ai parlé avec lui hier, il m'a expliqué ce qui s'était passé cet hiver, et pourquoi il a eu ce comportement.

- Et alors ? C'était une excuse valable pour te laisser sans nouvelles ?

J'hausse les épaules à nouveau.

- Pas vraiment.. c'est juste que ça m'a permis de comprendre. Il a vécu un enchaînement d'événements, et il a préféré s'éloigner plutôt que m'en parler.

- Au moins il t'a donné une explication.. mais si dès qu'il y a un problème, il fuit, c'est clairement pas la solution.

J'acquiesce. Elle a raison et j'en suis bien consciente.

- Ouais, pas faux ajoute Sophia. Mais si t'avais vu comme il la regardait cette après-midi... Les yeux de l'amour, j'te jure. Il a les cœurs dans les yeux comme dans les films. Puis même, il s'assure toujours que ça va, quand on marche il lui portes ses sacs, sur le quad il faisait que d'se tourner pour la regarder et voir si ça allait.. c'est pleins de petits gestes, mais vu de l'extérieur c'est évident.

Je souris malgré moi.

- T'envisages de te remettre avec ? demande Elise.

Je pince mes lèvres. J'aimerais leur dire que non, que j'ai tourné la page, que je suis forte et que je ne replongerai pas. Mais ce serait un mensonge.

- Je sais pas. J'aimerais pouvoir lutter, faire genre que j'm'en fous, que c'est trop tard... mais j'peux pas. Quand il est là, c'est plus fort que moi. J'suis attirée.

Je me tais un instant, puis ajoute d'une voix plus basse :

- Et puis, on lutte pas contre l'amour.

Elise pose une main sur mon bras et finis par me sourire.

- T'as raison, en vrai. Si c'est ce que tu ressens, faut pas forcer.

Je souris. Je connais assez Elise pour savoir qu'elle est méfiante vis à vis de Mathieu, et que si c'était elle à ma place elle n'aurait pas pardonné de si tôt, mais c'est plus fort que moi. J'ai envie de le faire galérer et en même temps, je connais l'issue finale, alors je me dis que c'est une perte de temps de lutter contre mes sentiments.

Quand je rentre chez moi, il est tard. Les lumières de la terrasse de l'hôtel sont tamisées, l'endroit est silencieux. Mais en levant les yeux vers la piscine, j'aperçois une silhouette. Mathieu. Il est assis sur un transat, une clope à la main, perdu dans ses pensées.

Je m'arrête une seconde, hésite. Puis, sans trop réfléchir, je monte les marches et le rejoins.

- Je peux ?

Il tourne la tête vers moi et hoche la tête en exhalant une bouffée de fumée.

- J't'en prie.

Je m'installe à côté de lui sur le transat voisin, m'allonge et lève les yeux vers le ciel.

Mathieu écrase sa cigarette avant de s'allonger à côté de moi. Ça me rappelle notre première soirée tous les deux à regarder les étoiles sur la plage.

Personne ne parle, on profite du silence de la nuit et de la lumière des étoiles. J'ai pas envie de gâcher le moment.

- T'sais que, comme pendant six mois j'étais bloqué chez moi, j'ai eu l'temps de lire ton livre.

Je tourne la tête vers lui, surprise. J'avais presque oublié que je lui avais passé L'alchimiste.

- C'est vrai ?

Il hoche la tête.

- Alors, t'as bien aimé ? je demande.

- Hm.. j'ai kiffé. Il m'a fait penser à toi.

J'hausse les sourcils, amusée.

- Ah bon ?

- Ouais, t'sais la meuf du désert là, Fatima. Elle dit au gars qu'elle l'aime mais qu'elle le retiendra pas, que si leur amour est véritable alors ils se retrouveront. Elle force rien, et au final ils s'retrouvent ensemble, parce que c'était écrit.

Je ne peux pas m'empêcher de sourire.

- T'y crois, toi ? il demande.

- Ouais, je pense que si deux personnes sont faites pour être ensemble, elles se retrouveront.

Il sourit lui aussi. On se dévore du regard et pourtant, j'ai pas envie de céder. J'ai pleuré pendant des mois et je ne veux pas l'embrasser dès la première occasion comme si tout ça n'avait jamais eu lieu.

- J'te jure quand j'ai lu le livre, j'me suis dit que ça ressemblait trop à ma vie. Et c'est carrément un signe que ce soit toi qui me l'ai donné.

Il marque une pause, puis reprend :

- Santiago il s'tape mille galère dans son voyage, tout ça parce qu'il pensait trouver son trésor à l'autre bout du monde alors qu'en vrai, il était sous ses pieds depuis l'début. Et en même temps, il aurait jamais trouvé son trésor s'il avait pas fait tout ce voyage.

J'acquiesce, intriguée de voir où est-ce qu'il veut en venir.

- P't'être qu'il fallait que j'me perde un peu moi aussi, avant d'me rendre compte de c'que j'avais sous les yeux.

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déjaaaaaa

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