Rosehill

Chapitre 6

Vous connaissez ces moments où vous ne pouvez plus lutter contre le fil de votre destin ?
Ces instants où il ne vous reste plus qu'à accepter ce qui va suivre, sans pouvoir rien y changer.
Quand votre vie repose dans le creux de la paume d'un autre.

C'est exactement ce que je ressens actuellement.

En seulement deux mots, j'ai compris que le sort de ma vie ne m'appartient plus.

Une humaine.

Je ne sais pas comment, mais il détient l'information qui pourrait effacer mon existence d'une facilité peu conventionnelle que ça en devient presque inimaginable.

Il continue à me jauger de haut en bas, un rictus sarcastique au coin des lèvres. Ses yeux gris se plissent, attendant ma réaction.

S'il a déjà tenté de me tuer en pleine épreuve, je suis persuadée que cela ne le dérangerait pas de recommencer, épreuve ou pas.

Cette fille m'avait assuré que j'étais plus ou moins "en sécurité", car, en dehors des épreuves, tuer quelqu'un était interdit. Mais je doute que cette règle s'applique aux humains, surtout aux intrus comme moi.

— Je ne vois pas de quoi tu parles.

Je ne peux que nier, pour l'instant, ne trouvant pas d'autre échappatoires.

Je ne peux même pas fuir; le labyrinthe me bloquant toute autre issue possible.
Ce n'est pas vraiment dans mes options d'y retourner.

Son sourire s'élargit. Chaque mouvement qu'il fait m'envoie un nombre incalculable de frissons. J'ai l'impression qu'au moindre geste, ma vie peut s'éteindre et tous mes efforts pour arriver là où j'en étais — avant d'atterrir ici — ne deviendront rien d'autre que poussière.

— Ton nom ? Sa voix est ferme et ne laisse aucune place à l'hésitation.

Que je le lui donne ou non, il finira par le savoir. L'indécision me paralyse. Je dois éviter de le provoquer au risque de me mettre dans une situation encore pire.

Les probabilités que mon sort s'améliore  en lui donnant ce qu'il veut sont bien plus élevées que l'inverse.

— Nova.

— Nova ?

J'inspire profondément, essayant de calmer l'agitation qui m'envahit.

La raison avant la fierté, me répété-je.

— Nova Klein.

— Voilà qui est captivant.

Je le fusille du regard. Des centaines de mots me brûlent la langue, mais je n'en prononce aucun. Je serre simplement les poings.

Il a ma putain de vie entre ses mains.

Il s'approche lentement, son regard me dissuade de bouger.

Est-ce qu'il va me tuer ?

Plus il réduit la distance entre nous, plus la tension monte en moi. J'essaie de me souvenir à quel moment précis ma vie a autant dérapé, mais plus je cherches des réponses, moins j'en trouve.

Plus rien n'a de sens.

Lorsqu'il arrive à ma hauteur, ses yeux scrutent chaque parcelle de mon corps avant de remonter jusqu'à mes yeux.

— Tu ne me traites plus de connard, Nova Klein ?

Je ne recule pas, mon dos déjà plaqué contre le mur. Aucun mot ne sort de ma bouche. Mon regard suffit à exprimer toute la haine que je ressens.