Chapitre 3

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Le propriétaire des iris gris est parti aussi vite qu'il est venu. Il ne m'a pas accordé plus d'attention lorsqu'il m'a laissée pour morte, adossée à l'arbre.
Une fois qu'il soit sorti de mon champ de vision, j'enlève mon pull, pour déchirer mon tee-shirt et en faire ainsi une compresse. Le frottement du tissu contre la plaie me provoque une douleur insoutenable, mais j'y fais face malgré tout. Car dans le cas contraire, l'hémorragie ne s'arrêtera pas et je mourrais sûrement.

Une fois le flux de sang stabilisé, je remets mon pull. Fort heureusement, il a touché la partie latérale de mon abdomen, où peu d'organes vitaux se trouvent.

Une fois la blessure pansée, je plaque mon dos contre l'écorce de l'arbre, reprenant difficilement mon souffle. J'essaie de ne pas prêter trop attention à la douleur, même si, à chaque pas que je fais, elle me consume à nouveau.

Un mince sifflement détourne ma concentration. Ce n'est alors que je réalise que mon assaillant respire encore.
Sa vie ne tient désormais qu'à un fil. Je me relève et lui tourne le dos, préférant le laisser agoniser dans sa douleur.

Mais les paroles de la vieille dame me reviennent en mémoire.

"— Vous devrez, dans un temps imparti, tuer la personne de votre choix. Les participants qui n'auront pas accompli cette mission recevront, comme châtiment, la mort."

Je le regarde par-dessus mon épaule. Il essaie désespérément de respirer et de bouger ses doigts, mais son corps semble refuser d'obéir.

Bien. Il n'est désormais rien d'autre que la proie la plus facile que j'aurais pu avoir.

Même si ce n'est pas moi qui ai porté le coup le plus important, je peux donner le coup fatal.

Je le désarme, m'emparant de la dague avec laquelle il comptait me tuer. Il a aussi un revolver, mais je ne sais pas m'en servir, alors il ne me sera pas d'une grande utilité.

Je prends néanmoins l'arme, la cachant dans ma poche arrière.

— Tu as mal, n'est-ce pas ?

Il hoche la tête avec difficulté, s'attendant sûrement à ce que je l'aide. Je n'ai jamais tué auparavant, alors le faire pour la première fois, même avec une personne comme lui, n'est pas aussi facile qu'on pourrait le penser.

Mais c'est une nécessité. Alors je n'hésite pas deux fois, et j'enfonce sa propre dague dans sa cage thoracique.

Il reste en vie quelques secondes, ses yeux fixant la plaie que je viens de lui infliger, avant  qu'ils ne s'éternisent ouverts.

Même s'il a essayé de me tuer par pur plaisir, une envie de vomir me saisit lorsque son âme semble s'échapper de son corps sous mes yeux.

Je ne peux désormais plus faire de retour en arrière. J'ai pour la première fois de ma vie, ôté une vie. Mes mains se sont tâché de sang dans un silence hypnotisant.

Je ne nettoie pas la dague, une fois retirée, au cas où on me demanderait une preuve que je l'ai tué, même si je pense que cette arène est bourrée de caméras ou de technologies capables de le confirmer.

Je me cache au sommet d'un arbre, attendant la fin de l'épreuve, pour éviter de me confronter à d'autres dangers que je ne serais pas en mesure de maîtriser. Continuer à m'aventurer dans l'arène avec cette blessure serait d'autant plus suicidaire.

Même si mon corps crie à la fatigue, je reste sur mes gardes et ne m'endors pas.

Trente minutes après avoir abandonné le cadavre de cet élève, des cloches retentissent bruyamment, suivies de la voix de la vieille femme :

RosehillOù les histoires vivent. Découvrez maintenant