CHAPITRE 25

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« Le père sème, le fils récolte. »
Proverbe chinois

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Isaac








Je crois que je suis foutu. Je dirais même, carrément dans la merde.

Car depuis que j'ai mis les pieds dans cet hôpital, il y a trois jours, la seule image qui m'obsède est celle des mains d'Ambre contre ma peau, et cette lueur d'inquiétude furtive que j'ai décelée dans l'azur de ses yeux, malgré l'obscurité.

Elle a eu peur.

Son souffle chaud contre mes lèvres... Mon âme a reconnu la sienne à cet instant précis. Comme le reflet d'une même image.

Nos secrets font du bruit dans le silence de nos mensonges respectifs. Et j'ai cru qu'elle l'avait senti, elle aussi. Alors, j'ai pensé qu'elle viendrait. Je l'ai attendue. Longtemps. Mais elle n'est jamais venue.

J'ai passé ces trois derniers jours alité. Peut-être plus, peut-être moins. J'ai perdu la notion du temps, sous l'effet de la morphine et de la fatigue.

Le médecin m'a sermonné à plusieurs reprises, me demandant de rester encore quelques jours. Mais l'idée d'être enfermé ici, pendant que les enfoirés qui m'ont fait ça sont toujours en liberté, m'empêchait de rester allongé.

Ça, et le fait de savoir qu'Ambre est seule dans cette immense maison.
Et si Baine avait renvoyé ses hommes pour finir le travail pendant que je suis ici, accroché à ces machines, incapable de me déplacer par moi-même ?

Alors, j'ai demandé à Sofiane de veiller sur elle, mais on parle d'Ambre, après tout. Elle serait capable de lui filer entre les doigts pour je ne sais quelle raison, en prétextant qu'elle est assez grande pour se défendre elle-même.

Et je lui fais confiance là-dessus. Elle me l'a prouvé à plusieurs reprises. Mais face à Baine et ses hommes, elle n'a aucune chance.

C'est pour ça que j'ai signé cette lettre de sortie contre avis médical, et que j'ai pris le premier taxi sans prévenir personne, direction la maison de mon père.

Tout est de sa faute.
C'est à lui qu'ils en veulent. À lui, et à son incapacité à gérer son empire.

Mais Seto McGuire est intouchable. Et il le sait très bien. Malgré ses soixante-sept ans, mon père reste l'un des hommes les plus redoutés du pays. Ce royaume qu'il a bâti sur le sang de ses sujets perdure depuis des années pour une bonne raison : personne n'est resté en vie assez longtemps pour le menacer.

Du moins, c'est ce qu'il pense.

Depuis qu'il a délégué la gestion de son commerce à Evan, ceux qui étaient effrayés par lui ont compris que le temps avait fait son œuvre, et qu'il ne resterait bientôt plus rien de l'homme qu'il était jadis. Il est devenu faible.

Et ça fait le bonheur de ses ennemis. Et des ennemis, il en a un tas, cachés dans les recoins de son ombre.
À commencer par moi.

J'aspire rageusement sur ma clope en frappant du pied contre le sol, le regard fixé sur le bâtiment où il vit actuellement. Seul. Comme il le mérite.

J'ai toujours tout encaissé.
Toujours.

Je n'ai jamais fait la moindre vague en trente et un ans. Parce que, que je le veuille ou non, ce monde dans lequel j'ai grandi était le seul que j'aie jamais connu. Sans lui, je n'ai plus rien.

Mais je n'ai pas besoin de le quitter. Il suffit d'éliminer la tumeur avant qu'elle ne métastase et ne devienne incontrôlable.
Seto, l'heure est venue pour toi de tirer ta révérence.

NémésisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant