.35. La coïncidence n'existe pas

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⊱♥⊱╮꧁ - Chapitre 35 - ꧂╭⊱♥≺




Yennefa.

L'encre à la teinte noire calligraphie des lettres difficilement lisibles sur la copie. Mon poignet devient affligeant tandis que je coince laborieusement le stylo entre mon index et mon pouce, me forçant à produire des ultimes efforts. Les mots apparaissent les uns après les autres dans mon esprit lorsque j'achève la dernière phrase de ma dissertation.

– Posez vos stylos, l'épreuve est terminée, proclame un écho féminin, résonnant dans l'ensemble de l'amphithéâtre. Je m'exécute comme tout le monde, agglutinant mon stylo sur ma table. Il me suffit de quelques instants à peine pour reconnaître les râlements ou encore les expirations de fatigue qui bruissent autour de moi.

En redressant un épi indocile derrière mon oreille, je me lève de mon siège en emportant la copie entre mes mains. Je toise la pièce, m'attardant sur le deuxième rang devant moi. Une chevelure noire, sombre et parfaitement raide attire immédiatement mon attention. La femme se retourne lentement, croisant mon regard avec une grimace de mécontentement. Les deux billes de Pénélope me font réaliser sans équivoque que cette épreuve n'a pas été une partie de plaisir.

Dans un geste théâtral, elle passe son pouce sur sa gorge, traçant une ligne horizontale et invisible pour miner avec sarcasme la souffrance qu'elle a éprouvée. Je souris discrètement, hochant la tête avant de quitter mon rang afin de déposer ma copie. Les étudiants se bousculent, tous hâtés de clore cette semaine lancinante.

Mes épaules s'affaissent légèrement tandis que je descends les marches menant en bas de l'amphithéâtre, obligeant la tension accumulée à s'évanouir progressivement. Cette épreuve vient de marquer la dernière étape. La semaine de partiels s'est enfin achevée, emportant avec elle le poids de tous mes tracas et inquiétudes. Les images de mes soirées d'étude dans l'isolement de ma chambre, cloîtrée dans mes révisions jusqu'aux premières heures du jour, me reviennent comme un fragment de souvenir.

Car désormais, tout cela appartient au passé. J'arrive devant la pile de copies et dépose la mienne, l'esprit apaisé. En suivant la foule, je me hisse en dehors de l'amphithéâtre. Il me semble avoir aperçu Maeve quitter plus tôt que prévu, je me résous donc à attendre uniquement Pénélope. Parmi la multitude de visages, le sien finit par émerger dans la foulée. Elle me lance un signe de tête avant d'obliquer dans ma direction. Pénélope fond une main manucurée dans ses cheveux, la mine ramollie.

– Putain, j'en pouvais plus, s'exclame-t-elle en levant les yeux chargés de mascara au ciel.

– C'est fini, n'y pense plus, la rassuré-je avec entrain, marchant à ses côtés le long du couloir. Sur le chemin que l'on sinue pour atteindre l'extérieur de la bâtisse, Pénélope partage ses pronostics ainsi que ses calculs personnels qu'elle a effectués quant à nos futures notes. À l'aide de ses doigts, elle décompte ses points inférieurs au coefficient avec une telle concentration qu'un sourire amusé effleure mes lèvres.

– Et si jamais il me donne un point sur le deuxième exercice, ça me ferait un bon quatre...confie-t-elle. – Ou peut-être six, en droit civil ! déclare-t-elle avec un enthousiasme teinté de fierté.

– Tu comptes sur dix, rassure-moi ? me moqué-je avec bienveillance, passant le seuil de la sortie de l'université. Pénélope écarquille les yeux, visiblement surprise, avant d'arborer un sourire malicieux et de désigner son majeur.

Nous poursuivons notre route sur plusieurs mètres, le vent battant s'immisçant sous mes vêtements alors que nous savourons ces derniers jours de janvier. Le bout de mes doigts est gelé et Pénélope, à ma gauche, s'accroche à son écharpe grise. Je marche sur le chemin boisé, mes pas me guident à proximité du parking. Une fois à ce niveau, je bifurque à gauche pour rejoindre l'arrêt de bus qui mène à l'appartement.

UNFAIRNESSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant