.28. Quatre minutes

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☾  

Yennefa.

Il y a des choix que l'on fait par confiance, mais que la réalité finit par remettre en question. Parmi ces choix, au risque de me perdre moi-même, j'ai choisi de croire en ses paroles.

Mais sans surprise, je me retrouve, une fois de plus, confrontée à mes ressentiments négatifs engendrés par son comportement contradictoire.

Je relève mes longs cheveux roux en un chignon, le miroir me renvoie l'image de mes traits marqués.

Mes cernes, d'un brun vif, m'octroient une asthénie qui semble se refuser à quitter l'empreinte de ma peau. Lorsque j'amasse mes cheveux, l'épiderme de mon ventre se tend, éveillant une affliction inopportune.

Je déglutis difficilement dans un geste retenu, afin d'encaisser ce picotement de souffrance tenace qui murmure sa présence saillante dans chacun de mes mouvements.

Dans un balancement empreint de délicatesse, je soulève légèrement mon pull pour observer mon ventre. Je ne perçois que peu de choses à cause du bandage.

Le pansement occulte presque tout, ne laissant deviner qu'un fragment de moi-même, mais suffisant pour que je ressente la mémoire de la douleur inscrite dans chaque fibre.

J'inspire un grand coup avant de rabaisser mon pull, dissimulant ce qui doit être abrité sous les couches de tissus.

Puis, dans un souffle imperceptible, je tourne les talons et quitte la salle de bain, abandonnant derrière moi le miroir, témoin muet de mes silences.

Plus tôt dans la journée, Hailey est venue me rendre visite.

Mon amie m'a rapporté des vêtements, de quoi pouvoir être à l'aise. Lorsqu'elle est apparue, ses mots débordaient d'effervescence, tous tournés vers le nouvel emploi qu'elle a décroché.

Après avoir vu ses études en commerce s'évanouir cette année, elle a postulé dans un cinéma.

Hier, elle a entamé sa première soirée de travail. C'était une étape importante pour elle, surtout après ce qu'elle a traversé, tant physiquement que mentalement.

Dans son regard, lorsqu'elle me parlait de ce job, je pouvais lire à la fois de la détermination et une certaine fragilité, comme si ce départ représentait une véritable chance de se reconstruire.

Discuter avec elle était une échappatoire salvatrice à cet appartement dans lequel je suis enfermée, prisonnière des murs d'un homme que je peine à regarder droit dans les yeux.

D'autant plus qu'après le départ du brun, j'ai remarqué que Logan n'est pas venu. Celui qui est censé vérifier mes bandages et jouer au médecin semble avoir, à son tour, écarté son rôle.

Il s'est sûrement résigné à mettre fin à ce deal qu'il avait, je suppose, accepté par obligation.

Cette absence, bien que moindre, résonne avec un poids inattendu dans cet espace sourd, me rappelant une fois de plus ma solitude.

À travers les fenêtres, je perçois les feuilles se frotter entre elles, et les arbres répondent dans un crissement sous la force du vent.

Le ciel se teinte d'un ton livide, et la nuit enveloppe la ville, comme forcée par son rôle de souffler la pénombre. Je m'entraîne vers la cuisine, saisissant le bol de nourriture que Hailey m'a préparé.

Je m'installe sur le comptoir de la cuisine ouverte qui donne directement sur le salon, m'offrant une vue sur la pièce adjacente.

Mais alors que je souffle sur la bouchée brûlante de ma fourchette, le bruit de la serrure qui tourne à plusieurs reprises me fait sursauter.

UNFAIRNESSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant