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Leaving tonight — The NeighborhoodKAITH
Le soleil vient à peine de se lever et je me les caille.
Assis sur un banc juste à côté de la fac, j'observe le ciel qui se teinte d'un gris plus clair au fur et à mesure que le jour s'étend. Je me lève rarement aussi tôt, du moins quand j'arrive à dormir. Si Rowan n'avait pas insisté pour que j'aille chercher sa came, peut-être que j'aurais pu faire passer mon temps de sommeil à au moins deux heures, mais il faut croire que tout est contre moi ces derniers temps, même ma propre famille.
Je ne comprends pas pourquoi il ne le fait pas lui-même, d'autant que je suis persuadé que la poudre qu'on trouve dans la capitale doit-être bien meilleure que cette merde coupée au bicarbonate que lui file son dealer. À l'époque, il avait accepté de m'en faire goûter un peu, et j'en garde toujours un souvenir gerbant – c'est d'ailleurs ce qui m'a donné envie de sérieusement ralentir sur ce genre de substances, l'été dernier.
Rowan a toujours eu des goûts particuliers. Après tout, ce n'est qu'un énième gosse de riche qui sniffe de temps en temps pour oublier à quel point il est difficile de venir de ce genre de milieux, je ne lui en veux pas de ne pas être sélectif. Si je n'étais pas la bête noire de mon père, peut-être que moi aussi, je me contenterai de came premier prix pour oublier mes petits problèmes égocentriques. Il faut croire que parfois, être un échec peut avoir quelques côtés positifs.
Orion, son dealer – ce doit-être un pseudonyme, je refuse de croire que l'on puisse porter un prénom aussi laid – arrive sur les coups de sept heures. Je commence à avoir l'habitude de ses retards répétés, je n'y fais presque plus attention. Quand il est assez proche de moi, je sors la main de ma poche pour la claquer dans la sienne.
Habilement, je me saisis du petit paquet alors que lui récupère le billet coincé entre mes doigts et ce sans que qui que ce soit puisse deviner la supercherie. De l'extérieur, ce n'est qu'une poignée de main entre potes.
– Ça va ? me demande-t-il, plus par politesse que parce qu'il en a quelque chose à foutre.
Je hoche la tête en réponse, ne prenant pas la peine de lui retourner la question. On sait tous les deux que je ne prêterai pas plus d'attention à sa réponse que lui à la mienne.
– Tu diras à Rowan que la prochaine fois ce sera le double, grogne-t-il en plongeant ses mains dans les poches de son manteau. Il me doit de l'argent et j'en ai marre d'attendre qu'il ramène son cul à Bristol.
Je hausse un sourcil. Ce n'est pas le genre de mon cousin de laisser traîner des dettes, encore moins avec ce type de gars. Orion est assez connu dans le milieu de la nuit, et pas pour de bonnes raisons, c'est un miracle que Rowan ait le droit à un délai supplémentaire. D'habitude, Orion ne s'emmerde pas avec les gentillesses, il envoie directement ses gars chez son débiteur pour récupérer son dû. Si je trouve son nom ridicule, je ne suis pas assez inconscient pour me frotter à lui de cette façon. Je récupère la coke de Rowan, et je m'arrête là.
– Pourquoi tu ne le lui dis pas toi-même ?
Il laisse échapper un petit rire comme si je venais de dire la chose la plus ridicule qu'il ait jamais entendue.
– C'est ce que j'ai fait les quatorze dernières fois dans son répondeur. Il commence à me pomper les nerfs, alors dis lui que j'ai pas le temps de jouer.
Il me jette un regard plein de sous-entendus.
Je fronce les sourcils parce que c'est la seule chose que je peux faire pour masquer la douloureuse torsion dans mon estomac. Je joue l'idiot mais le message est très clair : si Rowan ne paie pas, Orion viendra chercher son argent ailleurs. Le seul garant qu'il lui reste dans cette ville de merde, c'est moi.

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THOSE WE LOST
RomanceLes seules choses immuables dans l'existence de quiconque sont la naissance et la mort. Tout ce qui se produit entre ces deux événements n'est que le fruit de décisions, et Lilith en a prise une de la plus haute importance: Elle veut le faire payer...