ALTITUDE | édité chez Nisha et Caetera

𝐏𝐑𝐎𝐋𝐎𝐆𝐔𝐄

𝑨𝒏𝒈𝒆

Nous ne parlons pas assez des conséquences psychologiques de l'absence d'une figure paternelle chez un enfant, peu importe son âge, la cause ou encore la durée de cette absence.

Ne pas pouvoir connaître, se référer ou montrer ce que l'on devient à son père est une réelle souffrance qui s'étend tout au long de la vie.
Au-delà de la tristesse, de la mélancolie, il ressent de l'incompréhension. Compliqué d'expliquer à un petit que ce matin, papa ne l'amènera pas à l'école.

Après avoir passé la plupart de son temps dans le déni de cette disparition, l'enfant vit définitivement dans l'ombre, le souvenir de son père. Il se réfère à des récits, des paroles et des photos données par le reste de sa famille.

Mais personne ne parle du deuil familial non plus. Quand un des piliers du foyer n'est plus là, certains secrets transgénérationnels se créent. Et à vrai dire, je n'ai jamais vraiment compris pourquoi.

À quoi bon cacher ou réinventer une fin d'histoire déjà écrite ?

De plus, ces secrets sont comme des fantômes dans la chambre des enfants - vous savez, ceux en dessous de notre lit - des visiteurs qui surgissent et ressassent le passé, qui s'installent et dirigent la répétition de la tragédie familiale.

Par moment, il se sentira coupable et n'arrivera pas à aller de l'avant, ou au contraire, il sera émotionnellement détaché de tout.
Ne jugez pas ces enfants, ne jugez pas ces adultes, ils ont déjà un vide assez conséquent à combler.

Pour ma part, ce vide vient bien de là et a été causé par son décès.

𝑰𝒓𝒊𝒔

On m'a fréquemment reproché d'avoir une sensibilité débordante, de prendre tout trop à cœur. Mais aussi d'être immature émotionnellement parlant, d'être trop repliée sur moi même, de ne pas m'intégrer ou d'avoir une peur constante de l'abandon. Un excès de « trop » et une surabondance de termes complexes pour une petite fille.

On m'a finalement diagnostiqué hypersensible. Je ne sais pas ce que cela m'apporte dans la vie de tous les jours à part que j'ai cette tendance à vivre dans le passé et que j'ai du mal à me projeter dans le futur.
Papa et maman m'ont toujours dit que ce trait de caractère, qui est considéré comme une faiblesse pour les autres, est un don pour moi.
J'ai le pouvoir de ressentir les émotions des gens autour. Classe dit comme cela mais anxiogène au quotidien.

Alors papa a trouvé un moyen pour pallier à ce problème, il m'a inscrit dans une école de danse : « Retranscrit toutes ces émotions dans tes mouvements ».
Au départ, je n'aimais pas forcément. Introvertie bonjour ! Mais au fur et à mesure, j'ai compris. J'ai compris que la danse allait être mon remède et la solution à mes maux. Je rejette toute pression émotionnelle dans les chorégraphies.

Merci papa.

Oh et j'allais oublier... je fais comme s'il était toujours là, avec moi, à regarder les étoiles mais dorénavant, c'est lui, l'étoile que je regarde.