l'amour bleu (pt.2)

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Dominée par choix de cet amour pour le monde et toutes les créations, la mer ne me quitte jamais même la plus éloignée ; quitter un être pour quelque temps et le pleurer comme un mort, se rendre compte de la manière la plus abrupte que les plus aimés eux aussi sont objet de ma colère et une colère qui sûrement ne disparaîtra jamais complètement. Je n'accepterais jamais qu'elle persiste jusque ma  fin et pourtant, la voilà qui s'agite, la voilà qui brûle et me voilà à me demander quand est-ce que cette blessure plus grande encore que toutes celles passées, creusée à mesure du temps, décidera enfin de cicatriser : il y a longtemps que le fil ne suffit  plus, ni les flammes, ni les quelques sensations restantes, j'ai tout essayé, j'ai couru derrière tout, derrière elle, derrière eux, et s'en est résulté ce que j'ai toujours craint et ce dont je refuse de m'habituer : l'abandon de l'un comme de tous les autres et parfois même de mon plein gré, qu'est-ce qui refuse encore de fonctionner cette fois ?

Accepter l'amour revient aussi à accepter des plaies oubliées, celles que j'ai longuement mis de côté au profit d'autres, tout mettre sur le dos de quelques personnes pour continuer d'en idolâtrer d'autres, tenter de survivre de tous ces sentiments négatifs par l'ignorance, par le positivisme excessif, par la colère rejetée sur d'autres innocents et se retrouver finalement une énième nuit d'hiver face à une autre  révélation tout aussi importante que la première, peut-être même davantage : je dois accepter toutes les colères, et de même celles que je ne soupçonnais pas. Afin de se doter d'un amour pur et complet pour l'Univers et tout ce qui l'entoure, pour soi et l'Autre, pour Celui qui offre sans compter et pardonne à chaque nouveau rejet, il faut accepter ce qui a toujours fait mal, ce que ce monde ne m'a pas donné, ce que ce monde m'a mal doté, tout ce qui finalement cause ces interminables larmes au point  d'en perdre toutes les notions.

[...} objet parmi d'autres objets depuis toujours et pour mieux accepter cette hémorragie, j'ai choisi volontairement de mettre la faute sur une seule  personne dont ma colère pour elle surpassait de toute manière déjà  toutes les autres. Je n'ai jamais été sincère,  j'ai toujours pensé bien faire, j'ai toujours cherché à me sauver, j'ai toujours voulu mon bien sans jamais le faire correctement puisque livrée à moi, la dureté de cette dernière année me rapprochant de l'échéance m'aura certes permis de grandir encore, jusqu'à être libre.

Pour accepter l'amour, il faut accepter toutes les fois où celui-ci se confond à la mer, il faut accepter son goût d'acier, il faut accepter ses conséquences, il faut accepter sa mauvaise nature à laquelle il ne peut, nous ne pouvons échapper. Les torts causés n'ont jamais été volontaires, seulement enchaînement, et la tristesse qui perdurera encore et encore finira par se tarir doucement, peu importe quand mais elle le fera, parce qu'accepter l'amour comme désiré amènera forcément à la liberté vers laquelle je n'ai cessé de me tourner. Peut-être la rage finira par complètement cesser, je me sens déjà plus forte, chaque jour passé où j'ai ri plutôt que ruminé, chaque nuit passée où j'ai ri encore au lieu d'écrire, chaque soirée où j'ai souri, où j'ai osé parler au lieu de m'effacer davantage, je me sens plus grande, la rage disparaîtra à mesure que l'amour grandira, l'amour inconditionnel, l'amour qui ne se laisse jamais prendre par la jalousie, l'envie, les mauvais souvenirs ou les cauchemars mais bien l'amour  tranquille qui ne demande rien mais qui grandit, qui grandit seul, s'élargit et devient immense, l'amour qui n'espère rien, qui n'attend rien mais qui se déverse et rejoint les vagues. L'amour bleu.

Le bleu de l'angoisse qui n'était finalement qu'un leurre, lui-même n'acceptant pas l'immensité qui se profilait devant lui à travers cet amour ayant toujours été là mais que nul n'a voulu voir. L'amour d'un autre rien que pour soi n'était qu'une quête subsidiaire, une quête assez simple et permettant d'oublier le reste, le véritable amour qui n'a besoin de rien pour Être.

Demain je la retrouverai, la mer, et je me rappellerais de ce qui nous lie véritablement depuis  tout ce temps, un lien puissant, un lien grandissant, celui de l'Amour et de tous les fils que l'on possède à présent pour coudre les dernières blessures découvertes ; le sel comme antalgique et les dernières paroles que l'on ne se remémorera plus.

6 janvier 2024

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