Chapitre 1 - Le gage.

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« Allez, Cameron, tu ne vas pas te dégonfler, sérieusement ? »

Inspirant un grand coup, le dit Cameron se pinça les lèvres, mordilla le piercing qui se trouvait sur sa lèvre inférieure, l'air nerveux plus qu'à l'accoutumé – et il y avait de quoi. Installé entre deux de ses amis, dont l'un fêtait ses vingt-quatre ans, expliquant leur présence dans ce bar à une heure aussi tardive, il triturait lentement ses doigts, le regard fuyant. Comme à son habitude, il s'était laissé embarquer dans une situation improbable, et qui était à présent, particulièrement gênante, le mettant dans un certain embarras. Passant une main dans ses cheveux noirs ébène, il observa distraitement les inscriptions sur ses doigts écrit d'une fine police noire, fait une année auparavant, avant de soupirer un petit coup. Il ne pouvait pas faire ça, c'était réellement déplacé et presque mesquin. Il n'aurait pas aimé que l'on vienne lui souffler une telle chose, cela l'aurait clairement offensé.

« On a passé l'âge de faire ça, les mecs, non ? Rappliqua-t-il dans l'espoir vain qu'ils ne passent l'éponge le concernant. »

Pourtant, l'homme assis face à lui pointa son annulaire vers lui, l'agita de gauche à droite, avant de faire un petit bruit par le biais de sa bouche, qui démontrait qu'il n'avait en aucun cas le droit de se défiler. Il agita alors ses sourcils de manière significative, avant de minauder d'une voix un peu trop aiguë qu'il prit visiblement volontairement.

« Non, non, non. Nous sommes tous passé par là, à présent, c'est ton tour. Le nouveau. »

Récemment, il avait été embauché en tant qu'avocat dans un cabinet comportant plusieurs d'entre eux, ainsi que quelques individus qu'il connaissait du lycée, ou tout simplement depuis l'enfance. Le rituel était simple, dès que l'un d'eux rentrait officiellement dans le monde du travail, ils se retrouvaient pour fêter ça, et le chanceux avait droit à un gage plus ou moins facile à effectuer. Pourtant, à cause de l'anniversaire de l'un des leurs, Cameron avait bêtement cru qu'il pourrait passer entre les mailles du filet. Grossière erreur. Le voilà piégé.

« Je pensais que nous étions là pour Josh ? »

Il tentait vainement de détourner l'attention, mais cela s'avérait réellement plus complexe qu'il aurait pu l'imaginer au départ. Josh afficha un grand sourire, haussa brièvement les épaules, avant d'ajouter d'une voix quelque peu amusée mais aussi sérieuse :

« Ça ne me dérange pas que mon anniversaire soit éclipsé par ton gage, ne t'en fais pas pour ça. »

Josh avait toujours été un ami assez proche de Cameron, pourtant il lui plantait clairement un poignard dans le dos en agissant de la sorte. Les sourcils froncés, le ténébreux mima de ses lèvres sans pour autant sortir un seul son : « connard ». Josh lui répondit par un clin d'œil complice, taquin, qui finit par arracher un sourire à son vis-à-vis. Très bien, il ne pouvait pas lui en vouloir, pas à lui. Pourtant, le gage était une chose choisie et réfléchie entre les autres, de ce fait, il était complice. D'habitude, leur gage se résumait à des choses basiques, tel que : allez séduire une femme au comptoir et lui voler un baiser en un temps donné ; ou bien de boire une quantité d'alcool prédéfinie. Néanmoins, lui avait écopé d'un tout autre gage, quelque chose de jamais vu entre eux, quelque chose d'improbable et de clairement dérangeant.

« Bon, tu vas le voir ce type ? Aller quoi, c'est pas le bout du monde non plus, Soupira Aymeric installé face à lui.

- Tu crois ça ? Rappliqua-t-il d'un ton ironique.

- Il n'acceptera pas, de toute façon, alors tu ne risques rien. Excepté une honte importante, et éventuellement, une droite de cet inconnu. »

Cameron fusilla de nouveau Josh du regard, se demandant à quoi il pouvait bien jouer. Sérieusement, qu'est-ce qui lui permettait de dire que cet individus allait refuser au juste ? Rien, que dalle. Il risquait de se faire baiser dans les chiottes de l'établissement – ce n'était pas rien quand même. Bien évidemment, son homosexualité n'était pas une chose secrète que chacun ignorait, mais ce n'était pas une raison pour commettre un tel acte. Inspirant un grand coup, il porta son verre encore à moitié remplie de whisky, en bu deux grandes gorgées pour se donner du courage, avant de jeter un coup d'œil à ce qui pouvait être sa « proie » pour son fameux gage.

DésillusionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant