Hadrien

Hugo 2

Mon deuxième patient revient aussi pour une nouvelle séance ! Ils vont finir par me faire croire que j'ai certaines compétences dans le domaine de la thérapie. Pourtant, j'ai l'impression d'avoir donné des conseils hyper nuls, voire de ne pas avoir été d'une grande aide du tout. Hugo veut faire son coming-out, mais il n'ose pas, ou plus précisément il ne sait pas comment s'y prendre. Je lui ai conseillé comme exercice de se confier à sa meilleure amie, Laure, pour voir sa réaction et parce que c'était la méthode la plus sûre, comportant le moins de risques. Voyons s'il est allé jusqu'au bout.

– Votre café.

Je retiens ce que mes patients choisissent comme boisson pour débuter la séance. Pour l'instant ce n'est pas très compliqué, puisqu'ils ne sont que quatre.

– Comment allez-vous depuis la dernière fois ?

– Bien.

– Parfait, je dois prendre cela comme signifiant la réussite de notre petite expérience ?

– Non, je n'ai pas osé.

– Expliquez-moi.

– Je n'ai pas osé en parler à ma meilleure amie. J'étais sur le point de le faire, mais il y a eu un blocage.

– Vous n'avez pas confiance en elle ?

– Si, totalement, mais je me suis fait griller la priorité.

Bien, il s'ouvre un peu plus vite que lors de la première séance. C'est donc que j'arrive à instaurer un espace de confiance, que je mets les patients à l'aise, c'est une bonne chose.

– Expliquez-moi.

– On est un groupe de plusieurs amis. Samedi soir, deux jours après notre entrevue, on avait une fête d'anniversaire, celui d'un pote.

J'écoute, puisque j'ai appris que je ne devais réagir que lorsque nécessaire. Je ne suis pas toujours obligé de dire quelque chose, au risque de couper le patient dans son élan et de mettre un terme prématuré à la discussion.

– Au moment de souffler les bougies de son gâteau, tout le monde l'a poussé à faire un vœu. Il a répondu : « Je souhaite que vous ne me rejetiez pas ».

Je hoche la tête de bas en haut, pour me montrer intéressé et toujours pour ne pas intervenir.

– L'ambiance s'est crispée, personne ne savait ce qu'il voulait dire.

– Vous l'avez poussé à se livrer ?

– Oui, on voulait comprendre cette phrase mystérieuse.

– Qui signifiait ?

– Il nous a dit qu'il était gay.

J'en recrache une partie de mon café. Ce n'est pas très professionnel, mais c'est une réaction incontrôlable.

– Il a fait son coming-out devant tout le monde.

– Comment les autres ont-ils réagi ?

– Pendant de longues minutes, personne n'a ouvert la bouche. Aucun de nous n'avait anticipé cette déclaration.

– Il n'y avait pas d'indices ?

– Non, il y a un mois encore il sortait avec une fille. Il fait très hétéro, il est mignon, on l'a toujours vu avec une petite copine. Et chaque fois, la relation semblait bien se passer, à tous les niveaux. Personne ne soupçonnait la réalité.

– Et vous, qu'avez-vous éprouvé ?

– De la jalousie, d'abord.

– Pourquoi ?