Hugo 1

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Je devrais être content, puisque pour mon premier jour de travail j'ai un deuxième rendez-vous de programmé. En fait, le premier m'aurait suffi. Mes amis ont sans doute surestimé mes capacités et ma force. Je le savais. Recueillir les confidences de ses potes, c'est naturel, c'est logique et cela ne m'a jamais posé aucun problème. Par contre, écouter une personne que je ne connais pas se livrer sur ses difficultés, c'est autrement plus compliqué. Mais, maintenant que j'ai commencé, je suis en quelque sorte obligé de continuer. Rien que le fait d'avoir reçu Nicolas dans mon cabinet m'empêche de simplement renoncer, mettre la clé sous la porte et revenir à un métier plus tranquille. Ce jeune homme pense quand même à se suicider ! Je ne peux pas le laisser tomber. J'espère que le patient suivant aura des problèmes moins complexes, je ne sais pas combien de négativité je peux encaisser.

Je laisse entrer Hugo dans mon cabinet. D'après les informations qu'il a données, il a vingt-quatre ans. Les réservations se font par le site Internet que mes potes m'ont créé, puisqu'ils ont tout fait. Chacun peut y laisser les informations qu'il souhaite et peut évidemment mentir, sur son prénom, sur son âge... Il n'y a aucun contrôle. C'est difficile de faire la démarche de venir se confier à quelqu'un, il ne faut aucun blocage, ne pas être trop invasif tout de suite.

– Je peux vous servir un café ou un thé ?

J'aime bien cette méthode. Préparer l'une des boissons laisse passer un peu de temps, pour que le patient s'habitue à l'ambiance du cabinet et, j'espère, se détende.

– Juste un verre d'eau, merci.

Je m'installe, et je fais mine de chercher ma première question. C'est aussi une sorte de stratégie : je laisse passer un silence, en espérant que le patient commence à parler.

– Vous ne prenez pas de notes ?

– Non, nous sommes là pour discuter, je vous écoute.

– Je ne sais pas trop ce que je fais ici.

Il faut comprendre qu'il le sait parfaitement, mais qu'il ne sait pas par où commencer ou que, tout simplement, ce qu'il a à dire est trop difficile.

– Comment m'avez-vous trouvé ?

Parlons de choses banales. En même temps, je suis curieux. Le premier patient m'a été envoyé par Mehdi, mais là, sauf erreur, ce n'est pas quelqu'un qui a pris rendez-vous sur le conseil d'un de mes potes.

– Je cherchais un psy ou un truc du genre et je suis tombé sur votre site. En plus, je pouvais prendre rendez-vous rapidement.

Je ne vais pas dire que je viens de commencer et que je ne croule pas encore sous les patients, cela n'inspirerait pas confiance.

– Et puis, vous avez de belles photos.

Quelle épreuve ! Je crois qu'on y a passé la journée, mes potes me prenant en photo dans différents endroits, différents vêtements... Je ne suis jamais naturel sur les photos, j'ai détesté ce moment. Mais je dois dire que le résultat est plutôt pas mal.

– Je sais qu'on ne choisit pas un praticien sur photo, mais...

– Je pense que ça joue quand même, pour pas mal de monde.

– C'est vrai.

Cette discussion ne mène absolument à rien. Il faut que je trouve quoi dire, quoi poser comme question, pour arriver au cœur du sujet.

– Que faites-vous dans la vie ?

– Je suis informaticien, dans une petite entreprise.

– Vous aimez ce que vous faites ?

HadrienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant