CHAPITRE 2 | Sky

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𝐒𝐊𝐘

Plusieurs jours sont passés depuis l'incident nocturne de ma première nuit ici. Plusieurs jours durant lesquels, dès lors que j'ai mis un pied dehors, j'ai eu ce sentiment insupportable que quelqu'un m'observait. Ce qui ne m'a pas empêchée de visiter la ville, de m'approprier le campus et de profiter de l'atmosphère anglaise du coin. C'est gothique, mais étrangement féerique. Ça sent les pumpkin spice latte, les cinnamon rolls, la pluie et les vieux livres.

L'automne est ma saison préférée, et elle s'annonce encore plus belle à Oxford qu'aux États-Unis.

Ce matin, je sors tout juste du Brew, un coffee shop chaleureux situé à quelques mètres de ma résidence étudiante. Mon americano à la main, je longe le mur en brique rouge jusqu'à sentir une nouvelle fois cette sensation étrange sur ma nuque. Quelqu'un me suit, j'en suis persuadée.

Je m'arrête net, irritée par cette impression d'être constamment traquée. Je tente de me retourner en vitesse, mais seule une marée de passants m'entoure.

Mon père dit souvent que nous avons un flair particulier dans la famille, qualité qui lui a permis de faire prospérer ses affaires. Pour ma part, si je n'ai pas eu le droit de participer à ses activités professionnelles, j'ai tout de même pu utiliser cet instinct pour mes propres intérêts.

Je soupire et me détourne pour finalement poursuivre mon chemin. Une idée ingénieuse me venant à l'esprit, je prends la direction d'une petite ruelle sombre située à quelques mètres de ma résidence. Elle pourrait être effrayante s'il n'y avait pas un beau lampadaire ancien au centre et des guirlandes de lumières accrochées entre les deux bâtiments rapprochés, mais elle fera l'affaire.

Je prends une grande gorgée de mon café, qui contribue à effacer les traces de ma courte nuit, puis j'avance. Je veille à ne pas faire trop de bruit lorsque mes Dr Martens s'écrasent contre les pavés, afin de pouvoir écouter les bruits environnants. Je n'ai pas pris mon couteau avec moi, cependant à moins que mon traqueur ne soit armé, je devrais pouvoir m'en sortir.

Pour le meilleur comme pour le pire, je suis loin d'être aussi innocente que j'en ai l'air.

– Trois, deux, un... murmuré-je.

Puis je me retourne d'un coup. Et cette fois, je surprends mon guetteur au fond de la ruelle. Un frisson me traverse le corps, c'est le danger qui se manifeste.

Je suis trop loin pour le détailler, mais je peux noter sa grande taille, sa chevelure ébène et sa prestance écrasante. Il reste immobile, assumant d'être pris en flagrant délit. Un sentiment de familiarité me perturbe. Tout de noir vêtu, il me rappelle l'homme de la bibliothèque sous un maquillage de squelette.

Les secondes s'étalent, et ni lui ni moi ne bougeons.

Je refuse de capituler.

Les hommes ne me font pas peur, je suis entraînée contre eux. Néanmoins, cet homme, pour une raison que j'ignore, parvient à créer une certaine frayeur dans mon cœur.

Il s'avance d'un pas et je reste immobile, tentant de lui faire comprendre un mensonge : il ne m'effraie pas. Alors il fait un nouveau pas en avant.

Chaque mouvement chez lui est maîtrisé, précis, comme s'il attendait quelque chose de ma part...

Il fait deux pas de plus, et malgré les quelques mètres qui nous séparent, je peux enfin noter la couleur de ses iris. Bleu clair, glacier, même. Une couleur si unique qu'elle ne peut appartenir qu'au squelette qui m'a menacée lors de mon arrivée.

INSOMNIA [sous contrat d'édition chez Hugo Publishing]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant