#08 - Le regard du dragon aux yeux d'un bleu lagon

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Saison quatre-vingt-seize, je la vis en photo

D'une revue à la mode, je n'en croyais mes yeux.

Présentée au public, au gré de quelques mots

Dans sa lumière unique, au mépris des envieux.


De grande classe elle était. Je ne pouvais douter

De sa notoriété, couleurs chaudes arborant.

Jusque-là j'ignorais ses pages publiées

Exposant la beauté de ses voiles transparents.


Première sortie faite, je n'oublierai jamais

Cette belle inconnue à l'allure familière.

Inaccessible muse que je la désirais.

Son palabre oriental m'était une barrière.


Sa carrière au Japon fut d'un coup, fulgurante.

On ne parlait que d'elle avec fascination

Devenue l'égérie de revues concurrentes.

Je guettais ses clichés, sublimant projections.


Dire que je me ruinais, pour quelques beaux papiers,

Figurant mes désirs, gâcherait l'enthousiasme.

La belle m'avait conquis. D'éloges accompagnées,

Les pages décrivaient l'objet de mes fantasmes.


Les journaux en parlaient dans des phrases élogieuses.

J'espérais sa venue dans un proche pays.

Je me languissais d'elle, la savais prodigieuse.

L'espoir de la toucher, longtemps me fut proscrit.


De ses parents carrés, plutôt traditionnels,

Venait, je le pensais, l'interdit d'étranger.

Dans un livre récent, lisais-je à propos d'elle,

Qu'un divorce troublant devait l'en empêcher.


Hélas, ce devait être, la fin de sa carrière.

Elle fut expéditive. D'autres vinrent remplacer

L'égérie d'une saison. Oubliée comme hier,

L'année d'une passion, demain s'en fut jetée.


Tout quatre-vingt-dix-sept, on n'entendit parler

Plus jamais de ma belle, de mon amour perdu.

Pour rester à la mode, ne lui a que manqué

Parures angulaires, dimensions farfelues.


La belle n'apparut plus, désir inaccessible.

Le temps passa sur nous, intangible démon.

Alors cette rêvée relation impossible

Bientôt ne fut-elle plus qu'un souvenir profond.


Manette au poingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant